Lexique La francophonie de A à Z

Petit lexique de la francophonie en 160 articles

La francophonie de A à Z

Un lexique pour comprendre, regarder, se regarder autrement.
Un lexique pour s’affirmer, oser, redécouvrir et s’approprier enfin sa propre langue.

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Une première édition, préfacée par Louis-Jean Calvet, est  disponible sur le lien https://lnkd.in/dsZscgU.

Petit lexique de la francophonie. Yvon Pantalacci
Petit lexique de la francophonie. Y.Pantalacci

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(Voici donc un) recueil de réflexions et d’observations, sans ordre et presque sans suite …
Je n’avais d’abord projeté qu’un mémoire de quelques pages;  mon sujet m’entraînant malgré moi, ce mémoire devint insensiblement une espèce d’ouvrage trop gros, sans doute, pour ce qu’il contient, mais trop petit pour la matière qu’il traite …
Après de vains efforts pour mieux faire, je crois devoir le donner tel qu’il est, jugeant qu’il importe de tourner l’attention publique de ce côté-là; et que, quand mes idées seraient mauvaises, si j’en fait naître de bonnes à d’autres, je n’aurai pas tout à fait perdu mon temps.

(Rousseau – Emile ou de l’éducation)

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Droits d’auteur  Yvon Pantalacci 2020 – Reproduction interdite sans autorisation préalable. Vous pouvez ponctuellement reprendre une définition du lexique à condition de citer la source comme suit  : Lexique de La francophonie en partage  http://yvon-francophonie.com/lexique-glossaire-francophonie/

  1. Lettre A
  2. Lettre B
  3. Lettre C
  4. Lettre D
  5. Lettre E
  6. Lettre F
  7. Lettre G
  8. Lettre H
  9. Lettre I
  10. Lettre J
  11. Lettre K
  12. Lettre L
  13. Lettre M
  14. Lettre N
  15. Lettre O
  16. Lettre P
  17. Lettre Q
  18. Lettre R
  19. Lettre S
  20. Lettre T
  21. Lettre U
  22. Lettre V
  23. Lettre W
  24. Lettre X
  25. Lettre Y
  26. Lettre Z

A comme Acadie

Acadie

Du nom même Acadie, de l’antique et très romantique Arcadie ou de l’algonquin «cadie », le lieu, personne ne connaît avec certitude l’origine.

Peu importe, les deux idées sont justes et le nom conserve toute sa magie.

Fondée en 1604 sur l’île Sainte-Croix dans l’actuel Etat du Maine, puis un an plus tard à Port-Royal, aujourd’hui en Nouvelle-Ecosse par les sieurs de Mons, Champlain, de Poutrincourt et de Razilly, elle est le socle de la Nouvelle France.
Peuplée par des colons venus de Touraine, du Poitou et de Saintonge, l’Acadie c’est « la colonisation heureuse » (Yves Montenay) : une économie prospère, un statut de neutralité entre les empires anglais et français, d’excellents rapports avec les Micmacs dont, fidèles aux principes de Champlain, ils ne convoitent pas les terres.

Les Acadiens sont ensuite chassés puis déportés, c’est le temps du Grand Dérangement et leurs descendants, les Robichaud, Babineau et autres Cormier vivent aujourd’hui au Québec, dans le Maine, en Louisiane ou en France.

De l’Acadie, que reste-t-il aujourd’hui?

  • Un territoire très inégalement réparti entre Nouvelle-Ecosse, Ile du Prince Edouard et  Nouveau-Brunswick autour de quelques îlots d’implantation majeurs tels que Dieppe, Caraquet et Edmunston.
  • Une communauté d’environ 400 000 personnes, exemple rare de lutte contre l’assimilation et pour l’égalité des droits, construite autour  d’ identifiants  tels que ses universités francophones, Moncton et Sainte Anne, un hymne, une fête « nationale » ainsi qu’un congrès à juste titre qualifié de mondial et qui, portée par son histoire et forte peut-être de son antériorité, cherche à exister en marge d’un Québec omniprésent et se veut, elle aussi, l’un des porte-drapeaux de la francophonie en Amérique du Nord.

 Les Acadiens sont un peuple et un peuple est plus fort qu’un pays. Un pays est une institution, mais un peuple est plus fort qu’une institution, car il a une âme, il a des rêves, il est vivant. 

(Antonine Maillet)

Voir aussi : Cadien, Canada, Champlain, Dugua de Monts (Pierre), Grand Dérangement, Louisiane, Maine, Moncton, Nouveau-Brunswick, Québec, Université Sainte-Anne.

Acadiane

Parmi les Acadiens déportés en 1755, trois groupes réussirent à conserver leur identité : ceux qui revinrent sur leur lieu d’exil, ceux qui s’installèrent au Québec et ceux qui gagnèrent la Louisiane.

Combinaison d’«Acadie » et de « Louisiane », l’Acadiane est le territoire peuplé par leurs descendants, les Cadiens, regroupés autour de 22 paroisses ou comtés sur les 64 que compte cet Etat et désignant officiellement, depuis 1971, la Louisiane francophone.

Les données fournies par les différents recensements, que ce soit ceux des États-Unis ou du CODOFIL, ne permettent pas d’évaluer avec certitude le nombre de francophones de la région.

Une chose est cependant certaine, c’est que ce territoire de forme triangulaire et situé dans la partie sud d’un État dont il occupe environ le tiers de la superficie confère, par sa reconnaissance officielle, une légitimité désormais acquise au fait francophone en Louisiane.

Voir aussi : Cadiens, CODOFIL, Domengeaux (James), Grand Dérangement, Louisiane, Maine

Accords Bourassa-Chirac

Quand Robert Bourassa, premier ministre libéral, se déplace à la rencontre de son homologue français, le Québec est depuis quelques mois seulement  officiellement francophone.

Un Québec qui a désormais besoin d’une langue, une langue technique, du travail et des échanges dans un domaine où tout, ou presque, se déroule en anglais.

Ces accords, signés entre les deux premiers ministres le 5 décembre 1974, vont  jeter les bases d’une coopération linguistique visant à mettre en œuvre une francisation devenue impérative.

Coopération linguistique dont, pour ses volets technique puis économique, le fer de lance va rapidement devenir le Groupe franco-québécois de coopération économique en charge, dès sa création le 11 juin 1975, du pilotage de tous les projets de coopération sur des secteurs prioritaires communs.
Ainsi, exemple hautement symbolique, la raffinerie Ultramar deviendra-t-elle la première raffinerie au monde à être administrée, gérée et à fonctionner en français.

La démarche est identique en matière de formation avec, dans le prolongement de l’Entente franco-québécoise de coopération en éducation du 27 février 1965, un renforcement de la mobilité des enseignants québécois du secteur technique ainsi peut-être  avant tout, pour son aspect innovant, que le programme d’échanges des jeunes maîtres, élargi depuis à l’enseignement secondaire et au domaine de l’enfance inadaptée.

Une coopération linguistique, socle de ces accords, réaffirmée à travers le renforcement du rôle de l’Office québécois de la langue française (OQLF) chargé, en matière de terminologie et de francisation de l’administration et des entreprises,  du pilotage de la coopération avec ses homologues français.

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Jacques Chirac s’est éteint le 26 septembre 2019 sans qu’à aucun moment, dans la presse hexagonale, n’ait été fait la moindre allusion à des accords qui auront pourtant marqué le début de son mandat et influé très durablement sur la perception et le devenir du français au Québec et dans cette partie de l’Amérique du Nord.

Voir aussi : Francophonie économique, Gérin-Lajoie (doctrine), Québec.

ACCT ou Agence de coopération culturelle et technique

L’idée de construction d’un ensemble culturel et linguistique reposant sur une langue perçue comme langue d’avenir, qui libère et qui n’aliène plus,  apparait relativement tôt, au moment précis où s’achèvent les derniers cycles de la décolonisation, à tel point qu’on pourrait presque s’étonner du caractère concomitant de deux processus n’ayant de contraire ou d’antagoniste que l’apparence. 

Le président Senghor l’évoquait déjà en 1962  à travers le projet de formation d’une communauté des pays d’expression française, projet qu’il précisera quelques années plus tard, en 1966, à l’occasion de la conférence de l’Organisation commune africaine et malgache (OCAM) et qui recevra à cette occasion, l’appui des présidents Bourguiba et Diori puis du Prince Sihanouk.

Il faut cependant deux conférences interministérielles, en 1969 et 1970, toutes deux à Niamey, pour donner naissance le 20 mars 1970 à l’Agence de coopération culturelle et technique.  

21 États et gouvernements sont partie à la convention : Belgique, Haute-Volta (aujourd’hui Burkina-Faso), Burundi, Cameroun, Canada, Côte d’Ivoire, France, Gabon, Luxembourg, République malgache, Mali, île Maurice, Monaco, Niger, Québec, Rwanda, Sénégal, Tchad, Togo, Tunisie et  Sud Viêt-Nam.
On note la présence du Rwanda, bien avant les évènements de 1994 et l’arrivée au pouvoir du très anglophile Paul Kagamé ainsi que celle du Québec en qualité de « gouvernement participant », premier jalon d’une doctrine Gérin-Lajoie énoncée quelques années plus tôt. 

Née à l’évidence d’une impulsion africaine malgré les réserves voire la réticence non dissimulée de la France et visant à répondre à l’extension du Commonwealth, fondé en 1931 et comptant déjà une trentaine de membres, l’ACCT, premier organisme intergouvernemental de la Francophonie, s’appuyant sur une communauté de langue et de culture, pose le principe de la langue française comme levier de coopération. 

L’évolution de la Francophonie et l’arrivée  de nouveaux États donne lieu par la suite à d’importantes modifications se traduisant notamment par l’élargissement des domaines d’intervention de l’agence, la création, en novembre 1997 à l’occasion du sommet de Hanoï, d’un poste de secrétaire général ainsi que l’apparition d’une désormais nouvelle AIF, Agence intergouvernementale de la Francophonie qui va dès lors succéder à l’ACCT.

Il faudra cependant attendre la conférence  d’Antananarivo  pour voir la création, le 1er janvier 2006, de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) en lieu et place d’une éphémère et transitoire AIF,  OIF placée sous l’autorité directe du secrétaire général et à vocation désormais, très ouvertement politique.

Voir aussi : Afrique, Colonisation, Francophonie, Gérin-Lajoie (doctrine), Organisation internationale de la francophonie, Québec, Rwanda.

AEFE ou Agence pour l’enseignement du français à l’étranger

Établissement public créé en 1990 et placé sous la tutelle du ministère des Affaires étrangères, l’AEFE assure le pilotage de l’ensemble du réseau scolaire à l’étranger, ce que l’on nomme communément les « lycées français » et gère, de la maternelle au lycée, 520 établissements accueillant environ 350 000 élèves répartis sur 139 pays. 

Il s’agit à n’en pas douter d’un réseau sans équivalent, tant pour des raisons strictement statutaires que pour la qualité d’un enseignement que l’on peut qualifier d’excellence.
Enseignement à la française considéré, de la maternelle à l’université, comme modèle dans nombre de pays étrangers où il bénéficie d’un prestige sans commune mesure avec les critiques dont il fait l’objet sur son propre territoire.  

L’AEFE se démarque par ailleurs des réseaux d’enseignement du même type, la France étant le seul pays à avoir fait le choix d’un dispositif d’enseignement à l’étranger de cette dimension et financé en partie par des fonds publics.
A titre de comparaison le réseau allemand comptait en 2017 140 établissements dans 72 pays scolarisant ainsi 82 000 élèves.

Si les différences statutaires sont parfois notables, chaque établissement étant généralement soumis au droit local, l’homologation qui leur est délivrée par le ministère de l’Éducation nationale forge en contrepartie une identité commune, certifie la conformité de l’enseignement aux exigences du système éducatif français et garantit la qualité de cet enseignement.

Qualité  maintenue par un niveau d’exigence et des résultats nettement supérieurs à la moyenne nationale, des demandes d’inscription en hausse chaque année ainsi qu’une proportion d’élèves étrangers  comprise entre 65 et 85 %, élèves appelés pour la plupart à occuper des fonctions dirigeantes et à former l’ossature du réseau d’influence tel qu’il caractérise aujourd’hui la francophonie. 

Voir aussi : Alliance française, Classes d’immersion, Enseignement du français, Fédération internationale des professeurs de français, Influence, Institut Français, Lycée français de Koweït, Mission laïque française.

AFRAV ou Association francophonie avenir

L’AFRAV est une association loi 1901 dont le siège est  à Manduel, petite ville du Gard et qui, tout comme son président Régis Ravat, mérite d’être citée. 

Car si rien ne permet de la distinguer à première vue des nombreuses associations ayant pour objet la défense de la langue française, elle se démarque cependant, malgré la faiblesse de ses moyens, par un combat particulièrement opiniâtre pour l’application de la loi Toubon devant les tribunaux.
Une loi Toubon mise à mal dans certains domaines, enseignement supérieur, communication et publicité notamment, tant par des enseignants, chercheurs et autres communicants qui la considèrent comme desservant leurs intérêts, que par les services publics et les collectivités, quand il ne s’agit pas de l’État lui-même, souvent prompts à vouloir s’exprimer en anglais.

Dans un contexte défavorable, en l’absence de réel soutien et face à des parties adverses dotées de moyens leur permettant de supporter sans difficulté un procès en première instance, en appel ou devant le Conseil d’État, l’AFRAV compte néanmoins à son actif quelques succès majeurs, Université Paris sciences et lettres («Research University») en septembre 2017 ou Etablissement public Sèvres et Limoges («Sèvres outdoors») en janvier 2019 notamment.

Autant d’affaires remportées à l’issue de procès longs et coûteux, non sans analogie avec les causes portées outre-atlantique devant les juridictions canadiennes sur le fondement d’une Charte des droits et libertés, transposition ou plutôt équivalent, pour partie, de notre loi Toubon.

Voir aussi : Charte des droits et libertés du Canada, DGLFLF, Loi du 4 août 1994 dite loi Toubon

Afrique francophone

Pour sa partie subsaharienne, le poids de l’Afrique dans le monde francophone n’est plus à démontrer :

  • 22 pays ayant le français comme langue officielle.
  • Une croissance globale de 4,4 % par an contre 2,8 en 2019 pour le reste de l’Afrique subsaharienne.
  • Un poids démographique propulsant les capitales africaines, Kinshasa en tête, parmi les plus grandes villes francophones du monde.

En l’état actuel  et selon Yves Montenay,

un espace d’environ 500 millions d’habitants où l’on peut travailler en français, même si une partie rapidement décroissante de la population n’est que peu ou pas francophone (et dans lequel) le français (est implanté) non seulement comme langue officielle mais également, dans nombre de villes africaines, comme langue maternelle, familiale, d’usage professionnel et langue commune dans la rue.

C’est d’ailleurs sur l’Afrique que reposent les prévisions les plus optimistes portant la population francophone à près de 770 millions à l’horizon 2060, évolution conditionnée par le développement concomitant de la maîtrise du français et par les progrès réalisés en matière de scolarisation et d’alphabétisation.

De façon plus indirecte, le poids de l’Afrique est tel que le français langue des affaires y est perçu comme une réalité incontournable par des multinationales pourtant originaires de pays non francophones tels que le Danemark  ou à plus forte raison la Chine, pays formant leurs employés mais également leurs cadres à une communication en français naturellement considérée comme essentielle.

De façon moins palpable  et pouvant échapper à l’analyse, on pourra également souligner la façon dont elle semble, parfois, jouer un rôle de levier ou de contrepoids. 

Citons l’exemple de la Nouvelle-Angleterre et notamment du Maine où l’Afrique, par son poids migratoire, semble accompagner le renouveau du fait francophone ainsi, plus surprenant peut-être, que celui de la Saskatchewan aux confins de l’ouest canadien où elle joue, par les mêmes mécanismes, un rôle de stabilisateur au profit d’ une communauté fransaskoise pourtant ultra-minoritaire.

C’est également le cas du Liban mais dans un tout autre contexte, à travers l’irruption sur l’échiquier linguistique d’une communauté chiite très liée à une Afrique francophone sur laquelle elle est fortement implantée et venant  compenser une récente désaffection de la jeunesse chrétienne pour notre langue.

Voir aussi : Côte d’Ivoire, ELAN, (le) Français professionnel, Haïti, Kinshasa, langues africaines, Liban,  Nouchi, République Démocratique du Congo ou RDC, Saskatchewan, Université Senghor.

Afrique francophone (suite)

L’autre particularité de l’Afrique francophone et qui aujourd’hui la caractérise tient à son dynamisme économique, dynamisme dont l’évolution n’était  pas aussi facilement prévisible il y a encore quelques décennies.

En effet et faut-il le rappeler, le Royaume-Uni s’arrogeait, aux premiers temps de la colonisation,  les territoires les plus riches, tant pour leurs sous-sols regorgeant de matières premières (Ghana, Soudan ou Afrique du Sud) que pour leur fertilité (Nigeria , Tanzanie, Zimbabwe, etc.), l’Afrique francophone, cantonnée aux zones les plus pauvres, accusant dès lors et durant de nombreuses années, un net retard de croissance.

La tendance est aujourd’hui inversée, la croissance annuelle de l’Afrique francophone s’étant établie, sur la période 2012-2019, tel que nous le rapporte Ilyès Zouari, président du CERMF, à 4,4%  contre 2,8% pour le reste de l’Afrique subsaharienne, l’UEMOA (Union économique et monétaire ouest africaine) enregistrant quant à elle la plus forte croissance du continent avec une hausse annuelle de 6,4 %.

D’autres indicateurs confirment cette évolution, l’Indice de la facilité de faire des affaires de la Banque mondiale ne comptant plus aucun pays francophone dans les six dernières places de son classement, désormais majoritairement occupées par des pays anglophones.

Voir aussi :  Amirshahi Pouria (rapport), Attali (rapport), Carrère Céline (rapport), CERMF ou Centre d’étude et de réflexion sur le monde francophone, Colonisation, Francophonie économique, Francophilie, Graddol (rapports).

AIMF ou Association internationale des maires francophones

En intégrant la notion de coopération intercommunale, la création,  le 1er mai 1979, de l’Association internationale des maires francophones à l’initiative de Jacques Chirac, alors maire de Paris et Jean Pelletier, maire de Québec,  s’inscrit à contre-courant dans l’histoire d’une francophonie institutionnelle pourtant récente, jusqu’alors restreinte aux politiques intergouvernementales.

L’Association n’en devient pas moins, très rapidement, l’un des quatre opérateurs de la Francophonie aux côtés de l’Agence universitaire de la francophonie, l’Université Senghor d’Alexandrie et TV5 Monde.
Regroupant plus de 265 villes dans 49 pays où le français est langue officielle ou langue de communication, elle a pour objectifs, à travers la mise en place d’une coopération décentralisée, de concourir à une meilleure gestion des collectivités et à la planification du développement local.
Elle a, depuis sa création, soutenu un grand nombre de projets dans les domaines du développement économique, de la préservation du patrimoine ou encore de la modernisation des services municipaux.

L’association, dirigée depuis sa création par le maire de Paris, est ainsi présidée depuis 2014 par Anne Hidalgo, ce qui rend d’autant plus consternant le slogan « Made for Sharing » choisi par l’actuelle municipalité pour soutenir la candidature de Paris aux Jeux Olympiques 2024.

Voir aussi : Agence universitaire de la francophonie, Francophonie, OIF, Université Senghor d’Alexandrie, TV5 Monde.

Algérie

Une seule langue officielle pour ce pays de 44 millions d’habitants, l’arabe littéraire ou classique. 

A ses côtés, d’autres langues, l’arabe dialectal, le berbère et le français, dans un contexte que d’aucuns qualifient de « guerre des langues ». Le français est néanmoins ici la véritable langue seconde, langue de fait de l’administration, de l’enseignement supérieur, des médias et surtout de l’entreprise.

Nœud de crispation sur fond de décolonisation et d’identité religieuse, il est tout en même temps considéré comme nécessaire par l’essentiel de la population.

Voir aussi : Colonisation,  Diglossie, Guerre des langues, Maghreb.

Alliance française

L’Alliance française est une fondation de droit privé reconnue d’utilité publique, ayant pour mission la promotion de la langue et de la culture françaises. 

Présente dans 135 pays à travers 850 agences, elle accueille chaque année près de 490 000 inscrits.
Avant d’être l’un des ressorts majeurs de l’enseignement du français à l’étranger, elle trouve son origine en 1883 dans une initiative privée cherchant à créer, à l’époque, des réseaux de sympathies culturelles.
Effort de paradiplomatie inaugurant la diplomatie culturelle française et ayant suscité les Instituts Cervantès, Goethe, centres Confucius et autres British councils  tels qu’on les connaît aujourd’hui. 

Depuis les années 2000, le réseau poursuit sa croissance, notamment en Chine où l’on compte 17 Alliances à ce jour.

Voir aussi : AEFE,  CIEP, Chine, Enseignement du français, Fédération internationale des professeurs de français, Institut Français, Mission Laïque Française.

Anthropologie linguistique

Étude qui analyse l’influence de la langue sur la vie sociale.

Plus précisément appliquée à l’anglicisation, théorie développée  par le linguiste Pierre Frath  à travers laquelle sont mis  en avant les ressorts collectifs  inconscients par lesquels un groupe tend à s’approprier la langue de domination :

Auto-dénigrement de sa propre langue, croyance en la nécessité de l’apprentissage de cette autre langue pour faire carrière, inconscience collective des conséquences, suivisme et conformisme …  Mécanismes par lesquels ces croyances finissent par s’auto-justifier, augmentant ainsi le mouvement vers le changement.

Voir aussi : Frath (Pierre), Hagège (Claude)

Amirshahi Pouria (rapport)

Né en Iran en 1972, journaliste, militant syndical et associatif, Pouria Amirshahi est  député de la neuvième circonscription des Français établis hors de France (Afrique du Nord et de l’Ouest) de 2012 à 2017.

C’est à ce titre qu’en janvier 2014, il remet à la commission des affaires étrangères de l’Assemblée nationale un rapport d’information sur la «Francophonie éducative, culturelle et économique».

Ce document qui précède de quelques mois le rapport remis par Jacques Attali au président Hollande a le grand mérite, à travers la notion d’espaces linguistiques qu’il définit comme «structurants» d’aborder, avec une particulière acuité, les nouveaux enjeux de la francophonie tels que le numérique, l’Afrique ou encore l’économie.

Il se démarque cependant du rapport Attali par un ton engagé et particulièrement critique à l’égard de la «désinvolture» de nos  classes dirigeantes qu’il qualifie d’ «aussi ridicule que dangereuse».

Voir aussi : Attali Jacques (rapport), Carrère Céline (rapport), CERMF, Chambre de commerce et d’industrie de Paris Île-de-France, Francophilie,  Francophonie économique, Visa francophone

Attali Jacques (rapport)

Le français est un formidable atout pour la France, trop souvent politiquement, culturellement et économiquement négligé.

Ainsi s’ouvre le rapport dit « Attali », corédigé avec Adrienne Brotons, inspectrice des finances et Angélique Delorme, auditrice au Conseil d’État et remis au président Hollande en août 2014 sous le titre « La francophonie et la francophilie, moteurs de croissance durable ».

Si le ton se veut différent, plus mesuré ou plus déférent, le parallèle n’en est pas moins évident avec un rapport « Amirshahi » qui le précède de quelques mois, dont il épouse les mêmes contours et avec lequel il aboutit aux mêmes conclusions.

Construit, autour de ses 53 propositions, sur la notion de francophonie économique à laquelle il accorde une place prépondérante, ce rapport vaut cependant également pour sa présentation, totalement novatrice cette fois-ci, de la notion de francophilie définie comme un espace d’échanges à part entière.

En évoquant le souhait d’une « Union économique francophone », Jacques  Attali va au-delà des conclusions de Céline Carrère et Maria Massod dans leur rapport sur le «Poids économique de la langue française dans le monde» dont il s’inspire.

De toute évidence, l’un des rapports majeurs sur la francophonie, tant en raison de la personnalité de son auteur que par la façon dont il introduit  la notion d’économie dans la réflexion francophone.

Voir aussi : Amirshahi Pouria, Carrère Céline, CERMF, Chambre de commerce et d’industrie de Paris Île-de-France, Francophilie, Francophonie économique, Visa francophone

AUF ou Agence universitaire de la Francophonie

Association  d’établissements d’enseignement supérieur et de recherche francophones, l’AUF regroupe, sur tous les continents et dans 119 pays, plus de 1000 établissements, universités, grandes écoles et centres de recherche scientifique utilisant la langue française.  

Créée en 1961 à l’initiative du québécois Jean-Marc Léger sous le nom d’«Association des universités partiellement ou entièrement de langue française» (AUPELF), elle change d’appellation lors du Sommet de Dakar  pour devenir l’Agence universitaire de la francophonie.

Présente dans 40 pays à travers ses services centraux répartis entre Montréal et Paris et ses directions régionales  en Afrique, Amérique, Asie, Europe et Océan Indien, elle met en œuvre dans son champ de compétences les résolutions adoptées par la Conférence des chefs d’État et de gouvernement de l’OIF dont elle est, depuis 1989, l’un des quatre opérateurs.

Elle est à ce jour l’un des réseaux universitaires les plus importants au monde.

Voir aussi :  Association internationale des maires francophones, BDLP, Enseignement du français, Fédération internationale des professeurs de français, OIF.

Académie française 

A l’heure des procès d’intention, de la dispersion des légitimités et de la tentation du quant à soi, évoquer l’Académie française dans un lexique consacré à la francophonie n’est rien d’autre, en dépit des apparences, qu’une somme de difficultés.

Voici donc une Académie, voulue par Richelieu, confirmée par Louis XIII en ses Lettres patentes, enregistrée au Parlement et admise, par ses statuts «à l’honneur de haranguer le roi».
Compagnie de grand apparat, souveraine en son héritage royal, à laquelle revient seule «le soin d’enregistrer, établir et régler l’usage» en vertu d’un «magistère intellectuel» et d’une «magistrature morale» que nul, puisque de source royale, n’est en droit de lui contester.

Le discours peut sembler anachronique.
Et le ton condescendant.

Non exempts de critiques envers une institution dépositaire d’un usage qui se doit d’être «bon», à l’abri des «causes de corruption» et «de ces locutions barbares», apanage «des personnes instruites et des écrivains», de «l’honnête homme», en un mot de «l’homme de goût».

Une Académie qui prescrit, admet peu et sembler peiner à faire taire, à l’image de Diderot, des ressentiments jamais véritablement étouffés :

Je me renferme, je travaille et j’exécute à moi seul tout ce que notre académie française n’a pu faire au nombre de quarante, dans un intervalle de plus de cent quarante ans.

Une Académie, «lieu de tradition» et «gardienne des valeurs» qui endigue, contient, modère, s’oppose et se méfie, s’inquiète aussi et n’admet «les mots étrangers qu’autant qu’ils sont installés dans l’usage et qu’il n’existe pas déjà un mot français pour désigner la même chose ou exprimer la même idée».

Qui, forte d’une indépendance qu’elle cultive mais qui l’éloigne des ministères, se voit dénuée de tout pouvoir de sanction pour qui ne suivrait pas ses recommandations et dont la seule prérogative consiste à autoriser, «délivrer son imprimatur» nous dit-elle,  (à) la publication au Journal officiel des termes issus des commissions terminologiques auxquelles elle participe.

Mais une Académie qui œuvre et s’ouvre au monde à travers un Dictionnaire, construction lente et sélective mais éminemment brillante, irremplaçable peut-être, dont la 9e et dernière édition est en cours d’achèvement.

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Au mépris des règles les plus élémentaires, j’ai pris le parti de ne pas ouvrir ce lexique par le mot Académie considérant, peut-être à tort, que cela en aurait dénaturé le sens et préférant, de quelques lettres, il s’en fallait de peu, l’ouvrir par le mot Acadie, d’une valeur symbolique que ne possédait pas celui-là.

B comme Base de données lexicographiques panfrancophone

Base de données lexicographiques panfrancophone (BDLP)

La BDLP, initiée dans les années 1980 et mise en ligne en 2004 exprime, bien avant l’heure, le besoin de repositionner la francophonie au cœur du débat terminologique.

Elle vise « à constituer et regrouper des bases représentatives du français de chacun des pays et  chacune des régions de la francophonie » (site de la BDLP).

Dans sa dimension internationale, le projet est soutenu à ses débuts par l’Agence universitaire de la Francophonie et l’Université Laval.

Ses ramifications, comme celles de toute entreprise de cet ordre, sont nombreuses, parmi lesquelles le centre d’Analyse et traitement informatique du lexique français (ATILF) de Nancy ou l’Académie française qui établit, dans la 9e édition de son Dictionnaire, une passerelle de consultation avec la BDLP.

Son fonctionnement est collégial à travers des équipes réparties dans vingt régions parmi lesquelles Acadie, Québec et Louisiane et, beaucoup plus surprenant mais tout aussi révélateur, l’Algérie et le Rwanda pour le continent africain.

Les entrées sont de deux ordres :
Les mots qui ne figurent dans aucun dictionnaire de référence mais sont utilisés, parfois quotidiennement, dans certaines régions ; ceux qui sont bel et bien référencés mais dont l’emploi a évolué ou varié.

La BDLP contient présentement plus de 20 000 entrées et pourrait en contenir bien davantage. On pourrait facilement aller jusqu’à 100 000, soit plus que ce que contient Le Petit Robert. Il y a plus de mots français qui existent et sont utilisés que ceux qui figurent dans les dictionnaires de référence. 

(Claude Poirier, cité par Le devoir. 16 Juin 2012)

Les Robert, Larousse, Dictionnaire de l’Académie française et autre Dictionnaire des francophones se sont, entre temps, ouverts à une réalité qui ne peut plus être délaissée.
Pour autant, l’écart malgré tout demeure entre un fonds lexical sans cesse renouvelé et pour tout dire, inépuisable, et les capacités d’absorption et de mise à jour d’un dictionnaire.

Voir aussi : AUF, Des mots, Université Laval, Rwanda.

Bibliothèque des Amériques

Créée en 2014 sous le parrainage de Dany Laferrière à l’occasion du salon du livre de Québec, la Bibliothèque des Amériques vise à donner à la littérature francophone des Amériques la place qui lui revient et la visibilité qu’elle mérite.

Elle propose des auteurs du  Québec, d’ Acadie et de l’ouest canadien, mais également d’Haïti, de Louisiane et Nouvelle-Angleterre, ainsi que, de Maryse Condé à Patrick Chamoiseau et Edouard Glissant, des Antilles françaises.

S’appuyant sur un fonds de plus de 13 000 titres, la Bibliothèque des Amériques met également à disposition des essais, livres d’histoire, littérature pour la jeunesse ainsi, depuis peu, qu’une zone pédagogique appuyant l’enseignement du et en français.

Au final, un fonds considérable ayant généré, depuis sa création, plus de 69 000 prêts numériques à destination de lecteurs du Canada et des États-Unis mais également d’Haïti et d’Amérique du Sud. 

Biennale de la langue française

La Biennale de la langue française est une association fondée en 1963 par Alain Guillermou et regroupant essentiellement des enseignants et chercheurs issus du milieu universitaire.

Elle organise tous les deux ans des colloques internationaux, Namur en 1965, Québec en 1967, Moncton en 1977, Bucarest en 1995 ou encore Ottawa en 2001 et, plus récemment,  Chicago en 2019.

Une accréditation officielle lui permet de bénéficier d’un statut consultatif auprès de l’OIF. C’est à ce titre que Cheryl Toman, présidente de la Biennale, a participé à la XIe conférence des organisations non gouvernementales à Erevan (Arménie) en septembre 2018.

L’autre ou l’une des autres particularités de la Biennale tient peut-être à la personnalité de sa présidente, l’américaine Cheryl Toman, professeure de littérature francophone à l’université d’Atlanta, preuve, si besoin était, du caractère universel d’un combat dirigé non contre des hommes, une culture ou une langue et aux côtés duquel se rangent nombre de citoyens américains ou britanniques, mais contre une tentation d’uniformisation et les tenants d’un tout-anglais dont beaucoup sont en réalité francophones.

Voir aussi : Fédération internationale des professeurs de français (FIPF), OIF.

Brouage

« Mélange de vase et de marais salants », à quelques kilomètres d’Oléron mais comme au bout du monde, entre marais, chenaux et étangs.

Bien petite ville en vérité, tout au plus un lieu-dit, commune rattachée ou plutôt « déléguée ».

Mais fortifiée est la place avec ses bastions, ses canons, son double pont-levis.
Ville neuve de près de 500 ans, pavée, carrée, à angles droits, coupée au cordeau, segmentée en lots et parcelles, tous identiques, sept mètres sur trente invariablement et qu’on paie fort cher car la ville est riche et attire.
On y vient de loin et y parle, dit-on, vingt langues.
Place forte, plaque tournante, port toujours en chantier, armé des plus grands vaisseaux, tête de pont vers l’Amérique.

Aujourd’hui, la mer s’est retirée.
Hors de portée.
C’est à peine si on la devine.

La ville a été rénovée ou plutôt reconstituée, telle quelle, jusqu’aux joncs et roseaux l’ayant jadis entourée.

C’est là qu’est né Champlain, de Margueritte Le Roy et Anthoyne Chapelin, dit Complain, dit de Champlain, homme respecté, «pilotte», maître puis capitaine en la marine d’Henri IV et «seigneur de navires».

***

La route, à peine sinueuse, tout en silence, est bordée d’eau et de près.
Puis ce sont les remparts,
La porte,
Et la ville,
Comme un îlot suspendu dans le temps.

Voir aussi : Champlain (Samuel de).

 C comme Cadiens

Cadiens 

Après le Traité d’Utrecht de 1713, la prise de Louisbourg en 1754 et en marge de la Déportation de 1755, de nombreux Acadiens retournèrent en France, s’installant  sur l’île d’Oléron et l’île de Ré où le roi de France leur avait accordé des terres.

Jalousés par la population locale qui ne les considérait pas comme de « vrais Français », ils ne s’y sentaient pas à leur place.

La cession de la Louisiane à l’Espagne par la France en 1762 fut perçue comme l’occasion, de part et d’autre, de la peupler avec ces Acadiens désireux de rentrer en Amérique.
De nombreux navires furent affrétés pour les transporter, par centaines voire par milliers, vers la Louisiane. 

Dans le même temps, parmi les Acadiens déportés par les Anglais en Nouvelle-Angleterre, un certain nombre réussit, par ses propres moyens, à gagner la Louisiane.  

Ils sont, les uns et les autres, les ancêtres des Cadiens actuels.  

Deux siècles et demi plus tard, malgré une politique d’assimilation et un système éducatif très longtemps répressifs, l’identité cadienne est désormais reconnue et engagée dans un véritable renouveau.

Le terme « cadien » (préféré au « cajun »  employé par les anglophones et jugé péjoratif) désigne aujourd’hui non plus simplement les personnes d’ascendance acadienne, mais l’ensemble des Louisianais de culture ou d’héritage francophone.

Voir aussi : Acadie, Acadiane, CODOFIL, Domengeaux (James), Grand Dérangement, Louisiane

Calvet (Louis-Jean)

Sociolinguiste français d’audience internationale né en 1942 à Bizerte.

A travers une théorie générale visant à «construire une linguistique qui prenne pleinement en compte l’aspect social de la langue», il propose, tout au long de ses recherches et de ses productions, une approche géo linguistique dynamique  associée à une vision véritablement planétaire, peut-être sans équivalent.

Ainsi définit-il en 1999 ce qu’il qualifie de «versant linguistique de la mondialisation» à travers la notion de «modèle gravitationnel», organisation quadridimensionnelle et pyramidale conçue autour d’une langue «hypercentrale», l’anglais, autour de laquelle gravitent des langues dites   «supercentrales», arabe, chinois, espagnol, français notamment, puis «centrales» et enfin  «périphériques».

Il conçoit également en 2012 et dans une démarche similaire, un «baromètre des langues» proposant comme indicateur non plus simplement le nombre de locuteurs, mais un ensemble de 11 facteurs parmi lesquels le nombre de pays admettant une langue comme officielle, le taux de traduction ou encore de pénétration par Internet.
Ce baromètre, qui fait désormais référence, positionnait la France au 3ème rang derrière l’anglais et l’espagnol en 2012 et au 2ème, derrière l’anglais mais devant l’espagnol, en 2017.

On doit également à Louis-Jean Calvet le terme de «glottophagie», néologisme appliqué à un comportement qu’il qualifie à l’époque (1974) d’impérialiste mais que l’on peut étendre aujourd’hui, dans un contexte plus large de «guerre des langues» dont il s’est fait l’un des théoriciens, à l’ensemble des cas d’interférence entre langue dominante et langue dominée.

Voir aussi : Colonisation, Diglossie, Frath Pierre, Hagège (Claude), Institut européen d’administration des affaires, Langue internationale, Modèle gravitationnel, Traduction.

Campus

Avec 330 000 étudiants étrangers, la France se situe au troisième rang des pays d’accueil, loin derrière les Etats-Unis (740 000) et le Royaume-Uni (430 000) mais devant l’Australie (250 000) et l’Allemagne (200 000).

Établissement public créé en 2011 et placé sous la tutelle du ministère des Affaires étrangères et du ministère chargé de l’Enseignement supérieur, Campus, véritable pivot ou plateforme d’entrée, intervient  en amont de l’arrivée de ces étudiants en proposant un service d’accueil et d’information et, le cas échéant, d’évaluation de leur niveau en français.

Il gère également la mobilité des experts français en mission pour le compte du ministère des Affaires étrangères ainsi, qu’à travers des plateformes telles qu’«Immersion France» visant à la promotion des séjours linguistiques en France ou «France alumni», réseau social censé fédérer les étudiants ayant fait leurs études supérieures en France, la promotion du système d’enseignement supérieur et professionnel français.

Voir aussi : Enseignement supérieur

Canada

Le Canada est un pays plurilingue qui comptait, au 1er octobre 2020 et selon Statistique Canada, 38 008 005 habitants parmi lesquels 56, 7 % d’anglophones, 22,8 % de francophones et 20, 05 % d’allophones parlant essentiellement, si l’on s’en réfère au nombre de locuteurs, le mandarin, le cantonnais, le pendjabi ou encore l’espagnol.

Avec  8 millions de locuteurs, les francophones représentent donc la minorité linguistique la plus importante du pays.
Ils se concentrent essentiellement dans le Nouveau-Brunswick (33% de la population soit 240 000 personnes), le Québec bien sûr (88 % de la population soit 7 millions) ainsi que l’Ontario (4,7 % de la population soit 622 415 personnes).

Trois provinces respectivement bilingue, unilingue francophone et unilingue anglophone mais membre-observateur de l’OIF et dans laquelle le fait francophone ne peut être remis en cause.

Il n’en est pas tout à fait de même pour les 200 000 francophones restants placés, à quelques exceptions près, Nouvelle-Écosse et Manitoba, en position ultra minoritaire et pour lesquels  certains, s’appuyant sur une vision binaire à défaut d’être séduisante annoncent, en contrepartie d’une explosion démographique de l’hémisphère sud, la disparition pure et simple.

Analystes qu’il faudrait rappeler à davantage de modestie dans leur volonté prédictive, les héritages linguistiques se transmettant parfois quand tout semblait indiquer qu’ils devaient disparaître.
La permanence du berbère en Algérie ou de l’allemand en Belgique en offre sans doute les meilleurs exemples.

Un français il est vrai globalement minoritaire, tant sur le plan quantitatif que sur celui, non quantifiable mais cependant essentiel des représentations, représentations  dont on connaît le caractère déterminant sur la fonction des langues, des pratiques dominantes ou encore sur l’imaginaire linguistique et source en l’occurrence de discriminations et d’insécurité.

Le caractère officiellement bilingue du Canada est néanmoins consacré par les Lois sur les langues officielles de 1969 et 1988 ainsi que par la Loi constitutionnelle de 1982 dite Charte des droits et libertés qui affirme notamment dans son article 16 le principe d’égalité, en droit sinon toujours dans les faits, entre les deux langues :

«Le français et l’anglais sont les langues officielles du Canada; ils ont un statut, des droits et des privilèges égaux quant à leur usage dans les institutions du Parlement et du gouvernement du Canada».

Voir aussi : Acadie, Charte des droits et libertés du Canada, Lois du 30 juillet 1974 et du 23 août 1977, Minorités francophones du Canada,  Moncton, Montréal, Nouveau-Brunswick, Ontario, Politique linguistique, Québec, Saskatchewan, Université Sainte-Anne.

Carrère Céline (rapport)

Céline Carrère est directrice de recherche à la FERDI et professeure d’économie à l’université de Genève.

Elle est l’auteur avec Maria Masood, docteur en économie dans cette même université, d’un rapport paru en décembre 2012 sur le «Poids économique de la langue française dans le monde».
L’étude s’appuie sur le postulat selon lequel ce qu’elles définissent comme la «proximité linguistique» stimule les flux commerciaux, notamment par l’abaissement des coûts de transaction et de communication.
Elle démontre ensuite, à travers une analyse du poids de l’espace francophone dans la richesse mondiale, en quoi l’appartenance à cet espace influe sur la hausse du revenu moyen par habitant ainsi, mais à un degré moindre, que sur la réduction du taux de chômage.

Le rapport Carrère, paru il y a maintenant quinze ans, reste plus que jamais d’actualité.
Ses conclusions, bien que peu médiatisées, auront notamment alimenté le rapport Attali et joué un rôle précurseur dans la notion désormais acquise de francophonie économique.

Voir aussi : Attali (rapport), Amirshahi Pouria (Rapport), CERMF, Chambre de commerce et d’industrie de Paris Île-de-France, Francophilie, Francophonie économique.

Cartier (Jacques)

S’il compte parmi ces navigateurs ou explorateurs connus de tous, chanté à l’occasion et associé à un certain imaginaire collectif, Jacques Cartier est loin cependant d’avoir eu l’impact de Samuel de Champlain sur le peuplement et le devenir francophones en Amérique du Nord.

L’ironie de l’histoire a néanmoins voulu que son nom soit davantage retenu, sans doute parce qu’il fut le premier découvreur du Canada.

Il pose le pied, en 1535, sous le règne de François 1er, sur un site Iroquois nommé Hochelaga qu’il baptise Mons Realis.

Mais la future Montréal ne sera fondée, sous le nom de Ville-Marie, qu’un  siècle plus tard, le 17 mai 1642 par Jeanne Mance, la Vénérable et Paul de Chomedey, sieur de Maisonneuve.

Voir aussi : Champlain (Samuel de), Dugua de Mons (Pierre), Jolliet (Louis)

Cavelier de la Salle (René-Robert)

Obsédé par la découverte du «chemin de la mer du Sud et par elle celuy de la Chine», porté par ce qu’il nomme ses «infirmités morales», irritable et hautain, aux antipodes d’un Champlain dont il ne partage pas les idéaux, René-Robert Cavelier de La Salle reste un personnage peu connu, controversé voire interlope.

Commissionné par Louis XIV pour «découvrir la partie ouest de l’Amérique du Nord comprise entre la Nouvelle-France, la Floride et le Mexique», il devient  le premier européen à naviguer sur les Grands Lacs, Hérié, Huron puis Michigan, descend le Mississippi sur les traces de Jolliet et prend possession, le 9 avril 1682, au nom de

Sa Majesté et de ses successeurs de sa couronne, du pays de la Louisiane, mers, havres, ports, baies, détroits adjacents et de toutes les nations, peuples, provinces, villes, bourgs, villages, mines, pèches, fleuves, rivières compris dans l’étendue de ladite Louisiane.

Il offre ainsi au roi des rois, peu reconnaissant en vérité, un territoire jugé «fort inutile» qui couvre, du golfe du Mexique à l’actuel Canada, le tiers central des actuels États-Unis. 

Il meurt assassiné par ses compagnons le 19 mars 1687 dans l’actuel État du Texas non sans avoir suffisamment marqué les esprits pour qu’un arrondissement de Montréal, une petite ville de l’Illinois ainsi que l’un des axes les plus importants de Chicago, La Salle boulevard, portent aujourd’hui son nom.

Voir aussi : Champlain (Samuel de), Dugua de Mons (Pierre), Jolliet (Louis)

CCIP ou Chambre de commerce et d’industrie de Paris Île-de-France

Héritière des anciennes corporations des marchands de Paris, la Chambre de commerce et d’industrie de Paris Île-de-France est un établissement public ayant pour mission  de représenter les intérêts des 840 000 entreprises franciliennes auprès des pouvoirs publics.

Très présente dans l’enseignement du français et la formation, elle est particulièrement active sur le plan international, notamment dans le domaine de la francophonie économique dont elle est l’un des précurseurs et l’un des principaux opérateurs.

Dès 1958, elle crée un Centre de langue française chargé de promouvoir le français comme langue professionnelle afin d’accroître la compétitivité des entreprises au sein de l’espace francophone et à l’international.

En 2008, soit quatre ans avant le rapport « Carrère » et six ans avant les rapports « Amirshahi » et « Attali», elle lance avec ses homologues québécoises les Rencontres internationales de la francophonie économique ouvrant, bien avant l’heure, le débat sur les liens entre francophonie et économie.

Elle propose, en parallèle, des formations pour formateurs en Français sur objectifs spécifiques (FOS) et développe, dans le domaine de l’évaluation et de la certification, deux outils internationalement reconnus, le Diplôme de français professionnel (DFP) et le Test d’évaluation de français (TEF). 

Voir aussi : Amirshahi Pouria (rapport), Attali Jacques (rapport), Carrère Céline (rapport), certification, Espace économique francophone, Forum francophone des affaires (FFA), Français langue étrangère (FLE), Français sur objectifs spécifiques (FOS), Français professionnel, Francophilie, Francophonie économique, Test de connaissance du français (TCF) et test d’évaluation de français (TEF)

Centre de la francophonie des Amériques

La création en 2006, par le gouvernement du Québec, du Centre de la francophonie des Amériques découle de la volonté de mettre en mouvement la francophonie sur l’ensemble du continent américain.

Un Québec qui, près de 40 ans après la doctrine Gérin-Lajoie, se réaffirme comme maître du jeu dans les affaires francophones et relance l’idée d’une responsabilité de principe à l’endroit des communautés francophones et francophiles des Amériques.

A travers des programmes tels que la Bibliothèque des Amériques ou le Réseau des villes francophones et francophiles d’Amérique, entre devoir de mémoire et créativité et compte tenu, des Antilles françaises aux minorités linguistiques de l’Ouest canadien, de l’extrême diversité des communautés francophones, l’enjeu est de stimuler les échanges, solidifier les liens et travailler au rapprochement entre les différentes communautés.

Voir aussi : Gérin-Lajoie (doctrine), Québec, Parlement francophone des jeunes des Amériques, Réseau des villes francophones et francophiles d’Amérique.

CEQFAN ou Centre d’étude du Québec et des francophonies d’Amérique du Nord

On retrouve, au cœur des préoccupations du CEQFAN, ce même parallèle entre la grande diversité des populations francophones d’Amérique du Nord et ce que Bernard Emont, son président, définit, à travers une histoire globalement commune et la lutte pour la défense de leurs intérêts linguistiques, comme «des similitudes de comportement et de vouloir-vivre collectif».

Tout comme le Centre de la francophonie des Amériques, le CEQFAN s’appuie  sur la primauté du Québec sans négliger pour autant les autres communautés (d’Acadie, de l’ouest canadien, de Louisiane et Nouvelle-Angleterre ou des Caraïbes) avec lesquelles la Belle province partage une «une solidarité de destins».

Centre d’étude et de conférences, le CEQFAN vise cependant, non plus à la construction de programmes ou d’outils collaboratifs, mais à une meilleure connaissance des sociétés francophones à travers des rencontres, conférences, travaux  de recherche d’ordre historique, littéraire ou sociologique tant sur le Québec que sur l’ensemble des communautés francophones d’Amérique du Nord.

CERMF ou Centre d’étude et de réflexion sur le monde francophone

Créé par Ilyès Zouari, le CERMF propose des analyses et des données chiffrées particulièrement pertinentes sur l’évolution, notamment économique et démographique, du monde francophone.

En présentant celui-ci comme l’ensemble des pays et territoires, 33 au total, «où l’on peut  vivre, circuler et travailler en français», il se démarque de la communication de l’OIF par une approche plus restrictive mais également plus réaliste, très éloignée de la vision hypertrophiée et peu crédible d’une Francophonie institutionnelle et, de la Lituanie au Qatar en passant par l’Irlande, de ses 88 Etats membres.

Dans une réflexion sous-tendue par la perception erronée qu’ont les francophones de leur propre espace linguistique et rejoignant les analyses de Céline Carrère, Jacques Attali ou Pouria Amirshahi, il fait le constat, à travers son extrême diversité, son étendue (16,3 millions de km²) et son peuplement (qu’il estime non à 300 millions mais à 524 millions d’habitants), de l’énorme potentiel, tant stratégique qu’économique, de la sphère francophone.

Potentiel qu’il reproche à nos politiques, par absence de volonté ou manque de vision à long terme, de largement sous-estimer.

Voir aussi : Amirshahi Pouria (rapport), Attali Jacques (rapport), Carrère Céline (rapport), Enjeux,  Espace linguistique, francophonie, OIF

Certification

On entend par certification l’ensemble des procédés de reconnaissance officielle des acquis linguistiques dans une langue étrangère.

Avec près de 600 000 certifications annuelles et des tests reconnus à l’échelle internationale, la France se situe au deuxième rang d’un marché désormais porteur et en plein développement.
Les tests et diplômes sur lesquels repose ce protocole de certification sont gérés essentiellement par la chambre de commerce et d’industrie de Paris (CCIP) et le centre international d’études pédagogiques (CIEP), qui occupent l’un et l’autre une position dominante.

Voir aussi : CCIP, CIEP, Français langue étrangère

Chaîne chinoise CGTN-Français

La CGTN-Français est une chaîne de télévision chinoise francophone lancée en 2007.

Elle est intégrée, aux côtés de ses équivalents en langues anglaise, arabe et espagnole, dans un programme d’expansion internationale des médias chinois contrôlé, à travers l’agence de presse Xinhua (littéralement « Chine nouvelle ») par l’État communiste.

Elle est à ce jour diffusée dans 87 pays avec une attention récente et tout à fait notable  pour le continent africain.

Voir aussi : Afrique, Chine, chaîne russe RT, France 24, France Médias Monde, TV5 Monde, Wuhan, Yantai

Chaîne russe RT

Déclinaison de la télévision publique russe RT (anciennement Russia Today et Rossia Segodnia) qui émet par ailleurs dans les autres grandes langues internationales, anglais, arabe et espagnol, RT est une chaîne russe d’information francophone lancée en décembre 2017.

Elle émet depuis son siège à Paris et, malgré les réserves du gouvernement français qui lui reproche son manque d’objectivité, envisage de se développer elle aussi en Afrique francophone.

Interdite de diffusion au sein de l’Union européenne après l’invasion de l’Ukraine, la chaîne a pourtant repris sa diffusion depuis la France en août 2022 via la plateforme Odyssée.
Elle est, depuis le le 24 février 2022 et plus que jamais, considérée comme un instrument de désinformation du Kremlin.

Voir aussi : Chaîne chinoise CGTN-Français, France 24, France Médias Monde, TV5 Monde.

Champlain (Samuel de)

Ne nous y trompons pas, il est celui grâce auquel on parle aujourd’hui français en Amérique du Nord.

Marin, cartographe, rêveur infatigable et accessoirement délégataire du bon Roy Henri IV pour « l’avancement de notre puissance et autorité », il pose, aux côtés de Pierre Dugua de Mons, le socle de la Nouvelle France en 1604 sur l’île Sainte-Croix dans l’actuel Etat du Maine, puis un an plus tard à Port-Royal, aujourd’hui en Nouvelle-Écosse.

Il fonde Québec en 1608 où il meurt le 25 décembre 1635, après plus de 30 traversées de l’atlantique en ayant toujours défendu l’idée d’une présence française fondée sur le respect mutuel et le métissage.

Les Français n’étant plus ici, la terre n’était plus la terre, la rivière n’était plus la rivière, le ciel n’était plus le ciel,  mais au retour du sieur Champlain, tout était retourné à son être, la terre était devenue terre, la rivière était devenue rivière et le ciel avait paru ciel.

(Cité par David Hackett Fisher dans «Le rêve de Champlain»)

Voir aussi : Acadie, Cartier (Jacques), Brouage, Cavelier de la Salle (René-Robert), Dugua de Mons (Pierre), Jolliet (Louis).

Charte des droits et libertés du Canada 

Entrée en vigueur le 17 avril 1982 et intégrée à la constitution, la Charte des droits et libertés garantit  les droits considérés comme essentiels et dont peut se prévaloir toute personne vivant au Canada. 

Sur ses 34 articles , 8 sont consacrés à la reconnaissance et à la garantie des droits linguistiques.

Deux d’entre eux, les articles 16 et 23,  semblent se dégager avec un relief particulier, du moins si l’on examine les jugements prononcés depuis quelques décennies par  la Cour suprême  : 

  • L’article 16 tout d’abord, en forme de déclaration de principe et qui affirme le statut égal des deux langues officielles :

«Le français et l’anglais sont les langues officielles du Canada; ils ont un statut, des droits et des privilèges égaux quant à leur usage dans les institutions du Parlement et du gouvernement du Canada».

Citons parmi les plus récents et les plus commentés un jugement rendu par la Cour suprême en août 2019, condamnant Air Canada dans une affaire l’opposant aux époux Thibodeau pour violation de l’égalité linguistique contenue dans l’article 16  au motif de l’absence de traduction en français et de traductions françaises en caractères moins visibles.

  • L’article 23, quant à lui, oblige les gouvernements des provinces et des territoires à assurer l’instruction des Canadiens dans la langue officielle de leur choix.

Un droit à l’instruction dans sa langue particulièrement sensible, crucial en vérité et qui, plus encore que l’article 16, sur fond de sous-financement chronique des écoles de langue française  alimente, de l’arrêt Mahé c. Alberta du 15 mars 1990 à l’arrêt Conseil scolaire francophone de la Colombie-Britannique  du 12 juin 2020, une jurisprudence de la Cour suprême désormais systématiquement favorable aux minorités francophones.

Voir aussi : AFRAV, Canada, Loi du 4 août 1994 dite Toubon, Minorités francophones du Canada, Nouveau-Brunswick, Politique linguistique.

Chine

Intégrer la Chine dans une réflexion consacrée à la francophonie pourra sembler surprenant.

Il est cependant difficile de ne pas considérer l’irruption de l’Empire du milieu sur l’échiquier international comme l’un des enjeux linguistiques de demain, l’une des questions essentielles portant sur le choix, stratégique et de principe, qui sera effectué par la Chine :
soit celui de l’adoption de l’anglais y compris en interne soit, tel que cela se confirme, celui du maintien de sa langue comme vecteur privilégié de travail et de communication.

Il semble en effet que la Chine, forte de ses 1,4 milliard habitants et de son redoutable potentiel, ait choisi de conserver sa souveraineté linguistique, attitude par ailleurs commune à l’ensemble de l’Asie où ni la Corée ni le Japon ne paraissent céder à la pression du mimétisme et chez lesquels la volonté d’expansion et de domination économique ne se traduit en aucun cas par le passage à l’anglais.

Une Chine qui semble avoir parfaitement intégré le rôle de la langue dans sa stratégie d’influence à travers la multiplication des Instituts Confucius (dont l’apparent succès d’ordre comptable ne doit cependant pas occulter le caractère peu attractif d’une langue considérée comme extrêmement difficile à apprendre à l’âge adulte) ou encore le lancement de la chaîne  CGTN-Français, diffusée  dans 87 pays à ce jour parmi lesquels notamment les pays d’Afrique francophone.

Afrique où elle se heurte cependant à un barrage, notamment linguistique, la conduisant dorénavant à former ses employés et ses cadres à une communication en français naturellement considérée comme essentielle.

Au final, une volonté d’interpénétration linguistique diversement interprétée, les baromètres de classement des langues faisant apparaître pour les uns (Power Language Index) le mandarin en haut de tableau entre l’anglais et le français et le plaçant, pour les autres (Baromètre Calvet), en seulement dixième position, aux côtés du turc et du suédois.

Voir aussi : Alliance Française, Chaîne chinoise CGTN-Français, Wuhan, Yantai.

CIEP ou Centre international d’études pédagogiques

Le CIEP est un établissement public créé en 1945.

Placé sous la tutelle du ministère de l’Éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, il est le premier opérateur public de l’État dans le domaine de l’enseignement et de la diffusion du Français langue étrangère (FLE).

Il assure à ce titre la gestion des diplômes nationaux, DELF (Diplôme d’études en langue française) et DALF (Diplôme approfondi de langue française) ainsi que du TCF (Test de connaissance du français), implantés dans plus de 170 pays et que passent chaque année près de 500 000 candidats.

Son appui à l’enseignement du français s’effectue également à travers la gestion du programme d’échange d’assistants de langues qui lui permet, contribution essentielle à la diffusion et à l’enseignement du français, d’envoyer chaque année plus de 1 800 assistants de langue française dans une vingtaine de pays.

Voir aussi : AEFE, Certification, Enseignement du français, Français langue étrangère (FLE), Test de connaissance du français (TCF) et test d’évaluation de français (TEF).

CIR ou Contrats d’intégration républicaine

Le contrat d’intégration républicaine est un parcours d’intégration personnalisé proposé à tout étranger admis pour la première fois en France et souhaitant s’y maintenir.

Défini par la Loi du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France et mis en œuvre par le ministère de l’Intérieur, le CIR, précédemment contrat d’accueil et d’intégration (CAI), prévoit une formation civique et linguistique.

Depuis mars 2018, la délivrance d’une carte de résident est désormais conditionnée à l’obtention du niveau A2 du CECRL contre un niveau A1 précédemment.

La langue, objectivement perçue comme vecteur d’intégration.

Circulaires

Les circulaires sont des notes d’organisation interne adressées par un chef de service aux directions dont il a la charge.

Appliquée plus strictement à la francophonie, la notion renvoie à quelques textes majeurs rappelant, dans un contexte international, les administrations à leur devoir d’exemplarité en matière d’usage de la langue française.

Citons, parmi les principales, les circulaires Balladur du 20 avril 1994, Raffarin du 14 février 2003, Ayrault du 25 avril 2013 ou encore Annick Girardin, ministre de la fonction publique, du 1er octobre 2016.

La circulaire Ayrault précitée est à ce titre particulièrement probante.

Elle demande aux agents de l’État appelés à s’exprimer dans un cadre international de le faire « de façon systématique en français dès qu’une interprétation dans notre langue est disponible ».
A défaut, ils peuvent s’exprimer dans la langue de leur interlocuteur, s’ils la pratiquent, l’usage d’une langue tierce n’étant toléré « qu’en ultime recours» (dans la mesure où), si cette solution peut satisfaire des besoins usuels de communication, elle s’avère souvent insuffisante pour des échanges approfondis qui nécessitent que nos points de vue soient parfaitement exprimés et compris ».

Elle souligne, si besoin était, à quel point le choix de la langue peut affecter la capacité à exprimer et défendre efficacement son point de vue et ses intérêts.

Voir aussi : Collectivités, Constitution du 4 octobre  1958, FranceTerme, Langue constitutive.

Classes d’immersion

Les classes d’immersion proposent une forme d’éducation bilingue dans laquelle l’enfant reçoit une scolarité dans une langue qui n’est pas sa langue maternelle.
Ses mérites, acquisition de compétences linguistiques, meilleure agilité cognitive, encouragement à l’interculturalité, ne sont plus à démontrer.

Les sections bilingues francophones regroupent aujourd’hui 1,5 million d’inscrits dans 48 pays avec une demande en hausse constante et une augmentation du nombre d’élèves d’environ 3 % chaque année.

Le concept, apparu en 1965 au Québec, s’est progressivement étendu à l’ensemble du Canada.
On y compte aujourd’hui plus de 370 000 élèves soit 8 % de la population scolarisée.

Si l’ensemble des provinces connaît la même courbe de progression, c’est dans l’Ontario qu’elle se manifeste avec le plus d’impact avec plus de 10 000 inscrits chaque année, « la quantité d’inscriptions en immersion dépassant (dans certains quartiers de Toronto) celle des élèves inscrits dans les programmes d’anglais courant». (Association canadienne des professionnels d’immersion)

Le phénomène est plus tardif aux Etats-Unis où l’on enregistrait, en 2016, 28 000 inscriptions dans 27 Etats, les sections bilingues francophones se classant en troisième position derrière l’espagnol et le mandarin.
L’Espagne, l’Egypte ou le Vietnam avec respectivement  38 000,         37 000 et 13 000 élèves, connaissent, pour ne citer qu’eux, des évolutions similaires.

Face à une demande grandissante, les classes d’immersion francophones, victimes de leur succès, doivent désormais faire face à trois enjeux majeurs, ceux de la pénurie d’enseignants qualifiés, de la pérennisation des acquis, mais également  du toujours difficile équilibre entre politiques budgétaires et politiques éducatives.

Voir aussi : AEFE, Canada, Enseignement du français, Fédération internationale des professeurs de français, influence, Ontario.

CODOFIL ou Conseil pour le développement du français en Louisiane

L’émergence du CODOFIL est indissociable de l’histoire du français en Louisiane.
Histoire chaotique sur fond de dévalorisation, stigmatisations, vexations et brimades soutenues par une politique d’assimilation  visant à exclure le français de l’espace public.

A compter de 1921, l’enseignement ne se conçoit plus qu’en anglais. Parler français à l’école est puni.
Le français devient symbole de pauvreté et d’ignorance.
Le processus de transmission s’interrompt. 

Viennent  ensuite les années 1960 qui accompagnent le renouveau francophone à travers  la création, en 1968,  du CODOFIL  sous l’impulsion de l’avocat et représentant démocrate James Domengeaux. 

L’institution, sans doute l’une des plus originales de la Francophonie, reste à ce jour  sans équivalent et vise  à coordonner l’enseignement du français ainsi, qu’à travers une formule dénuée de toute ambiguïté, 

faire tout ce qui est nécessaire pour encourager le développement, l’utilisation, et la préservation du français tel qu’il existe en Louisiane pour le plus grand bien culturel, économique et touristique de l’Etat.

Domengeaux va jusqu’à rencontrer le président Pompidou.
Des instituteurs français partent en Louisiane pour enseigner le français, bientôt rejoints par des Belges et des Québécois, puis des Canadiens, des Africains, des Libanais.

Le CODOFIL rend aujourd’hui possible l’enseignement du français au sein des 32 écoles d’immersion que compte la Louisiane ainsi que dans les 102 écoles publiques dans lesquelles  il est  enseigné  comme langue seconde.

Voir aussi :  Acadiane, Cadiens, Domengeaux (James),  Francophonie, Louisiane.

Collectivités

Entre indifférence et désinvolture, on ne peut pas dire que l’État français manifeste un intérêt majeur pour sa langue.

Attitude d’autant plus troublante  qu’elle émane d’un pays doté d’une politique linguistique que l’on peut qualifier de volontariste.
Attitude tout aussi  ambivalente, faite d’instructions (Circulaires Ayrault ou Girardin) et de « dérapages » ou exemples de non-respect, par l’État, de règles qu’il a lui-même fixées.

Car sur ce point les cas abondent d’interventions en anglais de la part de membres du gouvernement alors même qu’un système d’interprétation est prévu ou, mieux encore, qu’ils se trouvent en pays francophone.

Tout se passe comme si le français n’était pas affaire de l’État, ou si peu.

Et comme par un phénomène de compensation, on assiste, à l’image d’un Québec propre moteur de sa politique extérieure, à l’émergence sur l’échiquier  international de collectivités et en premier lieu de nos régions, bien décidées à occuper une place considérée comme vacante.
Le renforcement de leurs pouvoirs d’intervention économique tel qu’il découle des lois de décentralisation (de la loi du 2 mars 1982 à celle du 7 août 2015) n’y est pas étranger, tout comme  une prise de conscience associée à une vision plus pragmatique des intérêts locaux.

Et l’on voit nos régions, groupées autour d’une Association internationale des régions francophones (AIRF) désormais incontournable, développer des partenariats en Europe, Amérique du Nord,  Afrique et  Asie et mettre en œuvre les orientations stratégiques d’une francophonie économique dont chacun s’accorde  aujourd’hui  à considérer qu’elle est devenue essentielle.

Voir aussi : CirculairesConstitution du 4 octobre 1958, DGLFLF, Francophonie économique, Gérin Lajoie, Québec, Yantai.

Colonisation

Entre apologie et dénonciations, réécriture de l’histoire, passions, rancœurs et idéologie,  la colonisation est sans doute le point de crispation majeur autour du fait francophone.

Le fait qu’aujourd’hui encore certaines langues africaines, lingala et swahili notamment, ne soient pas considérées comme des langues internationales mais comme des langues dites simplement    «véhiculaires» ou plus communément «africaines» ne doit-il pas  être considéré comme la survivance d’une hiérarchisation des langues caractéristique de cette époque ?                   

Epoque, encore récente, où les langues africaines, tout comme les langues régionales il est vrai, étaient systématiquement exclues du champ linguistique.

Il conviendrait cependant  de ne pas oublier que l’actuelle Francophonie n’a été créée, en dépit des réticences voire de l’hostilité de l’État français, qu’en 1970, c’est à dire après l’indépendance, par des chefs d’État nigérien, sénégalais, tunisien et cambodgien et que le français langue officielle et langue d’enseignement a été adopté ( à une exception toutefois) par les ex-colonies  de leur propre initiative.

Il est par ailleurs difficile d’occulter le fait qu’il existe peu de langues, de l’anglais au français en passant par  celle des Hans, le nahuatl (langue des Toltèques) ou le sarakolé (langue de l’empire du Ghana) qui ne se soient imposées autrement que par l’expansion militaire. 

On peut enfin se demander, si l’on veut bien considérer la France comme le pays dans lequel l’entreprise francophone est la moins bien perçue et la plus ignorée, dans quelle mesure ce passé colonial, source de remords ou de repentir, ne pourrait être responsable, ne serait-ce que partiellement, du regard posé par les Français eux-mêmes sur leur propre langue.

Voir aussi : ACCT ou Agence de coopération culturelle et technique, Calvet Louis-Jean, Diglossie, Langues africaines, Langue internationale, Mission laïque française.

Commission d’enrichissement de la langue française

La politique linguistique, quand elle se donne pour but d’agir sur la forme de la langue, intervient essentiellement à deux niveaux, celui de la graphie (simplification de l’orthographe par exemple) ou celui du lexique.
Elle obéit, dans ce dernier cas, à deux types de justification qui ne se rejoignent que rarement :

  •  Une volonté d’enrichir la langue. On considère qu’elle n’est pas en mesure, selon l’expression de Pierre Frath, d’«exprimer toutes les connaissances de la modernité» et qu’il faut lui permettre de répondre à des besoins nouveaux. On a alors recours à l’emprunt.
  • Une réponse à une menace, un besoin d’affirmation face à une manifestation extérieure considérée comme intrusive. On décide alors de créer, «forger des mots à partir des racines propres à sa langue» (Louis-Jean Calvet) et on parle de néologie.

Cette réaction, que l’on peut apparenter à un mécanisme de défense, est chose fréquente et, de la Chine à la Malaisie, en passant par la Turquie ou l’Espagne, se retrouve chaque fois qu’est attribuée à la langue une fonction d’opposition ou de différenciation.

L’espace francophone avec, pour le Canada, l’Office québécois de la langue française (OQLF) ) ou le Bureau de la traduction des services gouvernementaux du Canada et pour la Belgique, le Service linguistique de la fédération Wallonie-Bruxelles, n’échappe pas à la règle.
Ce rôle consistant à créer des termes nouveaux afin de désigner en français les concepts qui apparaissent sous des appellations étrangères, anglo-saxonnes essentiellement revient, en France, à la Commission d’enrichissement de la langue française, réseau d’experts placé sous l’autorité du Premier ministre.
Une commission qui, en concertation avec ses homologues francophones, l’AFNOR ou encore le Réseau de terminologie en langues romanes REALITER, alimente le site FranceTerme et publie chaque année ses recommandations dans le Journal officiel.

On lui doit, pour ne citer que les plus récents, les termes d’«atelier collaboratif», «cybermonnaie», «mégadonnées », «intelligence artificielle», «dialogueur» ou «flexivégétarien».

Voir aussi : DGLFLF, Emprunts, FranceTerme, FRATH (Pierre), Intercompréhension entre langues apparentées, Office québécois de la langue française, Politique linguistique.

Constitution du 4 octobre 1958 (articles 2 et 87)

En introduisant dans la Constitution  le désormais fameux article 2,  « La langue de la République est le français », l’Assemblée nationale consacre le statut officiel du français.

Nous sommes en 1992, plus exactement le 12 mai et la France s’apprête à ratifier le traité de Maastricht d’intégration européenne, synonyme de disparition de la monnaie nationale.

Nombre de parlementaires désirent alors marquer leur attachement à la langue par un symbole fort et sur ce point, la représentation nationale est, pour l’instant, unanime.
Elle le sera encore quelques mois plus tard au moment de faire adopter par l’Union européenne le principe d’exception culturelle.
On sait ce qu’il adviendra de cette belle unanimité pour qui garde en mémoire l’extrême violence ayant accompagné, l’année suivante, les débats sur la loi Toubon.

Seize ans plus tard, dans un tout autre contexte et de façon infiniment plus discrète, profitant de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, un groupe de parlementaires fait adopter l’article 87 de notre loi fondamentale :

La République participe au développement de la solidarité et de la coopération entre les Etats et les peuples ayant le français en partage. 

Bien peu d’échos pour un amendement  n’ayant occasionné que des débats mesurés et une disposition au caractère pourtant fondamental, l’intégration historique de la notion de Francophonie dans la Constitution.

Voir aussi : DGLFLF, Exception culturelle, Loi du 4 août 1994 dite loi Toubon, Loi du 30 juillet 1974, politique linguistique .

Créole 

Ce sont des constructions de l’esprit … Les langues n’ont d’existence que représentationnelle.

(Jean Bernabé)

On s’accorde généralement sur le fait que notre regard sur les langues est le reflet de nos propres représentations.

Le créole en offre une parfaite illustration.

Mon épouse est née en Martinique.

Le créole est, de toute évidence, la langue maternelle de sa mère, celle dans laquelle celle-ci pense, rêve peut-être, en tout cas et de façon objective celle dans laquelle elle s’exprime le mieux.
Elle parle un créole que ses enfants qualifient de pur, d’authentique, fait de mots dont eux-mêmes ont perdu le sens ou l’usage.
Elle dit qu’elle parle non pas créole mais patois.

Mon épouse est bilingue. Le créole est pour elle une langue, celle qu’elle parle avec sa mère, ses oncles et tantes, ses frères, sa sœur.

Elle me soutient, ou plutôt me soutenait, que ce n’est pas sa langue maternelle.
Telle que je la connais et la vois évoluer, le chanter, revenir peu à peu vers certaines intonations, j’ai de fortes raisons d’en douter.
Je me contente donc de ne pas insister bien que je pense qu’elle l’ait appris ou du moins entendu avant le français, dans un environnement familial où, entre sa mère et  sa grand-mère, le créole était dominant.

Depuis quelque temps elle se veut moins catégorique et semble admettre qu’on peut avoir, non pas une, mais deux langues maternelles.

Mes neveux et nièces qui vivent en Martinique le comprennent parfaitement, mais si leur parents s’adressent à eux en créole, ils ne leur répondent qu’en français.

« Par respect » disent-ils.

Voir aussi : GEREC-F, Langue maternelle

D comme Devoir (le)

Devoir (le)

Quotidien d’information de langue française dont le siège est à Montréal, fondé en janvier 1910 par Henri Bourassa et publié à près de 500 000 exemplaires.

Il est, tel qu’il se décrit lui-même à l’heure de son 110ème anniversaire :

Un journal pas comme les autres, car il s’est toujours défini comme une partie prenante de cette merveilleuse aventure qu’est celle de la continuité d’une nation francophone en terre d’Amérique, une nation singulière par sa langue, sa culture, ses  institutions, son identité.

Des mots

Combien de mots une langue peut-elle compter ?

Que l’on retienne la définition du Larousse selon laquelle un mot est un « élément de la langue composé d’un ou de plusieurs phonèmes, susceptible d’une transcription écrite individualisée » et qu’on admette le caractère vivant des langues et la primauté de l’usage en éludant le concept de faute ou de forme correcte et la réponse est simple : une infinité.

Bien plus que ne peut en contenir un dictionnaire, fut-il numérique.

Celui de notre Académie française est le plus mince, contenu par l’idée du bon usage et d’un certain purisme dont elle se veut la garante.
La 8e édition, qui date de 1935 et reste la dernière complète à ce jour, en comprend 32 000.
31 934 pour être exact.
La 9e, en cours d’élaboration, en compte déjà 55 000.

La différence est notable, accompagnant une indéniable volonté d’ouverture, non exempte  pourtant d’un dogmatisme  assumé, ses «sévérités» nous dit-elle, sur ce qui se dit et ne se dit pas, se fait ou ne se fait pas et ce «qu’il convient d’éviter». 

D’autres, Petit Robert, Petit Larousse, en ont davantage, 60 000, 64 000, jusqu’à 100 000 pour le Grand Robert.

Tout en liberté et créativité mais sans limites et sans règles, le Wiktionnaire en propose 520 000.

C’est cependant le très récent Dictionnaire des francophones et ses 640 000 définitions qui se démarque, numérique et collaboratif comme le Wiktionnaire sur lequel il s’appuie, mais strictement encadré, non prescriptif, situant sur un même plan francophonie et français standard et voulu pour rendre compte avant tout de l’usage.

Mais  le simple fait de s’interroger ne revient-il pas à ôter toute signification aux chiffres eux-mêmes et à la valeur qu’on leur accorde, à la notion de contenu et de prescription, la faute d’aujourd’hui étant la norme de demain et ne semble-t-il pas démontrer le caractère infini, l’absence de limites d’une langue façonnable à l’envie dont tant des mots ne figurent encore dans aucun dictionnaire ?

Un Dictionnaire, en effet, où tous les mots des sciences et de la vie d’un peuple se trouveraient exactement définis, analysés dans leurs éléments, suivis chronologiquement et expliqués dans toutes leurs acceptions, un tel Dictionnaire serait la plus lente des œuvres difficiles; et, à une époque même, cette œuvre deviendrait impossible par l’extension presque infinie des notions qu’elle suppose.

(Dictionnaire de l’Académie française – Préface de la sixième édition – 1835)

Voir aussi : BDLP.

DGLFLF ou Délégation générale à la langue française et aux langues de France

La Délégation générale à la langue française et aux langues de France, comparable en bien des points à l’Office québécois de la langue française, coordonne la politique linguistique du gouvernement.

Discrète, infiniment moins prestigieuse qu’une Académie française dont elle ne bénéficie ni de l’aura ni de l’apparat et bien que (tout comme l’Académie d’ailleurs) non dotée d’un pouvoir de sanction, elle n’en demeure pas moins un instrument efficace pour la promotion de l’emploi du français et l’application de la loi du 4 août 1994.

Elle anime à ce titre la politique linguistique du gouvernement, tant pour ce qui est du français que pour les langues régionales, garantit leur emploi et promeut leur usage.
Elle propose un  Observatoire des pratiques linguistiques.
Elle finance le Dictionnaire des francophones, continuellement mis à jour et par lequel se cristallise sans doute le mieux la distance la séparant d’une Académie française dont le dictionnaire,  le plus mince de tous (32 000 mots ), reconnaît ne « pas avoir pour vocation de recenser la pluralité des usages en train de naître ou de se former, mais de dire le bon usage dès lors qu’il est établi et consacré ».
Elle assure enfin et en parallèle d’autres missions complémentaires : valorisation des langues de France, lutte contre l’illettrisme, intégration linguistique des migrants notamment.

La difficulté essentielle tient cependant à son positionnement et à son rattachement  depuis 1993 au ministère de la culture qui ne lui permet pas de répondre de façon satisfaisante à une mission pourtant décrite comme interministérielle. 

Positionnement très représentatif, par son ambiguïté, de la place dévolue à la francophonie dans la hiérarchie des missions de l’État.

Voir aussi : AFRAV, Collectivités, Commission d’enrichissement de la langue française, Constitution du 4 octobre 1958, FranceTerme, Francophonie, Loi Toubon, Office québécois de la langue française.

Diglossie

Empruntée au grec δίγλωσσος (bilingue) et introduite en 1959 dans la terminologie linguistique par le linguiste américain Charles Ferguson, la diglossie désigne la coexistence au sein d’une même communauté de deux variétés de langue génétiquement apparentées,  baptisées «variété haute» et «variété basse», inscrites dans des relations hiérarchiques et assumant des fonctions spécialisées dans des domaines d’emploi différents.

Deux variétés d’une langue dont l’une est valorisée, normée … mais parlée par une minorité et l’autre est péjorée mais parlée par le plus grand nombre. (Louis-Jean Calvet)

Ferguson s’appuie, dans sa démonstration, sur quatre situations qu’il considère comme exemplaires, la Suisse allemande avec la coexistence de l’allemand et du suisse allemand, l’Egypte (arabe classique et arabe dialectal), la Grèce (grec démotique et katharévousa) et Haïti.

Appliquée à l’espace francophone, la diglossie est une réalité qu’il est impossible d’ignorer et que l’on rencontre par exemple en Algérie mais également et peut-être surtout en Haïti où français, associé aux notions de prestige et de pouvoir et créole, d’usage oral et informel, en quête de reconnaissance et de normalisation, coexistent à des degrés sensiblement différents.

Cette notion de diglossie a été, depuis les travaux de Ferguson, reprise par de nombreux linguistes, notamment l’américain Joshua Fishman et le français Louis-Jean Calvet précité qui en ont, notamment pour ce dernier, considérablement élargi le domaine d’application.

Voir aussi : Algérie, Calvet Louis-Jean, Colonisation, Haïti.

Domengeaux (James)

James Domengeaux est un avocat et  homme politique américain, nous dirions franco-américain, né le 6 janvier 1907 à Lafayette (Louisiane) et décédé  le 11 avril 1988.

Si, contrairement aux Québécois Bourassa et Lévesque, sa notoriété n’excède que très peu les limites de l’État, il n’en demeure pas moins le grand artisan du renouveau du fait francophone en Louisiane.

Issu d’une vieille famille cadienne, très marqué par les politiques d’assimilation excluant durant des décennies les franco-américains de l’éducation et de la vie publique, il souhaite  intégrer à nouveau les populations francophones au sein de la société louisianaise et permettre aux Cadiens de se refamiliariser avec leur langue.

Il mène à leur terme en 1968, soit la même année, deux projets qui se révéleront déterminants pour le devenir de l’action francophone en Louisiane :

  • L’adoption d’une série de lois (les Actes 256, 259, 408 et 458) reconnaissant la langue française comme officielle (la Louisiane devenant de ce fait le seul État officiellement bilingue), exigeant que les universités et les collèges forment des instituteurs qualifiés en français, prévoyant l’enseignement du français dans les cinq premières années de l’école élémentaire ainsi qu’à l’école supérieure et enfin autorisant l’établissement d’une station de télévision en français.
  • La création du CODOFIL, organisme public chargé de relancer et développer la pratique du français en Louisiane, élément devenu moteur dans un enseignement du français désormais en pleine expansion.

Voir aussi : Acadiane, Cadien, CODOFIL, Louisiane.

Dugua de Mons (Pierre)

Moins connu que Samuel de Champlain, saintongeais comme lui, il est celui qui lui ouvre la voie vers l’Amérique du Nord.

«Lieutenant général (d’Henri IV) en Amérique septentrionale», il fonde en 1600 le comptoir de Tadoussac puis installe en 1604, avec les sieurs Champlain, de Poutrincourt et de Razilly, la première colonie française en Acadie sur l’île Sainte Croix, dans l’actuel État du Maine, qu’il déplace l’année suivante à Port-Royal, dans l’actuelle Nouvelle-Écosse.
Il finance en 1608 une nouvelle expédition qu’il confie à Champlain qui fonde, le 3 juillet de la même année, la ville de Québec et poursuivra, à partir de cette date, l’action colonisatrice de Dugua et l’installation française sur les rives du Saint-Laurent.

Voir aussi : Acadie, Cartier (Jacques), Cavelier de la Salle (Rene-Robert), Champlain (Samuel de), Jolliet (Louis).

E comme Concorde

Nous sommes en janvier 1963.

Le projet se dessine enfin et de Gaulle suggère que le supersonique soit baptisé «Concorde».
Ni de Gaulle ni son entourage ne parlent anglais et sans doute n’y a-t-il jamais eu, dans son esprit, la moindre ambiguïté quant à une éventuelle confusion avec le terme anglais équivalent.

La question en tout cas ne se pose pas.
Ce serait mal le connaître.

Sauf que la maquette grandeur nature qui sort quelques mois plus tard des ateliers britanniques est estampillée «Concord», sans «e».

Le conflit, car conflit il y a, va durer cinq ans.
Car l’enjeu est de taille, que personne ne sous estime et qui pourrait prêter à sourire à l’époque des «group», «pass» et autres «planet», mais de part et d’autre de la Manche, aucun des gouvernements ne veut céder.

Décembre 1967.
Cinq années ont passé.
Il faut en finir et c’est le ministre britannique de la technologie lui-même qui l’annonce : «Le Concorde s’écrira avec un E».

De guerre lasse.

Mais pour la France de l’époque, celle d’une V éme République à ses débuts, celle des de Gaulle, Pompidou et Couve de Murville, il ne pouvait en être autrement.

L’histoire, sans cesse déformée, accorde infiniment peu d’importance à ce qui fut un désaccord profond, majeur et préfère insister aujourd’hui, signe de notre temps, sur un «e» synonyme d’«Excellence», «Europe» et, nous dit-on, «England».

Même si ce n’est pas exactement ainsi que les choses se sont passées.

ELAN ou École et langues nationales en Afrique

L’utilisation trop précoce du français comme langue d’enseignement dès les premières années d’apprentissage  explique, partiellement, l’échec scolaire en Afrique subsaharienne francophone. 

Pour atténuer cette difficulté, est mis en œuvre un enseignement bilingue reposant, au cours des trois premières années du primaire, sur l’enseignement dans une langue africaine comprise par les enfants ainsi qu’une initiation au français qui ne deviendra qu’ensuite et progressivement, langue d’ enseignement.
Tel est l’enjeu du programme ELAN piloté par l’OIF et mis en place en 2011 pour promouvoir l’usage conjoint des langues africaines et du français et optimiser la qualité de l’enseignement. 

Confrontée à la pratique cette idée simple se heurte cependant à de considérables difficultés d’application :

  • Difficultés tenant au choix de la langue  tant est grande la marge entre des expérimentations locales, toutes satisfaisantes et une généralisation à l’échelle du pays, l’un des risques résidant par exemple dans le choix d’une langue normalisée (le wolof standard, etc.) qui ne serait en réalité la langue maternelle de personne. 
  • A cela s’ajoute d’autres obstacles, d’ordre technique ou éducatif, tenant à la disponibilité du matériel pédagogique ainsi qu’à la formation des maîtres.
  • Enfin et peut-être surtout s’agira-t-il de vaincre une réticence plus ou moins déclarée des parents pour lesquels le français, langue officielle unique, reste la langue ouvrant la voie à l’épanouissement tant professionnel que social.

Citons cependant, pour l’impact qu’elle eut sur l’ensemble du continent, la réforme introduite en 1968 par Sékou Touré visant à promouvoir les langues nationales de Guinée, peul, malinke, soso, loma notamment, comme langues d’enseignement.
Expérience ambitieuse puisque reposant sur la division du pays en huit puis six zones linguistiques et riche d’enseignements mais qui ne survivra pas à la disparition du chef de l’Etat en 1984.

Voir aussi : Afrique, Enseignement du français, Fédération internationale des professeurs de français (FIPF), Langues africaines, Plurilinguisme

Emprunts 

L’emprunt linguistique est un phénomène inhérent aux contacts entre les langues. Il contribue  à leur vitalité. 

Considéré de façon intrinsèque, il ne représente pas une menace, contrairement aux autres types d’interférence touchant à la syntaxe, la grammaire, l’organisation structurale (celui de la numérotation par exemple) ou la phonologie.
Les emprunts ne se font en effet, dans leur immense majorité, que dans le domaine des substantifs, les verbes ou les adjectifs étant beaucoup plus rarement empruntés. 

Ces dernières décennies mettent cependant en lumière l’émergence d’un phénomène récurrent d’emprunt du français à l’anglais rompant l’équilibre observé jusqu’aux années 1970, considéré par beaucoup comme excessif et gage, à n’en pas douter, d’une rupture d’équilibre dans les rapports de force.
Pour autant, malgré ce qu’il dénote de «conduite de mimétisme» et de «pulsion d’identification» (Claude Hagège) voire de snobisme ou de ridicule, ce renversement des tendances n’a sans doute pas le caractère inquiétant qu’on veut bien lui prêter.
Claude Hagège précité relativise, même s’il le déplore, l’impact des emprunts dans notre environnement linguistique, les estimant en-deçà d’un seuil de tolérance qu’il situe à environ 15% du champ lexical.

On note une même pondération de la part des dictionnaires Robert et Larousse qui communiquent, de leur côté, sur la grande inventivité du français.

Statistiquement, les emprunts et néologismes venant des régions (boucaner), de la francophonie (le farotage ivoirien) et du français lui-même (seul-en-scène, covoiturage, etc.) représentent largement plus de la moitié, soit 57%, du vocabulaire nouveau. Proportion confortée par la méthode  adoptée consistant à ne retenir que les mots validés par le temps et par l’usage sur une période allant de deux à trois ans. 

Parmi les 43 % restants, l’anglais bien sûr est ultra-dominant, nord-américain à 80 % et californien à 50 %, systématique on le sait dans certains domaines, informatique, économie etc, résultat non équivoque cette fois-ci, «du choix préférentiel de la langue dominante» (Claude Hagège). 

Voir aussi : Commission d’enrichissement de la langue française.

Enjeux

Ce serait faire preuve de naïveté que ne pas considérer la langue comme un levier de pouvoir et sur ce terrain, le moins que l’on puisse dire est que les enjeux sont largement sous-estimés.

Les Acadiens des comtés de Dieppe, Moncton ou Madawaska parleront de survie, ce qui est pour eux très exactement le cas . Nous nous contenterons de les qualifier d’ économiques et tout en même temps de culturels, les deux notions se confondent (la France n’est-elle pas en matière de production éditoriale la seconde langue traduite ?), géopolitiques mais également et pour une large part, militaires.

A moins qu’on ne déplace le curseur sur le terrain, tout aussi essentiel, de la crédibilité ou encore de la diversité, ce besoin «d’autre chose». 

 Pour la France ou pour le Québec, il s’agit ni plus ni moins de la survie de leur langue et de leur culture. Si le français devenait une simple langue locale comme c’est le cas du néerlandais, du suédois et même de l’allemand, il disparaîtrait assez vite.
Pour les pays africains, la francophonie est un vecteur de développement et un obstacle à l’islamisme. Ce dernier essaie d’éradiquer le français, tant au Maghreb où il est considéré comme une langue étrangère, qu’en Afrique subsaharienne où il est langue officielle.
On pourrait ajouter qu’à l’échelle nationale, régionale et mondiale, la francophonie est une source de biodiversité culturelle, tout aussi souhaitable que la biodiversité animale ou végétale.

(Yves Montenay)

Voir aussi : Francophilie,  Francophonie économique, Grin (rapport), Guerre des langues, Protocole de Londres sur la non-traduction des brevets européens.

Enseignement du français

Avec ses quelque 130 millions d’apprenants, le français est la deuxième langue la plus enseignée.

Un enseignement dont l’originalité tient dans le fait d’être proposé dans la quasi-totalité des systèmes éducatifs, mais également de s’appuyer sur un réseau sans équivalent, qu’il s’agisse du réseau scolaire à l’étranger (Agence pour l’enseignement du français à l’étranger, Mission laïque française et Agence universitaire de la francophonie) ou de la diplomatie culturelle (Institut français, Alliances françaises, Unifrance notamment). 

Cette attractivité  trouve son prolongement à travers les 330 000 étudiants étrangers accueillis  dans nos universités et grandes écoles.

L’enseignement du français se positionne ainsi loin derrière l’anglais bien sûr, mais également loin devant l’allemand, l’espagnol ou, malgré la multiplication des instituts Confucius, le mandarin.

Compte tenu de la croissance démographique et de l’augmentation du taux de scolarisation, il continue à progresser de façon notable et a presque doublé en 30 ans.

Voir aussi :  Agence pour l’enseignement du français à l’étranger, Agence universitaire de la francophonie, Alliance Française, Classes d’immersion, Fédération internationale des professeurs de français, Français langue étrangère, Influence, Lycée français de Koweït, Mission laïque française.

Enseignement supérieur

L’un des points d’achoppement et l’une des contradictions du discours francophone contemporain.

Si le modèle universitaire français (au troisième rang  en termes d’accueil d’étudiants étrangers et au premier pour l’accueil d’étudiants dans une langue autre que l’anglais) est l’un des plus attractifs, c’est en même temps dans ce domaine,  avec les brèches ouvertes par la loi Fioraso ou plutôt l’interprétation qui en a été faite et  la réforme du Code de l’éducation de 2016, que la tentation de l’anglicisation, autrement dit de l’enseignement exclusif  en anglais, est la plus forte.

Car c’est précisément dans ce secteur, celui de la recherche et de l’enseignement supérieur, bien davantage que dans la publicité, l’entreprise ou la création culturelle, pourtant lourdement impactées, que les conséquences de l’anglicisation seraient, par leur effet sur la capacité à produire de la connaissance et par là même à penser la modernité, le plus dramatique.

Les effets néfastes, constatés dans toute l’Europe du Nord, Danemark, Pays-Bas, Suède et maintenant en Allemagne sont pourtant connus et largement identifiés : perte de terminologies, de domaine, de mémoire, baisse du niveau d’enseignement.

Les enseignants et chercheurs, à l’origine de ces amendements, justifient le recours à l’anglais par son caractère attractif et la reconnaissance internationale découlant du nombre de publications. C’est oublier cependant une étape essentielle, celle de la création qui, comme chacun le sait, ne se construit véritablement que dans sa propre langue.

Et pour ne s’en tenir qu’à l’enseignement en anglais dans nos grandes écoles ou départements universitaires, jouer sur le terrain de l’autre n’est jamais à son avantage, sans omettre le caractère très ambigu du message ainsi adressé aux 330 000 étudiants étrangers ayant fait le choix de notre enseignement.

Voir aussi :  Langue constitutive, Loi Fioraso.

Espace linguistique

La notion d’espace linguistique est, comme bien d’autres,  une notion aux contours mouvants et pour laquelle il n’existe pas de définition unique.

Une approche mixte pourrait être retenue  englobant la dimension «politico-administrative» qui  s’attache au caractère officiel de la langue (définition de l’ODSEF) et la dimension «démo-linguistique» qui privilégie le nombre de locuteurs, généralement fixé à une fraction significative, soit 20 % de la population (définition de la FERDI) .

Une telle approche permettait d’estimer,  en 2019 et selon Ilyès Zouari, la population francophone à plus de 500 millions d’habitants répartis sur les 33 pays dans lesquels on peut «vivre en français», compte non tenu des territoires non francophones de pays comme la Belgique, la Suisse ou le Canada.

De façon plus générale et pour ne s’en tenir qu’au rapport Attali, il serait dorénavant  hasardeux de ne pas considérer cette notion  comme l’une des notions-clef de la géopolitique mondiale :

L’effacement progressif des frontières nationales impose d’autres critères d’appartenance identitaire : la langue et la culture constituent la nouvelle géographie.

A côté ou à l’ombre des géants que sont les espaces anglophone, arabophone, francophone et hispanophone, d’autres espaces existent (néerlandophone, créolophone, etc.) correspondant chacun à une réalité, tant économique que culturelle, tout à fait tangible.

Voir aussi :  Attali (rapport), CERMF,  Créole, francophonie, Observatoire démographique et statistique de l’espace francophone ou ODSEF, Union latine, Zone Economique Exclusive (ZEE).

Exception culturelle

Principe reposant sur l’idée que la création culturelle ne constitue pas un bien marchand comme les autres et défini par l’Union européenne en 1993 à l’instigation de la France  à l’issue d’un débat parfois violent ayant contribué à relancer la critique de l’uniformisation du paysage audio-visuel par les industries culturelles américaines.

Elle est, dans ses dispositions relatives à la chanson ou aux productions cinématographiques, l’un des fondements de la loi du 4 août 1994, dite loi Toubon.

Voir aussi : Constitution du 4 octobre 1958, Loi du 4 août 1994 dite loi Toubon

F comme Fédération internationale des professeurs de français

Fédération internationale des professeurs de français (FIPF)

Accréditée auprès de l’OIF, soutenue par les ministères de l’éducation nationale et des affaires étrangères, la FIPF fédère 200 associations regroupant 80 000 membres, enseignants de français langue maternelle, seconde et étrangère dans plus 120 pays.

A travers l’animation d’un réseau conséquent s’appuyant  sur un maillage  articulé, de l’Amérique latine à l’océan indien, autour de huit commissions et  une revue, « Le français dans le monde », elle a pour objectifs essentiels la diffusion des cultures francophones ainsi que le développement de l’enseignement du français.

Elle organise tous les quatre ans un  congrès mondial rassemblant près de 2 000 enseignants, chercheurs et autres acteurs engagés dans l’enseignement du français, le XV éme congrès, initialement prévu en Tunisie en juillet 2020 sur le thème « Le français langue de partage » ayant dû être, pour des raisons évidentes, reporté sine die.

A l’occasion de son 50e  anniversaire célébré en 2019, la FIPF a créé la Journée internationale du professeur de français.
Cette journée sera fêtée tout les ans, le dernier jeudi du mois de novembre, en hommage aux milliers d’enseignants qui, dans le secret de leurs salles de classe, œuvrent dans le monde entier au soutien de la langue  et de la francophonie.

Voir aussi : Alliance française, AEFE, AUF, CCIP, CIEP, Classes d’immersion, ELAN, Enseignement du français, Français langue étrangère.

FFA ou Forum francophone des affaires

Créé lors du sommet des chefs d’État et de gouvernements francophones de Québec de 1987, le Forum francophone des affaires est un réseau international privé d’entreprises visant à fédérer et  assister les acteurs évoluant au sein de l’espace économique francophone.

Organisé par branches sectorielles et sous-groupes régionaux, il intervient sur un certain nombre d’axes prioritaires tels que la question des normes ou le dépôt des brevets ainsi que dans l’organisation de sommets internationaux à l’occasion desquels il alimente la réflexion sur l’économie et positionne les acteurs francophones au mieux de leurs intérêts.

Précurseur, aux côtés de la Chambre de commerce et d’industrie de Paris (CCIP), dans le domaine de la francophonie économique dont il est l’un des acteurs privilégiés, il propose, aux côtés de l’OIF, «une réponse de la francophonie à la mondialisation».

Son président est Steve Gentili.

Voir aussi : Atttali Jacques (rapport), CCIP, Francophonie économique, Francophilie.

FLE ou Français langue étrangère

Cadre ou socle commun à l’enseignement du français, le «Français langue étrangère», plus communément désigné sous le sigle FLE, est un terme générique désignant l’apprentissage de la langue française à des non francophones, en France ou à l’étranger. 

Selon les lieux, le public et les objectifs, il épousera des contours et sera mis en œuvre par des acteurs différents :

  • Les systèmes éducatifs nationaux proposant, du préscolaire au supérieur et selon les dispositions propres à chaque pays, le français comme langue enseignée,  en tant que matière obligatoire (ce qui est le cas par exemple dans les parties néerlandophone et germanophone de la Belgique), ou facultative.
  • Le réseau de la diplomatie culturelle française : Instituts français, Alliances françaises, Missions laïques françaises.
  • Ainsi que, dans le domaine de la certification et la gestion des diplômes nationaux et des tests de connaissance du français, le Centre international d’études pédagogiques (CIEP) et la Chambre de commerce et d’industrie de Paris Île-de-France (CCIP).

Au-delà des législations en vigueur et des obligations légales, son succès et sa pérennisation restent cependant conditionnés aux moyens effectivement engagés ainsi, élément déterminant, qu’à la capacité des opérateurs à proposer une offre adaptée aux besoins des apprenants, autrement dit à une «demande de français», il est vrai aujourd’hui toujours bel et bien croissante.

Voir aussi : CCIP, Certification, CIEP, Enseignement du français, Fédération internationale des professeurs de français, Test de connaissance du français (TCF) et Test d’évaluation de français (TEF).

FOS ou Français sur objectifs spécifiques

Le Français sur objectifs spécifiques  correspond non plus à une situation d’apprentissage commune à l’ensemble des systèmes éducatifs telle qu’elle caractérise le FLE, sorte de français de la vie quotidienne, mais à un besoin de compétence professionnelle que l’on peut qualifier d’urgent .

Le FOS, « formation de courte durée visant à développer des compétences de communication professionnelle» (Lamia Boukhanouche), s’adresse en pratique à des  adultes confrontés à un besoin précis, professionnels du tourisme, du bâtiment ou de l’agriculture par exemple, ne maîtrisant pas le français et à la recherche d’une formation rapide voire immédiate.

Cette formation, abordée dans un délai contraint, portera sur « un objectif très identifié » en proposant « un programme de français sur mesure » (Lamia Boukhanouche).
Sa principale difficulté consistera, pour l’enseignant, à aborder des contenus a priori non maîtrisés, d’où la nécessité d’entrer en contact avec les acteurs professionnels afin d’analyser les besoins, collecter les données et élaborer le matériel pédagogique.

Proposé par les opérateurs habituels de l’enseignement du français, CNED, CIEP, CCIP notamment, le FOS l’est également dorénavant et c’est à noter, par des acteurs publics tels que le ministère de l’intérieur dans le cadre de stages de perfectionnement adressés aux primo-arrivants en ambassade, aux officiers de liaisons ou aux services de coopération.

Voir aussi : Enseignement du français, CCIP, CIEP.

(Le) Français professionnel

Avec, des Etats-Unis à la Russie ou encore l’Italie, 123 universités et grandes écoles proposant des diplômes de «Français professionnel», l’enseignement du «français de l’économie» ou du «français des affaires» ne peut plus être considéré comme un phénomène totalement émergent.

Un «Français professionnel» de plus en plus recherché sur le marché du travail, notamment américain, particulièrement dans des secteurs tels que l’assurance, la banque, la santé ou les relations internationales.

Les enjeux sont d’ailleurs parfaitement pris en compte par les différents opérateurs, qu’ils soient américains ou français, chacun ayant ici démontré sa capacité à s’adapter à une nouvelle réalité économique :

  • Les universités, DePaul à Chicago, San Diego en Californie, Tulane en Louisiane ou Truman en Virginie pour ne citer qu’elles et qui toutes transforment et adaptent désormais leur offre de cours.
  • La Chambre de commerce et d’industrie de Paris (CCIP), une nouvelle fois placée au cœur de l’engagement partenarial et à la recherche de nouvelles voies à travers l’ouverture de centres d’examens,  l’élaboration de formations en didactique et de nouveaux Diplômes de français professionnel (DFP).
  • L’Ambassade de France et les Consulats généraux (Chicago, Washington, Atlanta) dans un rôle d’interface d’une rare pertinence entre les différents acteurs.

Très inattendu ballet à trois exécutants de nature à faire voler en éclats quelques idées reçues sur une langue française désormais perçue comme «langue de l’emploi» et qui semble attirer, non plus pour la qualité de ses auteurs mais pour ce qu’elle représente, qui l’eut dit, dans le monde des affaires.

Voir aussi : CCIP, Francophonie économique, Francophilie.

France médias monde

France médias monde est une société nationale de programmes créée en 2008 dans le but de coordonner les activités des radios et télévisions publiques à diffusion internationale détenues par l’État français.

Elle fédère trois entités : une chaîne de télévision, France 24 et deux chaînes de radio, Radio France Internationale (RFI) et Monte Carlo Doualiya (MCD).

Forte d’un budget de 254 millions d’euros et employant plus de 1700 agents, elle a pour mission d’offrir en plusieurs langues une vision française de l’actualité internationale, tout en assurant la promotion de la culture francophone dans toute sa diversité.

Voir aussi : Chaîne chinoise CGTN-Français, Chaîne russe R.T, France 24, Radio France Internationale, TV5 Monde.

France 24

France 24 est née de la volonté de Jacques Chirac de donner à la France une voix à l’étranger face aux concurrentes américaine (CNN), britannique (BBC) et qatarie (Al Jezeera). 

Chaîne de télévision française d’information internationale créée en 2005, elle a rejoint en 2012 la société France Médias Monde. Suivie chaque semaine par près de 55 millions de téléspectateurs, elle diffuse en français, anglais, arabe et espagnol sur l’ensemble des continents.

Voir aussi : Chaîne chinoise CGTN-Français, Chaîne russe R.T, France Médias Monde, Radio France Internationale, TV5 Monde.

FranceTerme 

FranceTerme est une base de données par laquelle la Délégation générale à la langue française et aux langues de France (DGLFLF) rend disponible l’intégralité des termes nouveaux recommandés par la Commission d’enrichissement de la langue française et publiés chaque année au Journal officiel.

Destinée en premier lieu aux administrations sur lesquelles pèse un devoir d’exemplarité, elle répond également aux besoins de nombreuses professions, tant dans les domaines juridique que scientifique ou technique.

L’outil, qui comporte une base de plus de 8 000 termes, sert de référence pour les pays francophones.
La totalité des termes disponibles est en effet intégrée dans le Grand dictionnaire terminologique de l’Office québécois de la langue française et partiellement reprise par la banque terminologique du Bureau de la traduction du Canada, TERMIUM Plus, ainsi que par les bases de données de la Chancellerie fédérale suisse, Termdat ou des institutions européennes, IATE.

On y trouve les néologismes tels que «bioénergie», «portage de devises», «syndrome de Noé» ou encore «cyberharcèlement».

Voir aussi : Circulaires, Commission d’enrichissement de la langue française, DGLFLF, Office québécois de la langue française.

francophonie

Au sens strict, l’ensemble des pays dans lesquels on peut vivre,  se déplacer et travailler, en un mot s’épanouir en français. 33, si l’on veut être exact, sans tenir compte des 12 départements, territoires et collectivités d’outre-mer.

Cela sous-entend que le français y est langue de l’administration, des affaires, des médias, seule ou avec une autre langue, qu’elle soit locale comme le lingala en RDC ou internationale comme l’arabe au Maghreb ou l’anglais à Maurice, qu’il y est en tout cas  «nécessaire» (Yves Montenay).
Chacun de ces territoires correspondant à ce que l’on peut nommer «une société francophone» (Ilyès Zouari), ce qui n’est pas le cas de pays, Roumanie, Liban, où l’on compte un certain nombre de francophones mais que l’on ne peut qualifier tout au plus que de francophiles.
On est donc loin ici de l’approche hypertrophiée et peu réaliste d’une Francophonie institutionnelle telle que proposée par l’OIF et, de la Lituanie au Qatar en passant par l’Irlande, de ses 88 Etats membres.

On a coutume enfin,  pour reprendre une théorie développée par le linguiste indien Braj Kachru, de représenter la francophonie à travers chacun de ses «trois cercles» :

  • Le premier cercle où le français est à la fois langue officielle et langue maternelle de la totalité ou d’une partie significative de la population (France, Belgique, Suisse, Québec, Nouveau-Brunswick, etc).
  • Le deuxième où le français est la seule langue officielle même s’il n’est pas la langue maternelle de la majorité de la population (Afrique subsaharienne).
  • Le troisième et dernier étant celui des pays où le français n’est pas langue officielle mais où il est très largement utilisé dans la vie quotidienne (Maghreb).

Ainsi définie et entendue strictement, la francophonie représentait au 1er janvier 2021 selon Ilyès Zouari, président du CERMF et les données du PRB (Population reference bureau), un espace de 524 millions d’habitants, compte non tenu des territoires non francophones de pays comme la Belgique, la Suisse ou le Canada,  s’étendant sur près de 16 millions de km², soit près de quatre fois l’Union européenne et auquel peut s’ajouter la «Zone économique exclusive» (ZEE) de la France, première au monde avec plus de 11 millions de km².

Dans un sens plus large ou plus intuitif, on parlera d’une communauté basée sur la langue voire, pourquoi pas, sur une certaine conscience de soi.

Être francophone, ce n’est pas faire partie d’une ethnie, comme être ukrainien ou chinois.
La francophonie, c’est une communauté linguistique qui inclut des Ukrainiens, des Chinois. C’est la richesse de ce que nous sommes. On le voit au Québec et on le vit chez nous.
La francophonie, c’est une nouvelle communauté.

(Jean Johnson – Président de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada)

Voir aussi : CERMF, Espaces linguistiques, Francophonie économique, Kachru (Braj), OIF, Visa francophone, Zone économique exclusive (ZEE).

Francophonie

La Francophonie, telle qu’elle s’orthographie ici, c’est à dire avec un «F» majuscule, correspond non plus à une communauté, un ensemble de locuteurs ou de territoires mais au dispositif technique et institutionnel organisant les relations entre Etats tel qu’il découle essentiellement de la création de l’Agence de coopération culturelle et technique (ACCT).

Considérée à un niveau intergouvernemental, elle désigne l’ensemble des institutions qui représentent aujourd’hui l’OIF (Organisation internationale de la francophonie), héritière de l’ACCT :

  • Ses quatre opérateurs : Agence universitaire de la Francophonie, Association internationale des maires francophones, TV5 Monde et Université Senghor.
  • Sa représentation parlementaire : l’Assemblée des parlementaires francophones (APF).
  • Ses deux conférences spécialisées : la Conférence des ministres de l’éducation ou CONFEMEN et la Conférence des ministres de la jeunesse et des sports ou CONFEJES.

Déclinée au niveau national, elle correspond, notamment pour la Louisiane, le Québec et la France, à l’ensemble des structures chargées de mettre en œuvre les différents dispositifs d’accompagnement législatif ou réglementaire :

  • CODOFIL pour la Louisiane.
  • Ministère des relations internationales et de la Francophonie, Ministère de l’immigration, de la francisation et de l’intégration, Office québecois de la langue française, Conseil supérieur de la langue française et Commission de toponymie pour le Québec.
  • Délégation générale à la langue française et aux langues de France (DGLFLF) et Commission d’enrichissement de la langue française auxquelles peuvent être associées, sous l’appellation générique de diplomatie culturelle, l’Alliance française, l’Institut français et la Mission laïque.

Mais peut-être se heurte-t-on ici à une contradiction entre la vocation  internationale d’une langue qui, comme tout l’indique, n’appartient plus à la France et une Francophonie institutionnelle perçue, depuis les présidents Mitterrand et Chirac, comme un outil d’influence sans équivalent :

 – Un appui précieux voire indispensable pour le maintien du français comme langue de communication internationale.
– Un espace de solidarité politique qui nous permet, sans être en première ligne, d’aider à la prévention et à la sortie de crises dans l’espace francophone (…), d’œuvrer au respect de la démocratie et des droits de l’Homme .
– Un relais d’influence pour nos idées.

(Note de Maurice Ulrich au président Chirac en mai 2007)

Voir aussi : Alliance française, ACCT, Agence universitaire de la Francophonie, Association internationale des maires francophones, CCIP, CODOFIL, DGLFLF, Office québecois de la langue française, OIF, Québec, TV5 Monde, Université Senghor.

Francophonie économique

La notion est de plus en plus incontournable. Rares sont dorénavant les écrits ou prises de parole qui n’y font pas référence.

L’idée d’une langue pôle de développement économique n’est cependant pas nouvelle, d’autres communautés linguistiques, anglophone à travers le Commonwealth business council (CNC), hispanophone à travers le Secrétariat général ibéro-américain (SEGIB) ou encore lusophone, ayant depuis longtemps et chacune à son niveau, ouvert la voie.

Ce que l’on entend aujourd’hui par «francophonie économique» s’appuie  sur l’idée que «l’effacement progressif des frontières nationales impose d’autres critères d’appartenance identitaire» (Jacques Attali) et que le partage d’une même langue  contribue, par l’abaissement des coûts de transaction et de communication ou les facilités de recrutement, à l’augmentation des échanges entre États et à leurs croissances respectives.

Et  le potentiel de l’espace francophone est, à ce titre,  considérable :

Au total, l’ensemble des pays francophones et francophiles représente 16% du PIB mondial, avec un taux de croissance moyen de 7% et près de 14% des réserves minières et énergétiques, alors que les francophones ne représentent que 4% de la population mondiale. 

 (Jacques Attali précité)

On ne s’étonnera donc pas  que dès les années 1980, en encourageant par exemple la formation professionnelle  en français ou la normalisation et la certification francophones, les Québécois puis les Canadiens, rapidement rejoints  par la Chambre de commerce et d’industrie de Paris (CCIP) et le Forum francophone des affaires (FFA), aient été à l’initiative de cette réflexion.

Il faudra cependant attendre le début des années 2010 pour que  le chef de l’Etat commande à deux chercheuses de l’université de Genève, Céline Carrère et Maria Masood puis à Jacques Attali  deux études (rapport Carrère – décembre 2012 et rapport Attali – août 2014) dont les conclusions ne feront que confirmer cette orientation.

L’idée, désormais inscrite parmi les priorités de l’OIF depuis la déclaration de Kinshasa des 13 et 14 octobre 2012 et le sommet de Dakar d’août et novembre 2014, fait désormais son chemin et ce, même si l’appareil d’État semble être le seul, paradoxalement, à ne pas s’y intéresser.

***

Cette logique de l’interpénétration entre langue et économie est poussée à son terme chez Robert Phillipson où monnaie et langue se confondent à travers une notion commune de «capital», économique d’un côté et linguistique de l’autre, la langue apparaissant comme un support convertible non seulement en pouvoir d’influence, ce que nous savons déjà, mais en «ressources matérielles» et rejoignant la monnaie dans ses fonctions de «création et de distribution de valeurs» :

 La monnaie et la langue remplissent des fonctions similaires.

Pour les économistes, la monnaie c’est :
1. Un système d’échange,
2. Une unité de compte, un instrument de mesure de la valeur des biens et des services,
3. une réserve de valeur en métal, papier ou sous une forme virtuelle.
Chacune de ces caractéristiques a un parallèle pour les langues en tant que,
1. Instrument d’échange des idées,
2. Système d’analyse, de structuration et d’évaluation du monde,
3. Ressource pour conserver des valeurs culturelles. 

Voir aussi : Accords Bourassa-Chirac, Amirshahi Pouria (rapport), Attali (rapport), Carrère Céline (rapport), Chambre de commerce et d’industrie de Paris Île-de-France, Collectivités, Enjeux, Forum francophone des affaires (FFA), Français professionnel, Gérin Lajoie, Influence, OIF.

 Francophilie

Mise en œuvre par Jacques Attali dans son rapport adressé au chef de l’État en août 2014 à travers ce que l’on peut considérer comme une tentative de définition voire d’institutionnalisation, la francophilie, notion informelle, peut néanmoins s’entendre comme :

l’ensemble des pays où le français n’est pas langue officielle, est parlé par moins de 20 % de la population et où une partie des ressortissants a un intérêt pour la langue et la culture françaises.

Concept malléable voire subjectif reposant sur la présence de fortes minorités francophones (Israël et son demi-million de francophones) ou, plus pragmatique et plus intéressé, sur ce que Jacques Attali présente comme :

un intérêt économique et culturel de la part de pays non-francophones, mais situés au voisinage d’une zone francophone, à développer son enseignement.

L’un des exemples les plus probants étant celui du Nigéria, géant anglophone de 177 millions d’habitants entouré de pays francophones où le français, érigé de 1996 à 2014 au rang de deuxième langue officielle, est aujourd’hui la première langue étrangère enseignée, obligatoire pendant les six premières années de scolarisation, optionnelle au lycée et enseignée dans la majorité des établissements d’enseignement supérieur.

Concept d’un intérêt majeur, très étroitement lié à celui de francophonie, l’un et l’autre confondus dans un même jeu  d’influences culturelles, politiques et économiques :

En définitive, la francophonie et la francophilie sont deux concepts intrinsèquement liés : la francophilie est une porte d’entrée sur l’apprentissage du français et la francophonie est une porte d’entrée sur la francophilie et l’achat de produits français …
On désigne sous le nom de «francophilophones» ces ensembles.
Il ne doivent aucune loyauté particulière à la France, sinon qu’ils la comprennent mieux que d’autres.

 (Jacques Attali précité)

Voir aussi : Attali (rapport), Enjeux, Français professionnel, francophonie, Francophonie économique, Influence.

Frath (Pierre)

Linguiste français, professeur émérite à l’université de Reims.

On lui doit des développements d’une rare pertinence sur «l’anglicisation comme phénomène anthropologique» à travers lesquels il étudie les phénomènes conduisant à   «adopter l’anglais comme langue principale en lieu et place de la langue locale».

Il établit notamment une échelle des langues, parallèle à celle de Louis-Jean Calvet et dans laquelle il distingue les langues «patrimoniales», transmises par le milieu familial et la communauté locale, les langues «nationales», telles que nous les connaissons et celles qu’il qualifie d’«universelles», anglais, allemand, français ou encore russe, seules en mesure d’exprimer toutes les connaissances de la modernité.

Le propre de l’anglicisation, nous dit-il, étant cependant de transformer les langues universelles existantes, ce fut le cas du suédois, c’est aujourd’hui celui de l’italien et de l’allemand, en langues nationales non universelles à travers lesquelles il n’est déjà plus possible, pour certaines, de penser la modernité.

Voir aussi : Anthropologie linguistique, Calvet Louis-Jean, Commission d’enrichissement de la langue française, Langue internationale.

Fréquences 

Les langues ne se différencient pas uniquement par des alphabets, des formes grammaticales ou syntaxiques spécifiques  mais, dans leur forme orale, par un temps de latence et, surtout, des fréquences qui leur sont propres.
Là réside peut-être leur différence essentielle tant les spécialistes semblent s’accorder sur le fait qu’il n’y a pas deux langues identiques d’un point de vue acoustique. 

Pour peu qu’on y prête attention, ces niveaux de fréquence sont aisément perceptibles, bas pour l’italien ou l’espagnol et beaucoup plus hauts pour l’anglais par exemple. La différence est ainsi nette pour l’anglais encore une fois selon qu’il est parlé par un anglo-saxon de naissance ou par un Français qui, même dans une relative aisance, conservera les gammes de fréquence propres à sa langue.

Des gammes différentes, plutôt basses, de 1 000 à 2 000 hertz pour le français, tout comme, entre 1 000 et 3 000, pour l’espagnol et l’italien, mais bien plus larges et plus hautes, de 2 000 à 12 000 hertz, pour l’anglais et bien plus encore, de 2 000 à 18 000 pour les langues slaves, russe en particulier.
De là cette anecdote souvent rapportée du chant du coq, «cocorico» pour un français, «cock-a-doodle-do» pour un anglais ou  «kikeriki» pour un allemand, toujours le même bien sûr mais différemment restitué car différemment entendu, chaque peuple percevant les sons et donc les fréquences en fonction de sa langue maternelle.

D’où une propension à reproduire, discriminer et percevoir les sons que nous savons émettre et une facilité, très naturelle pour un Français à parler et comprendre l’italien et l’espagnol, autrement dit les langues romanes, toutes à bande passante comparable ainsi que, dans une logique identique, cette difficulté éprouvée face à l’anglais et ses sons très aigus auxquels notre système auditif n’est que peu sensibilisé.

Beaucoup plus hasardeux en revanche ce raccourci en forme de jugement, très courant aujourd’hui et dans lequel nous nous complaisons, sur des Français, peu accessibles à l’anglais  nous l’avons vu et donc, oubliés espagnol, italien et autres langues romanes, non seulement culturellement mais dorénavant physiologiquement rétifs et inaccessibles non à une langue en particulier mais à toutes en général.

Voir aussi : Intercompréhension entre langues apparentées

G comme GEREC-F 

GEREC-F (Groupe d’études et de recherches en espaces créolophone et francophone)

Le GEREC, qui ne deviendra le GEREC-F que bien des années plus tard, est fondé en 1975 par deux universitaires et linguistes martiniquais, Jean Bernabé et Raphaël Confiant.

Leur but, l’affirmation de la langue et de la culture créoles par opposition au français dont on redoute, à l’époque, le fort pouvoir d’absorption.

Ainsi vont-ils entreprendre une démarche de normalisation qui conduira à la création d’une licence puis d’une maîtrise, d’un DEA, d’un doctorat et d’une agrégation en créole, à l’élaboration d’une grammaire et de manuels pédagogiques ainsi qu’à celle d’une graphie telle qu’on la connaît et l’enseigne aujourd’hui.

Une graphie conçue pour rompre, « prendre ses distances » (Corinne Mencé-Caster) avec un français omniprésent.
Une graphie au premier abord déroutante, répondant à une volonté de « déviance maximale » (Jean Bernabé) et voulue pour faire du créole une langue distincte.

Le procédé après tout, n’est pas nouveau, façonner, ré-inventer une langue pour se démarquer, s’affirmer, exister.

Et pourtant.

Ce travail, fait par des lettrés habiles à aller d’un système graphique à l’autre a peut-être surestimé les facultés d’adaptation d’un public familiarisé avec la lecture et l’écriture du français.
En un mot, passé quelques slogans ou titres, courts et bien identifiés (Kontan wè zot, péyi nou, etc.), lire le créole ne va pas forcément de soi.

Par ailleurs, le postulat d’un retour à une pureté de la langue à travers des « purs mots créoles » (Jean Bernabé), c’est-à-dire les mots les plus éloignés du français, peut sonner étrangement pour qui connaît l’origine, française quand elle n’est pas normande, poitevine ou vendéenne, de la quasi-totalité de la lexie créole.

Le terme bek (du français bec comme bec de gaz, c’est-à-dire lampe et par là lumière), guère utilisé aujourd’hui si ce n’est par la génération de mes beaux-parents, serait-il plus authentique que limyè (transcription directe de lumière), de même que fret (du normand froid) que l’on retrouve sous la même forme au Québec, ou encore tou (du normand itou, pour aussi) ?

Tout bien considéré, n’est-on pas en présence de deux systèmes linguistiques apparentés, d’aucuns (Corinne Mencé-Caster) allant jusqu’à qualifier le créole de langue né-romane, au sein desquels la porosité, même si elle est asymétrique, paraît inévitable ?

Et ne pourrait-on prendre en compte l’existence d’un troisième champ, intermédiaire celui-ci, celui d’un «français des Antilles» ou, entre Acadie, Louisiane et Caraïbes, d’un «français des Amériques», bien peu considéré jusqu’alors ?

Voir aussi : Créole, Diglossie, Haïti, Politique linguistique.

Gérin-Lajoie (doctrine)

La doctrine Gérin-Lajoie est à la politique internationale du Québec ce que la loi 101 est à sa politique linguistique, c’est-à-dire, par le jeu d’une même transposition, l’affirmation d’une identité propre.

Énoncée pour la première fois le 12 avril 1965 par Paul Gérin-Lajoie, vice-premier ministre du Québec, lors d’un discours prononcé devant le corps consulaire de Montréal et donc devant des dignitaires étrangers, elle énonce la volonté du Québec d’être un acteur de la scène internationale dans ses domaines de compétence constitutionnelle.

La portée en est considérable puisque le Québec s’arroge désormais une légitimité propre, «prolongement international de (ses) compétences internes», indépendamment de celle du Canada.

Depuis lors et avec ses 33 représentations implantées dans 18 pays, le Québec ne cesse de s’affirmer dans l’espace international à travers la valorisation de sa spécificité linguistique, dans le cadre notamment d’une diplomatie économique considérée dorénavant comme une priorité.

 Le Québec n’est pas souverain dans tous les domaines : il est membre d’une fédération. Mais il forme, au point de vue politique, un État. Il possède tous les éléments : territoire, population, gouvernement autonome. Il en est outre l’expression politique d’un peuple qui se distingue à nombre d’égards des communautés anglophones habitant l’Amérique du Nord .

(Doctrine Guérin-Lajoie)

Voir aussi : Accords Bourassa-Chirac, ACCT ou Agence de coopération culturelle et technique, Canada, Collectivités,  Montréal, Francophonie économique, Lois du 30 juillet 1974 et du 23 août 1977, Québec.

Grand dérangement

Jamais le terme « euphémisme » n’aura été mieux employé.

Grand dérangement est le nom donné à la déportation de la population acadienne organisée, suite au traité d’Utrecht et au refus d’allégeance envers la Couronne britannique, entre 1755 et 1763.

Environ 10 000 Acadiens, soit les trois-quarts de la population, sont déportés, leurs maisons brûlées, les familles séparées.
Des milliers meurent de maladie ou de faim.

Les survivants sont déportés en Angleterre ou dans ses colonies.
D’autres réussissent à rejoindre la France où ils s’installent, notamment sur l’Ile de Ré et l’Ile d’Oléron avant de regagner, pour la majorité d’entre eux, les terres d’Amérique, Acadie, Québec et Louisiane.

Ce sont leurs descendants qui vivent aujourd’hui à Saint Pierre et Miquelon, sur les Iles de la Madeleine, en Gaspésie, en Acadie et dans les comtés francophones de Louisiane.

On comprendra mieux, dès lors, le sens donné aujourd’hui à leur combat identitaire.

Depuis 2005, le 28 juillet est devenu jour officiel de commémoration de ce que l’on qualifierait aujourd’hui de génocide.

Les Acadiens sont des éternels déportés. Ce n’est pas nécessairement négatif. Ceux qui s’en sont sortis ont le sens du temps. 

(Antonine Maillet)

***

C’est une simple plaque.
Fort mal située.
Les estivants qui mettent le pied sur l’île ne peuvent que lui tourner le dos.
Pour avoir une chance de la voir, encore faudrait-il rebrousser chemin et descendre une rampe en bas de laquelle on n’a objectivement rien à faire.
Pourtant, si le hasard nous y porte, on y lira ceci :

Quai de l’Acadie.
Inaugurée le 13 mai 1994 en présence de
Son Excellence monsieur Benoît Bouchard
Ambassadeur du Canada en France.
Cette plaque rappelle le rôle joué par
l’île d’Aix dans l’histoire de la Nouvelle-France
et la part qu’elle a prise dans l’accueil
des Acadiens dès la fin de l’année 1758
suite au Grand Dérangement.

Voir aussi : Acadie, Cadiens, Louisiane, Moncton.

Graddol (rapports)

Aucune réflexion sur la francophonie ne peut se permettre d’ignorer ou  sous-estimer cette étude effectuée, à la demande du British council, par le linguiste britannique David Graddol.

Deux rapports, «The future of english» et «Next english», publiés respectivement en 1997 et 2006 et qui, bien que non traduits, ont eu et ont toujours un impact considérable auprès de nos élites et par voie de conséquence sur l’opinion, à travers l’idée qu’elle peut se faire de sa propre langue.

Phénomène de juxtaposition déjà observé (Surveylang, Education First, etc) sur la pensée anglo-saxonne, même et surtout si elle nous est défavorable, alimentant ainsi le sens commun et accréditant l’idée d’une langue française en déclin.

L’étude, qui a pourtant le mérite de s’attaquer la première à une synthèse globale de la place des langues dans le monde, est cependant très intéressée et s’emploie à sous-estimer la situation du français comme de ses autres concurrents d’ailleurs, l’espagnol et le mandarin.
Elle s’appuie pour cela sur des postulats erronés, excluant par exemple l’Afrique francophone ou occultant, en s’appuyant  sur la «théorie des trois cercles», la dimension internationale du monde francophone.

Et ce n’est  pas un hasard si le rapport, dans sa version de 2006, s’ouvre sur cette affirmation,  officialisant ainsi une conviction jusqu’ici soutenue, pourrait-on dire, à mots couverts :

L’anglais est généralement considéré comme la porte d’entrée de la richesse des économies nationales, des organisations et des individus. Si cela est exact la répartition des richesses sera liée de près à la diffusion de l’anglais.

(Traduit et cité par Yves Montenay).

Le plus étonnant n’est pas ici la foi absolue en une langue jugée infaillible, d’autres l’ont eue à commencer par nous, ni son caractère erroné (les Chinois, par exemple, travaillent en mandarin et il semble que l’Afrique anglophone ne soit pas des plus dynamiques), mais son impact auprès d’un public international, français notamment, souscrivant les yeux fermés au principe de la supériorité de la langue de l’autre et à son aptitude à rendre meilleur par le seul fait qu’on l’emploie.

Voir aussi : Afrique anglophone, Hagège (Claude),  Kachru Braj.

Grin (rapport)

Peu médiatisé, François Grin n’en est pas moins un universitaire reconnu, dont les travaux sur l’économie des langues font autorité.

C’est à ce titre que le Haut conseil de l’évaluation de l’école le sollicite en  septembre 2004 sur la question de l’enseignement des langues étrangères, sous un angle non pas pédagogique mais comptable, autrement dit en termes d’efficacité et d’équité.

Dans un rapport publié en septembre 2005 sous le titre de «L’enseignement des langues étrangères comme politique publique», François Grin va dès lors proposer une analyse s’appuyant sur la dynamique des langues, leur valeur, marchande et non marchande, associée à une approche par scénarios ( «Tout-à-l’anglais», «Plurilinguisme» et «Espéranto») mais dont l’intérêt essentiel va résider dans l’évaluation chiffrée des «transferts nets dont bénéficient les pays anglophones du fait de la préséance de l’anglais».

Trois indicateurs sont retenus : les «Marchés privilégiés» (produits liés à la langue anglaise), l’«Économie d’effort dans la communication» (traduction et interprétation) et l’«Économie d’effort dans l’enseignement des langues étrangères».

Pour l’ensemble, en termes de rentrées nettes ou de dépenses évitées, le rapporteur évalue les avantages retirés par le seul Royaume-Uni à une fourchette comprise entre 10 et 17 milliards d’Euros, soit 1% de son PIB.

Cet ordre de grandeur ne tient pas compte des avantages indirects induits de la position dominante que permet, par exemple, une négociation dans sa propre langue ni du coût supporté par les autres États pour l’enseignement des langues étrangères, dont en premier lieu l’anglais.

Pas davantage de ce que serait, selon l’auteur, «le montant de ces transferts … si l’on adoptait le scénario du tout-à-l’anglais».

Bien que publiées en 2005, les données retenues sont celles des années 2002-2004 et il n’échappera à personne que la position de l’anglais s’est depuis, renforcée, voire, pour l’Union européenne ou certains pays comme le Danemark, institutionnalisée.

Ainsi l’auteur en conclut-il à un coût jugé aussi exorbitant qu’inéquitable et en arrive-t-il à s’interroger sur des choix qu’il ne peut qualifier que de peu «rationnels» :

Dans tout autre domaine de la politique publique, de tels transferts seraient immédiatement dénoncés comme inacceptables … Pourquoi, malgré tout, la majorité de l’opinion et des décideurs semble y trouver si peu à redire est une question qui n’est toujours pas élucidée et qui relève de la psychologie sociale davantage que de l’analyse politique.

Voir aussi : Enjeux, Plurilinguisme, Protocole de Londres sur la non-traduction des brevets européens, Union européenne.

Groupe des ambassadeurs francophones

On entend par Groupe des ambassadeurs francophones  un ensemble de structures ou de réseaux, formels ou non formels, réunissant les représentants des États et gouvernements membres et observateurs de l’OIF, qu’ils soient accrédités auprès d’une organisation internationale ou bien d’un État.

On en compte aujourd’hui 43 et si l’appellation «Groupe des ambassadeurs francophones» est la plus employée, d’autres dénominations ont cours qui, comme le «Conseil de la promotion de la Francophonie» au Japon ou le «Cercle des ambassadeurs francophones» en Chine, visant à un meilleur équilibre linguistique au sein des organisations internationales, participent d’une démarche identique et se révèlent être de précieux relais  pour l’action de la francophonie.

L’un des exemples le plus probants du rôle joué par ces «ambassadeurs» étant celui d’Haïti ayant fait entériner, en 2013, l’adoption du français comme langue officielle de la Communauté caribéenne (CARICOM) aux côtés de l’anglais.

Voir aussi : Influence, OIF.

Guerre des langues

Le terme n’a rien d’excessif pour qui comprend et admet les enjeux qui en découlent.

Nullement ressentie en France où elle se joue sur d’autres terrains, économiques et culturels, ainsi que dans les couloirs de l’Union européenne.

Elle répond ailleurs à une réalité beaucoup plus tangible, que ce soit dans une Belgique divisée par les rivalités entre Flamands et Wallons, en Acadie, Ontario et dans l’Ouest canadien sur fond de combat de la minorité francophone pour la reconnaissance de ses droits, ou en Algérie sur fond de tensions religieuses et sociales et de rancœurs postcoloniales, entre arabe littéral, arabe dialectal, berbère et français.

Voir aussi : Algérie, Enjeux, Ontario, Modèle gravitationnel, Politique linguistique, Protocole de Londres sur la non-traduction des brevets européens.

H comme Hagège

Hagège (Claude)

Né à Carthage en 1936, professeur honoraire au Collège de France, maîtrisant plus d’une dizaine de langues, il est le linguiste français le plus médiatisé.

Il est notamment l’auteur de publications qui font désormais référence dans lesquelles il s’engage en faveur d’un «combat» pour la promotion de la diversité et met en garde contre une domination unilatérale de l’anglais.
Attitude en rupture avec une vision purement technique, appelée de ses vœux par Louis-Jean Calvet notamment, ne concevant l’action du linguiste qu’à travers une fonction de veille ou de conseil mais loin de correspondre pour autant, de David Graddol à Braj Kachru, à une réalité effective.

Précédant Pierre Frath dans une analyse anthropologique de l’anglicisation avant la lettre, il met en avant le bien fondé d’une politique linguistique favorable au français, définit le concept de mimétisme et dénonce, des plus hautes sphères de l’État en passant par le monde de l’entreprise, de l’enseignement supérieur et de la communication, notre snobisme et notre aveuglement face une adoption systématique de l’anglais qu’il considère comme un leurre:

Cette conduite de mimétisme, observable chez les Européens éblouis par la puissance du monde des anglophones de naissance, est aussi la manifestation extérieure d’une pulsion d’identification à ces derniers, dont on choisit d’arborer tous les attributs et accessoires qui sont susceptibles d’être empruntés.

Voir aussi : Anthropologique de l’anglicisation, Calvet (Louis-Jean), Frath (Pierre), Graddol (rapports), Kachru (Braj), Politique linguistique.

Haïti

Avec une superficie de 27 750 km² soit à peine moins que la Belgique et une population s’élevant à 11,4 millions habitants, Haïti, première République Noire de l’histoire est tout à la fois l’un des pays les plus densément peuplés au monde et désormais, devant la République dominicaine et Cuba, l’Etat le plus peuplé de la Caraïbe.

C’est également, avec un PIB comparable à ceux de la Gambie ou du Rwanda et en raison d’une gestion calamiteuse des affaires de l’État, l’un des pays les plus pauvres du monde.

C’est enfin et sur un tout autre plan, un Etat bilingue ayant le français et le créole comme langues officielles, l’une et l’autre coexistant cependant à des niveaux différents dans un contexte que l’on peut qualifier de diglossique :
le français, parlé par environ 10% de la population, langue de la constitution et de l’administration et le créole, français par sa base dialectale, langue maternelle de la majorité des Haïtiens, d’usage oral et informel, en quête de normalisation.

Il est  intéressant de noter que l’actuel gouvernement vient de solliciter, très récemment, l’expertise de l’OIF (Organisation internationale de la francophonie) dans le cadre de l’élaboration de la nouvelle constitution haïtienne.
Collaboration qu’il sera important d’analyser au regard des enjeux et des attentes qu’elle suscite dans un pays confronté à des difficultés, tant économiques, sociales qu’institutionnelles, récurrentes, mais qui souligne également, si besoin était, le maintien d’un lien plus que jamais étroit avec l’univers francophone. 

Un lien renforcé par la récente adhésion d’Haïti à l’Union africaine et qui pourrait inciter, comme le souligne avec pertinence Ilyès Zouari, président du CERMF, les autorités haïtiennes à s’inspirer de ses partenaires d’Afrique francophone et de leurs récentes avancées « sur la voie de la bonne gouvernance et du développement ».

Voir aussi : Afrique francophone, Calvet Louis-Jean, Créole, Diglossie.

I comme Indice de continuité linguistique

Indice de continuité linguistique

Également nommé indice de vitalité linguistique, l’indice de continuité linguistique évalue la capacité d’un groupe à intégrer des populations ayant une langue maternelle différente.
Il s’évalue en établissant le rapport entre les effectifs d’une langue d’usage et ceux d’une autre langue maternelle.

Notamment appliqué au Canada afin d’y observer l’évolution des tendances démographiques entre anglophones, francophones, voire allophones, cet indice est l’un des moyens dont disposent les démographes pour rendre compte de l’assimilation linguistique.

Influence

Bien que récemment élargie à d’autres domaines,  scientifique ,technique, militaire ou encore économique, la politique d’influence d’un pays comme la France est, comme bien d’autres d’ailleurs, historiquement organisée autour de la langue.

Elle s’appuie à ce titre sur de nombreux relais :

  •  Une présence médiatique planétaire à travers des médias, Radio France internationale, Monte Carlo Doualiya, France 24 et TV5 Monde et leurs programmes d’expression française ou en langues étrangères visant à offrir  une vision française de l’actualité internationale.
  •  Un dispositif culturel et scolaire sans équivalent, communément désigné sous l’appellation générique de diplomatie culturelle, rassemblant plus de 6000 agents dans 161 pays regroupés notamment autour des Instituts Français, Alliances françaises, Agence universitaire francophone (AUF) et Agence pour l’enseignement du français à l’étranger (AEFE).
  • Un ensemble de réseaux, parfait complément de cette «politique de présence» (R. Pilhion et M. L Poletti), d’autant plus efficace qu’il ne s’accompagne d’aucune visibilité en surface et composé notamment d’anciens élèves des lycées français occupant pour la plupart des postes-clef dans le monde des affaires, de la politique, de la diplomatie ou encore des médias.

Une idée d’influence étroitement associée à celle de Francophonie, entendue au sens institutionnel, ouvertement pensée  comme «miroir» et «projecteur»  (Frédéric Turpin),  «appui précieux voire indispensable pour le maintien du français comme langue de communication internationale» (Maurice Ulrich), mais également à la notion voisine de francophilie telle que définie par Jacques Attali, réseau d’«influenceurs francophones», difficile sinon impossible à quantifier mais d’une importance majeure pour son potentiel de diffusion de la langue et de nos intérêts.

On notera enfin et comme pour mieux souligner sa valeur stratégique, que les baromètres les plus récents, Calvet ou INSEAD, privilégient dorénavant dans leurs classements des langues la notion d’influence parmi les indicateurs retenus.

Voir aussi : AEFE, Attali (rapport), Calvet Louis-Jean, Groupe des ambassadeurs francophones, Francophilie, Francophonie économique, INSEAD, Institut français, Lycée français de Koweït, OIF.

Institut européen d’administration des affaires (INSEAD)

École privée de management créée par Olivier Giscard d’Estaing en 1957 sur le modèle américain d’administration des affaires, établie sur trois sites (Fontainebleau, Singapour et Abou Dabi), régulièrement classée numéro 1 mondial et proposant un enseignement en langue anglaise, l’Institut européen d’administration des affaires n’a a priori qu’un lointain rapport avec la francophonie.

Sauf qu’en 2016, Kai Chan, originaire de Toronto et professeur associé à l’INSEAD, publie les résultats de recherches portant sur la création d’un nouvel instrument de classement des langues.

La démarche n’est pas nouvelle, d’autres classements (ceux de George Weber, du M.I.T et son Global language network ou plus récemment du groupe de presse Bloomberg) l’ayant précédé, chacun ne retenant cependant qu’un nombre restreint de critères, six pour le premier, trois pour le second et un seul (l’utilité économique), dans une démarche typiquement anglo-saxonne  pour le dernier cité.

Le seul offrant les mêmes garanties dans une démarche comparable est cependant celui de Louis-Jean Calvet, publié en 2012  et mesurant 135 langues selon 12 indicateurs.
Les deux approches restent similaires, Kai Chan évaluant non plus 135 mais 124 langues à travers non plus 12 mais cette fois-ci 20 indicateurs regroupés en cinq catégories : géographie, économie, communication, connaissance et information et diplomatie.

Parmi les indicateurs retenus, trois parmi lesquels la diplomatie avantagent nettement le français.
Le poids économique du monde francophone dont celui des pays africains est en contrepartie, comme le souligne Jean-Benoît Nadeau et dans une démarche qui n’est pas sans rappeler celle des rapports Graddol, sensiblement sous-évalué.

Référencé sous le nom de « Power language index » (Indice des langues influentes), il positionne néanmoins le français au 3e rang derrière l’anglais et le mandarin.

Difficile dans ces conditions de ne pas parler de convergence, Kai Chan partageant le constat établi par Jacques Attali sur l’atout diplomatique voire économique de la francophonie et aboutissant aux mêmes conclusions, tout comme il établit un niveau identique à celui de Calvet qui positionnait le français au 3e rang en 2012 et au 2e en 2017.

Voir aussi: Attali (rapport), Calvet (Louis-Jean), Espace économique francophone, Francophonie économique,  Influence, Traduction.

Institut français

Intégré aux côtés d’Atout France, Unifrance et surtout l’Alliance française dans notre dispositif de diplomatie culturelle, l’Institut français est un établissement public placé sous la tutelle du ministère des Affaires étrangères et du ministère de la Culture.

S’appuyant sur 138 antennes réparties dans près de 100 pays ainsi que sur le réseau des Instituts français de recherche à l’étranger (IFRE), l’Institut français est un élément majeur de la politique culturelle de la France.
Opérateur de référence en matière de promotion du français, il coordonne notre action culturelle à l’étranger en intervenant en appui des 131 services de coopération et d’action culturelle des ambassades de France et en collaborant avec l’Alliance française et son réseau associatif.

A contre-courant d’une baisse structurelle des crédits,  l’Institut français bénéficie depuis 2019  d’une revalorisation budgétaire conséquente, signe semble-t-il d’un renouveau dans la stratégie gouvernementale visant, à travers l’intention d’Emmanuel Macron de développer une «francophonie décomplexée», à un renforcement de notre stratégie d’influence.

Voir aussi : Alliance française, Influence.

Intercompréhension entre langues  apparentées  

L’intercompréhension entre langues apparentées est une forme de communication permettant à chacun de comprendre la langue de l’autre tout en continuant à s’exprimer dans la sienne.
Elle repose sur la grande similitude unissant les langues d’une même famille et sur le constat «qu’il est plus facile de comprendre une langue qui appartient à (celle) que l’on parle déjà plutôt qu’une autre» (Pierre Frath).

Tout bien considéré et pour qui admet que l’intercompréhension entre langues voisines a modelé les premiers échanges entre les peuples, elle est de nature à remettre en cause le principe de langue tierce, opposé aujourd’hui de façon systématique.

En d’autres termes et si l’on veut bien faire abstraction de la dimension symbolique et représentationnelle des langues, autrement dit de la valeur qui leur est accordée, un italien ou un espagnol comprendront ce que dira un français, à condition bien sûr de parler lentement et dans une langue  standard .
Ils le comprendront d’autant plus qu’ils l’auront appris, pour la très grande majorité d’entre eux, en LV2 ou LV3.
Le besoin de s’exprimer en anglais découlant dès lors d’une tout autre motivation.

Désormais conceptualisée et adaptée notamment à l’espace francophone, l’intercompréhension entre langues apparentées est une compétence professionnelle reconnue, exploitée notamment par les universités de Reims, Aix en Provence, Rome, Salamanque et Lisbonne.

Cette théorie qui ne s’appuie ni plus ni moins que sur une évidence et repose sur une véritable équité dans le dialogue ainsi que sur un échange direct et plus respectueux de la pensée de chaque interlocuteur, est aujourd’hui reprise par les tenants d’un véritable pluralisme à l’échelle européenne.

Le principe est simple, si l’on exclut le grec, l’albanais, le maltais ou le hongrois considérés comme des isolats, les langues nationales européennes appartiennent à trois familles : latine, germanique et slave.
La méthode ayant démontré qu’un francophone pouvait comprendre les autres langues latines en quelques dizaines d’heures, il suffirait d’apprendre une langue d’une autre famille et travailler ensuite les techniques de l’intercompréhension.

L’exclusivité de l’anglais serait alors remplacée par une variété de langues et de cultures plus en rapport avec le pluralisme linguistique, tel qu’il est érigé en modèle.

Voir aussi : Commission d’enrichissement de la langue française, Enseignement supérieur, Pluralisme, Union latine.

Internet

La mesure de l’espace de représentation des langues dans l’Internet ne passionne pas les foules et pourtant les enjeux, sur les plans linguistique, culturel, socio-économique et même géopolitique, sont loin d’être neutres.
Beaucoup de langues sont menacées ou simplement en déclin et l’intensité de leur présence dans l’Internet est un indicateur déterminant de leur futur.

(Daniel Pimienta, président de l’ OBDILCI)

Les enjeux, autrement dit l’importance de la création de contenus en langue locale, sont donc identifiés, la matière n’ayant pourtant cessé, depuis sa création, de reposer sur l’association entre anglophonie et réseaux informatiques.

Il est vrai qu’à son origine, en 1992, la part de l’anglais sur la Toile est rien moins qu’exclusive (100 %), le système de codage, conçu pour la langue anglaise, handicapant lourdement les autres langues et les éloignant, temporairement, du dispositif.

Contrairement cependant au message véhiculé par des études et institutions  nord-américaines, particulièrement influentes, le recul de l’anglais va très rapidement se dessiner puis se confirmer (75 % en 1997, 52% en 2001) pour ne plus représenter aujourd’hui que 20 % du total.

L’ Observatoire de la diversité linguistique et culturelle dans l’Internet (OBDILCI) considère ainsi, en mai 2023, que l’anglais occupe toujours la première place, avec 20 %  nous venons de le voir  mais en compagnie du mandarin  et suivi, loin derrière il est vrai par l’espagnol (8 %), puis, à niveau égal par le français, l’hindi, le russe, le portugais et l’arabe (3,5 %).

On note cependant, aux côtés des indicateurs traditionnels que sont le pourcentage de locuteurs connectés et le pourcentage de contenus sur la Toile, l’introduction par l’Observatoire d’une nouvelle base de calcul faisant référence au concept de « cyber-mondialisation ».
Cette dernière, reposant notamment sur le facteur démographique et la capacité à attirer des apprenants seconde langue, conforte la première place de l’anglais mais repositionne le français en le plaçant dorénavant nettement devant les autres langues, allemand, russe, espagnol et arabe notamment.

Repositionnement confirmé par la hausse des taux de connectivité observée en Afrique qui semble, enfin, en mesure de combler son retard et réduire sa fracture numérique.
A titre d’exemple, un pays comme le Bénin passe ainsi de 14% en 2017 à 29% en 2021 et 34% en 2023, courbe de croissance très représentative de celle de l’ensemble du continent et notamment de l’Afrique francophone.

Partant du principe que les internautes privilégient leur langue maternelle sans délaisser pour autant leur deuxième langue, il apparaît que cette perspective, si elle venait à se confirmer,  devrait également bénéficier aux langues européennes les plus présentes sur ce continent, à savoir en premier lieu l’anglais et le français.

Cet article a été mis à jour grâce aux éléments fournis par Daniel Pimenta, président de l’Observatoire de la diversité linguistique et culturelle dans l’Internet. (http://obdilci.org/)

Voir aussi : Calvet, INSEAD, Langues africaines.

J comme Jean Michaëlle

Jean (Mickaëlle)

Canadienne d’origine haïtienne née en 1957 à Port-au-Prince.

Après une brillante carrière de journaliste elle occupe, de 2005 à 2010, la fonction de gouverneure générale du Canada, devenant la première femme Noire à ce poste.
En 2015, succédant à Abdou Diouf, elle devient la première femme secrétaire générale de l’OIF (Organisation internationale de la francophonie).

Candidate à sa propre succession en 2018, son mandat n’est pas reconduit et elle cède sa place à la rwandaise Louise Mushikiwabo.

Voir aussi : Mushikiwabo (Louise), OIF.

Jeux de la Francophonie

Rencontres culturelles et sportives organisées depuis 1987, les Jeux de la Francophonie rassemblent tous les quatre ans une moyenne de 4 000 sportifs et artistes issus des 88 États et gouvernements membres de l’OIF.

Après Rabat et Casablanca, Paris, Antananarivo, Ottawa et Hull, Niamey, Beyrouth, Nice et enfin Abidjan, ce sont les comtés de Dieppe et Moncton qui, jusqu’à l’annonce par le premier ministre Blaine Higgs du retrait du Nouveau-Brunswick en raison d’un coût jugé trop élevé, devaient accueillir la 9 éme édition.

Désengagement diversement interprété, nombreux étant ceux au Canada qui dénoncent la mauvaise foi des gouvernements conservateurs et y voient un nouvel exemple de restrictions budgétaires «orientées» au détriment de la communauté francophone.

Ce sera donc, cinq après Abidjan, la ville de Kinshasa en République démocratique du Congo qui accueillera les prochains Jeux, non plus en juillet-août 2021 mais, en raison de la crise sanitaire en 2022, positionnant une nouvelle fois les métropoles africaines au coeur de l’échiquier francophone.

Voir aussi : Acadie, Kinshasa, Moncton, Nouveau-Brunswick

Jolliet (Louis)

Qui va un jour à Chicago, outre le fait qu’il découvrira une ville  envoûtante, sera peut-être surpris, pour peu qu’il fasse preuve de curiosité, par la présence de deux noms très français, tranchant l’un et l’autre avec une francité inexistante, du moins en apparence.

Le premier apparaît dès le premier regard, LaSalle ou plutôt LaSalle street, l’une des principales artères quadrillant la ville dans son axe nord-sud.
L’autre est plus discret, simple plaque commémorative, bilingue si mes souvenirs sont exacts, nous rappelant qu’à cet endroit voici trois siècles et demi, deux hommes, Louis Jolliet et Jacques Marquette furent les premiers Blancs à franchir le fleuve Chicago.

Explorateur, marchand, cartographe, musicien même, joueur de clavecin et d’orgue, Louis Jolliet, né le 21 septembre 1645 près de Québec et mort en 1700 sur la rive nord du Saint-Laurent, s’il est totalement inconnu en France, n’en est pas moins le premier grand explorateur Canadien de ce qui était alors la Nouvelle-France.

Le premier, il descend le Mississippi à la recherche d’une introuvable voie vers le Japon et vers la Chine.
Le premier, il traverse le fleuve Chicago, poursuit vers l’Ohio, dessine la carte du Saint-Laurent, explore la Côte-Nord, passe le détroit de Belle-Isle et la baie des Esquimaux jusqu’au 56e parallèle, décrit et cartographie les côtes du Labrador.
Le 30 avril 1697, il est nommé professeur d’hydrographie au collège de Québec.

Il meurt en 1700, entre mai et octobre, la date reste incertaine, en un lieu lui aussi incertain, l’une des deux seigneuries qu’il possédait, dit-on, sur la Côte-Nord.

Voir aussi : Cavelier de La Salle (René Robert), Cartier (Jacques), Champlain (Samuel de), Dugua de Mons (Pierre).

Journée internationale de la Francophonie

Journée correspondant à la date de création de l’Agence de coopération culturelle et technique (ACCT) fondée le 20 mars 1970 à Niamey et ancêtre de l’actuelle OIF (Organisation internationale de la francophonie).

Depuis 1988, sont organisées à cette occasion dans chacun des 88 États et gouvernements membres, des activités célébrant la langue française.

Lors de ce même mois de mars se tient également chaque année la «Semaine de la langue française et de la Francophonie» ainsi que, tous les deux ans, la «Conférence des chefs d’État et de gouvernement des pays ayant le français en partage», plus communément appelée Sommet de la Francophonie.

Voir aussi : ACCT, OIF.

K comme Kachru

Kachru (Braj)

Linguiste indien décédé en 2016, spécialiste des différents types d’anglais dans le monde.

On lui doit la « théorie des trois cercles » qu’il applique à l’anglais en distinguant les locuteurs natifs, ceux dont l’anglais n’est pas la langue maternelle mais qui en font un usage quotidien (on parle de langue seconde) et enfin les locuteurs occasionnels, autrement dit les apprenants.

Cette théorie, reprise par de nombreux linguistes, peut être transposée à toute langue utilisée largement en dehors de sa zone maternelle.

C’est le cas notamment du français où l’on retrouve les pays où le français est à la fois langue officielle et langue maternelle de la totalité ou d’une partie significative de la population (France, Belgique, Suisse, Québec, Nouveau-Brunswick, etc), ceux où le français est la seule langue officielle même s’il n’est pas la langue maternelle de la majorité de la population (Afrique subsaharienne) et ceux enfin où il n’est pas langue officielle mais où il est très largement utilisé dans la vie quotidienne (Maghreb).

Voir aussi : francophonie, Graddol (rapports).

Kinshasa

C’est officiel depuis la parution du rapport de l’ONU sur « Les villes du monde », Kinshasa, capitale de la République démocratique du Congo (RDC) est, depuis 2016, la plus grande ville francophone du monde, « ville » entendue ici au sens d’agglomération.

Une première place qui se confirme d’année en année avec une population  estimée, selon Ilyès Zouari, président du CERMF, à 14,6 millions d’habitants au 1er janvier 2021.
Kinshasa dépasse alors largement Paris et ses 11 millions d’habitants avec laquelle elle creuse semble-t-il définitivement l’écart.

Cette évolution confirme  le dynamisme, tant démographique qu’économique et la montée en puissance de l’Afrique francophone puisque, parmi les dix villes francophones de plus d’un million d’habitants, on retrouve, toujours en termes d’agglomération, huit capitales africaines, parmi lesquelles Abidjan (5,3 millions) et Yaounde (4 millions), Paris et Montréal n’apparaissant plus respectivement qu’en 2e et 4e position.

Positionnement qui appelle une remarque quant à la réalité d’un rapport à la langue parfois contesté :
Avec, selon le rapport de l’OIF « La langue française dans le monde en 2010 », 92% de la population parlant le français ou encore des médias francophones à 97 %, Kinshasa se présente bel et bien comme une ville  francophone où cohabitent le français, langue officielle et le lingala, langue nationale aux côtés du kikongo, du swahili et du tshiluba et langue maternelle de la grande majorité de la population.

Voir aussi : Afrique, langue officielle, République démocratique du Congo ou RDC.

L comme Langue constitutive

Langue constitutive – langue véhiculaire 

Qu’est-ce qu’une langue, à quoi cela sert-il ?

Simple outil de communication, dénué de tout autre fonction, interchangeable s’il ne convient pas ou ne répond pas aux services qu’on est en droit d’en attendre, la langue est-elle strictement véhiculaire, ou est-elle bien davantage l’expression d’une culture, d’une histoire, le reflet de l’identité d’une communauté, de ce que nous sommes ?

Portée par la linguistique et la philosophie, la seconde hypothèse est aujourd’hui plus communément admise.

Parmi les nombreuses illustrations de la langue structurant notre pensée et organisant notre représentation de l’univers, celle des mathématiciens, français ou malais notamment, est fréquemment citée.
Tous ayant fait le choix de travailler dans leur langue maternelle tout simplement parce qu’on réfléchit mieux dans sa langue, parce qu’étudier et raisonner dans une autre langue que la sienne entraîne et cela est désormais acquis, une déperdition des connaissances et des facultés créatrices.

 Quand on parle de langues, pour dire les choses simplement, il s’agit toujours aussi d’autre chose. La langue n’est pas seulement un instrument de communication (…) Les systèmes symboliques ne sont pas simplement des instruments d’expression de la réalité, mais ils contribuent à la construction du réel (…) Et il faut réfléchir (…) pour voir si et comment il est possible d’accepter l’usage de l’anglais sans s’exposer à être anglicisé dans ses structures mentales, sans avoir le cerveau lavé par les routines linguistiques.

(Pierre Bourdieu. Raisons politiques)

Voir aussi : Enseignement supérieur.

Langue officielle – langue nationale

La langue officielle est la langue désignée par un État pour des fonctions officielles telles que la rédaction des lois, l’administration, l’éducation et les relations internationales.
Elle se distingue de la langue nationale, très généralement maternelle mais réservée, au sein d’un même pays, à un usage interne. 

La constitution suisse en offre une parfaite illustration avec quatre langues nationales (allemand, français, italien et romanche) et trois langues officielles (allemand, français et italien). Le romanche, langue nationale, bénéficie d’une existence juridique dans la région où on le parle (le canton des Grisons) mais, n’étant pas langue officielle, n’est pas reconnu dans les instances confédérales.

Si le statut de langue officielle, langue de fonctionnement de l’État, est parfaitement clair, celui de langue nationale est très variable d’un pays à l’autre.

En Afrique subsaharienne francophone, aux côtés du français reconnu dans tous les cas langue officielle, certains pays, comme le Burkina Faso, considèrent toutes leurs langues (70 au total) comme nationales.
D’autres, la Guinée ou la République démocratique du Congo, n’en retiennent qu’un nombre limité, respectivement huit et quatre.
D’autres encore, tel le Tchad et malgré l’existence d’une centaine de langues parlées, n’en retiennent aucune.

Un seul pays, la République centrafricaine, ayant décidé d’accorder à l’une de ses langues nationales, le sango, le statut de langue officielle aux côtés du français.

Voir aussi : Afrique, Bilinguisme institutionnel, ELAN, Kinshasa, Langues africaines.

Langue internationale

Contrairement aux concepts de langue officielle et de langue nationale, clairement identifiées au sein d’un Etat, celui de langue internationale en appelle davantage à l’arbitraire et relève, pour reprendre les termes de Louis-Jean Calvet, «plus de l’idéologie ou des rapports de force que de la science». 

On a coutume de considérer en effet comme internationales les langues retenues par les organismes internationaux (ONU,UNESCO, etc.) et plus précisément les six langues officielles des Nations unies, anglais, arabe, chinois, français, espagnol et russe.

Parmi celles-ci, deux se taillent la part du lion, l’anglais et le français, seules langues de travail du Secrétariat général de l’ONU mais également seules langues officielles du Comité olympique.
Situation particulière tenant notamment pour l’anglais, langue de la première puissance mondiale, à une situation réelle et pour le français, ancienne première langue diplomatique, à ce que l’on admet comme une sorte d’« avantage acquis » (Louis-Jean Calvet).

D’autres typologies  viennent cependant interférer dans cette classification :

  • Louis-Jean Calvet distingue ainsi la langue «hypercentrale», l’anglais, des langues dites «supercentrales», arabe, chinois, espagnol, français, hindi notamment.
  • Pierre Frath met en avant les langues qu’il qualifie d’«universelles», anglais, allemand, français, russe, seules en mesure d’exprimer toutes les connaissances de la modernité.
  • L’Université Laval enfin ne retient parmi les six langues officielles des Nations unies, qu’elle admet pourtant au rang des langues internationales, que l’anglais et le français, seules en mesure de «prétendre jouer un rôle véritablement supranational». 

On peut s’étonner par ailleurs qu’au nom d’un certain européocentrisme et d’une conception hiérarchisée  héritée pour une large part de la colonisation, soient  exclues des langues comme l’hindi,  le malais ou le swahili, langues nationales ou officielles de plusieurs pays, largement parlées et qui plus est enseignées en dehors de leur territoire.

Il en est de même mais pour des raisons politiques cette fois-ci avec le japonais et l’allemand, langues des vaincus, derniers représentants des forces de l’Axe à n’avoir pas été admis dans le cercle restreint des langues officielles des Nations unies.

Voir aussi : Colonisation, Frath (Pierre), Langues africaines, Modèle gravitationnel, Université Laval.

Langue maternelle

Il s’agit là d’une métaphore adoptée par la grande majorité des cultures européennes qui utilisent très communément cette même image, « idioma materno», « muttersprache», «mother tongue», etc.
Métaphore que l’on retrouve dans les langues africaines de façon encore plus expressive peut-être , « langue du sein », « du lait », etc.

D’autres cultures et d’autres pays, telle la Chine, l’assimilent non plus à la mère mais à la terre, au territoire.
La langue maternelle devient ainsi la « langue du pays racine », confusion que l’on retrouve dans certains de nos dictionnaires : « La langue maternelle peut donc être tantôt celle de la mère, tantôt celle de la mère-patrie ». (Dictionnaire Le Robert. 1959).

Et comme pour mieux entretenir cette ambiguïté, la langue maternelle pourra aussi n’être celle d’aucun des parents mais une «langue dominante à vocation véhiculaire dont la force s’impose jusque dans les familles» (Louis-Jean Calvet).
Ce sera le cas notamment en Afrique au sein de couples linguistiquement mixtes où la langue première ne sera alors bien souvent ni celle de la mère ni celle du père mais une langue soit endogène comme le wolof à Dakar ou le hawsa à Niamey, soit exogène, comme le français au Gabon.

Inversement, on pourra dans d’autres situations, parler de langue «co-maternelle» (Jean Berbané).
Citons le cas des Antilles françaises où des générations ont grandi, et continuent de grandir, dans un contexte que l’on peut qualifier de bilinguisme de naissance, sans que l’on puisse déterminer laquelle des deux langues, créole ou français, a été entendue et apprise avant l’autre.

De là peut-être l’idée de «langue matricielle» (Jean Berbané) profondément ancrée, in utero dirait-on, dans ce que nous avons de plus intime (mais n’est-ce pas là le propre de la langue maternelle ?) et qui ne manque pas, invariablement, de ressurgir tôt ou tard.

Quoi qu’il en soit, la langue maternelle demeure la langue acquise par un individu en tant que première langue, celle qu’il assimile et comprend le mieux, celle qui constitue la base de son raisonnement.

Voir aussi : Créole

Langue seconde

La langue seconde n’est pas la seconde langue enseignée, autrement dit celle que l’on nomme LV2, mas celle qu’on acquiert et qu’on utilise après sa langue maternelle.

Le concept, d’introduction récente, peut correspondre il est vrai à des réalités différentes.

L’anglais par exemple, largement utilisé dans les pays du Golf et dépourvu de tout statut officiel, y est considéré comme langue seconde.

Il en est de même pour le français, langue d’enseignement, des médias et surtout de l’entreprise dans les pays du Maghreb où il n’est pas langue officielle, mais où son acquisition est considérée comme indispensable.
Langue seconde également en Afrique francophone où, langue officielle cette fois-ci, il joue le rôle de trait d’union à l’échelle d’une partie du continent.

On parle plus communément de « langue seconde véhiculaire ».

Langue vivante – langue morte 

Mais de toutes les typologies, celle distinguant les langues vivantes des langues mortes apparaît , par son caractère immanent, comme la plus absolue.

Et pourtant.
Prenons le cas du latin.

Bien qu’il ne soit plus langue maternelle, il continue à être enseigné, compte parmi les langues officielles, celle de l’Église catholique après avoir été celle de l’Université et reste inscrit, de façon indélébile semble-t-il dans certains usages, juridique ou botanique pour ne citer qu’eux.

Et sans même évoquer un très étrange retour en grâce chez nos étudiants des cycles supérieurs, pourtant saturés d’anglicismes et se qualifiant désormais d’alumni, il est, quand bien même ne le relèverions nous plus, d’«alter ego» à «de facto», «idem» ou autre «et cætera», en permanence sur nos lèvres.

Et qu’il ne soit plus considéré comme une langue en développement au regard de la plupart des langues modernes n’a rien de convainquant  pour qui accepte de mettre en doute l’idée d’une hiérarchisation des langues telle qu’elle nous est présentée aujourd’hui.

Ce qui est vrai pour le latin l’est aussi pour le sanskrit, quand bien même correspondrait-il à une réalité beaucoup moins perceptible.

Un sanskrit, au-delà de quelques termes versés dans le langage courant et dont bien souvent, de Nirvāṇa à Saṃsāra, en passant par Karma, Dharma ou autre Sūtra, nous ignorons le sens véritable, un sanskrit donc, langue  véhiculaire aux confins de l’Inde, du Tibet et du Népal et langue liturgique des cultes  hindouistes et bouddhistes dont il serait vain de croire qu’ils ne perdurent qu’en Orient.

***

Et à bien y réfléchir, il eut été intéressant de demander aux premiers académiciens, alors qu’en 1694 ils apportaient une dernière note à leur Dictionnaire et en parachevaient la préface, s’ils considéraient le latin, bien qu’il ne soit plus «animé du son et de la voix des Peuples» mais qu’ils pratiquaient pourtant à la perfection et dont leurs écrits étaient truffés, comme une langue vivante ou morte :

…ces langues qu’on n’appelle Vivantes que parce qu’elles sont encore animées du son & de la voix des Peuples qui les parlent naturellement; au lieu que les autres Langues sont appellées Mortes, parce qu’elles ne sont plus parlées par aucune Nation ….

Langues africaines

On ne reviendra pas sur l’extrême morcellement linguistique de l’Afrique avec ses quelque 2 000 langues répertoriées à ce jour, 2 139 exactement selon les chiffres donnés par le Summer institute of linguistics sur son site Ethnologue.

Certaines ont une diffusion importante, comptant des millions, voire des dizaines de millions de locuteurs.

C’est le cas notamment du yoruba et du haoussa en Afrique de l’Ouest ou, plus encore, du Kenya au Mozambique, du swahili, la langue du « rivage ».
Elles sont alors écrites et sont langues nationales, voire, dans certains cas, officielles ou plutôt co-officielles.
On peut d’ailleurs s’étonner qu’au nom d’un certain européocentrisme, elles ne soient pas considérées comme des langues internationales, ce qu’elles sont bel et bien, mais comme des langues dites simplement « véhiculaires » ou plus communément « africaines ».

L’immense majorité reste cependant confinée à un niveau purement local, essentiellement non écrite et dépourvue de toute dimension administrative ou économique.

Langues africaines et européennes, pour ne parler ici que du français, cohabitent dans un contexte essentiellement pacifique, porteur d’une remarquable vitalité linguistique et débouchant sur une sorte de parler nouveau : français populaire africain ou français d’Afrique.
Cohabitation porteuse de ses propres mécanismes de réajustement, le français se confirmant comme langue maternelle dans les grandes agglomérations et certaines langues africaines, comme le wolof, tendant vers une « officialité » de fait.

L’enjeu essentiel se situe néanmoins dans l’introduction des langues africaines à l’école dans le cadre d’un enseignement dans la langue maternelle défini aujourd’hui comme une priorité mais dont la généralisation se heurte, pour l’instant, à de considérables difficultés d’application.

Voir aussi : Afrique, Colonisation, Elan, Kinshasa, Internet, Nouchi, Plurilinguisme, République Démocratique du Congo ou RDC.

Liban

L’image d’un Liban fer de lance de la francophonie au Proche-Orient pourrait ne plus être à l’ordre du jour.

L’un des socles de son implantation, son système scolaire bilingue traditionnellement franco-arabe, semble de plus en plus concurrencé par l’anglais. D’autres indicateurs, presse écrite, télévision, sites ministériels, paraissent confirmer ce revirement.
On assiste malgré tout à la mise en place d’autres leviers comme autant de mécanismes de compensation, parmi lesquels le glissement du français vers la communauté chiite, très liée, tant sur le plan économique que linguistique, à une Afrique francophone sur laquelle elle est fortement implantée.
Le français continue par ailleurs à s’appuyer sur un réseau (Alliances, Instituts et surtout AEFE) d’une particulière densité, ainsi que sur des initiatives émanant d’une société civile qui lui demeure très attachée.

Encore le Liban, à la différence du Québec, n’entretient-il avec le français que des liens d’amitié qui n’ont, comme chacun le sait, rien d’immuable et peut-être devrions-nous, à l’inverse d’une diplomatie parfois défaillante ou des Français eux-mêmes si friands de s’exprimer en anglais y compris en terrain francophone, faire en sorte de lui envoyer de tout autres signaux.

Voir aussi : Afrique.

Littératures francophones

Que ce soit dans les librairies, les chaires de littérature des grandes universités étrangères ou les manuels scolaires, ce n’est plus de littérature française dont il est question aujourd’hui, mais bel et bien de littératures francophones.

Les temps semblent révolus, pour qui s’en souvient, des Lagarde et Michard ne renvoyant que du bout des lèvres vers les littératures «de langue française» et ne réservant les honneurs de leurs volumes qu’aux «grands auteurs français».

Car sur une scène où la France, métropolitaine ou ultra-marine mène encore le bal, on rencontre des Belges bien sûr, des Suisses, des Canadiens, Québécois ou non, des Haïtiens, des Congolais et, comment désormais l’oublier, des Sénégalais, ce qu’ André Lagarde et Laurent Michard, encore eux, auraient qualifié de «littératures nationales d’écriture française».

Mais on y croise également, ce qui est plus étrange et pour ne citer qu’eux, des Russes, des Cubains, des Vietnamiens, des Chinois, des Afghans, des Slovènes, des Danois ou encore des Hongrois.

Et dans cet univers, est-il parcours plus surprenant que celui du franco-américain Jonathan Littell qui, dans une démarche non sans analogie avec celle de Louis Wolfson, choisit le français pour des « Bienveillantes » dont il refusera même d’assurer la traduction vers l’anglais ?

Destin plus inattendu que celui de l’Afgan Atiq Rahimi qui décide, un beau jour, de délaisser le persan, langue de ses premiers romans pour le français?

Et histoire plus fascinante que celle d’un Akira Mizubayashi qui, «né au Japon de parents japonais», quitte son pays pour une langue à laquelle rien ne le rattache puis rentre chez lui, reprend des apparences de vie quotidienne pour, quarante ans plus tard, se mettre à écrire en français ?

Ne pourrait-on, dès lors, adapter le scenario des trois cercles imaginé par Braj Kachru non plus à une langue, quelle qu’elle soit et à ses schémas d’influence mais à une littérature francophone et ses cercles concentriques, hexagonal, natifs et, pourrait-on dire, allophones ?

Loi du 4 août 1994 dite loi Toubon

La Loi du 4 août 1994, « relative à l’emploi de la langue française » plus connue sous le nom de loi Toubon, du nom du ministre de la culture de l’époque, considère la langue française comme « un élément fondamental de la personnalité et du patrimoine de la France ». 

Elle s’appuie sur l’article 2 de la Constitution qui dispose que « la langue de la République est le français » et crée l’obligation d’une rédaction en français pour tout ce qui touche notamment au droit du travail, à la consommation ou encore à la communication.
Elle a également le mérite, bien avant l’heure, de poser les jalons du multilinguisme en introduisant le principe de la double traduction et en proposant comme objectif l’apprentissage d’au moins deux langues étrangères à l’école.

Portée, en dépit d’une violente campagne d’opinion, par Catherine Tasca puis son successeur Jacques Toubon, elle fait suite à la loi dite Bas-Lauriol (du député Pierre Bas et du sénateur Marc Lauriol) du 31 décembre 1975 relative à l’emploi de la langue française dont elle élargit fortement le champ d’application.
Alors que la loi du 31 décembre 1975 traite essentiellement de l’emploi du français dans l’activité commerciale, le nouveau texte étend son application aux relations internationales,  à la vie des entreprises,  l’enseignement supérieur et  la recherche et enfin  l’audiovisuel.

Près de 30 ans après sa promulgation, on peut estimer que la loi a rempli son office dans le domaine du travail, les salariés ayant droit à un contrat rédigé en français et celui de la consommation, la présentation des produits, le mode d’emploi et la garantie étant également rédigés en français.

Elle est en revanche partiellement voire totalement contournée à l’Université par les amendements introduits par la loi Fioraso, dans les services publics ainsi que, de toute évidence, dans la communication et la publicité.

Voir aussi : Constitution du 4 octobre 1958, DGLFLF, Politique linguistique, Tasca Catherine

Loi du 4 août 1994 dite loi Toubon (suite)             

Malgré des dispositions d’ordre public et des règles affirmées comme relevant de l’intérêt général, on ne peut que constater un décalage entre les intentions initiales du législateur et la mise en œuvre de la loi, notamment devant les tribunaux.

Si la loi Bas-Lauriol péchait par un régime de sanctions mal adapté, celle de 1994 bénéficie de sanctions diversifiées et de modalités de contrôle originales.
Parmi celles-ci, citons l’introduction des associations dans le champ juridictionnel aux côtés des acteurs institutionnels, DGLFLF notamment, dont la compétence de principe est ici réaffirmée.

Et pourtant, force est de constater que ces déclarations de principe dissimulent une réalité  différente, les associations assumant en pratique seules la charge des poursuites.
Associations qui déplorent un manque de soutien et sont souvent démunies face à des adversaires, collectivités ou établissements publics, bien mieux armés pour supporter la charge d’un combat juridictionnel lourd, technique et par là même très coûteux.

Mais sans doute faudra-t-il voir ici une nouvelle illustration d’un positionnement étatique que l’on ne peut qualifier que d’ambivalent, très représentatif, sur le fond, de la place accordée au fait francophone. 

Au final, des procès remportés dans des affaires marquantes mais également nombre de désillusions sur des attendus d’une subtilité parfois déroutante.

Pour davantage de détails, voir notamment  ma communication sur ce thème :  https://yvon-francophonie.com/2019/10/05/contentieux-application-loi-toubon-associations/(ouvre un nouvel onglet)

Voir aussi : AFRAV, Charte des droits et libertés du Canada, DGLFLF, Loi Fioraso.

Loi du 22 juillet 2013 dite loi Fioraso

Parmi les textes relatifs à l’usage de la langue française, rares sont ceux ayant donné lieu, aux côtés de la loi Toubon, à de telles luttes d’influence, de tels amendements et sans doute aussi une telle désinformation.

Les enjeux, il faut dire sont considérables : légaliser, au mépris d’un Code de l’éducation pourtant dénué de toute équivoque (« La langue de l’enseignement, des examens et concours, ainsi que des thèses et mémoires dans les établissements publics et privés d’enseignement est le français … »), légaliser donc une pratique consistant à proposer des cursus et des diplômes entièrement en anglais.

Pratique que la loi Fioraso, du nom de la ministre de la recherche et de l’enseignement supérieur de l’époque, au nom d’une modernisation de l’Université dans laquelle elle s’inscrit, cherche dans un premier temps à entériner.

Il faudra toute la vigilance des politiques et du milieu associatif pour introduire, aux côtés de la possibilité d’un enseignement en langue étrangère, nombre de restrictions (nécessités pédagogiques, enseignement en langue étrangère partiel et non exclusif, formations en français pour les étudiants étrangers ne le maîtrisant pas suffisamment, contrôle du ministère de la culture) et sauvegarder ainsi l’esprit de la loi Toubon.

Texte d’une lecture pouvant néanmoins s’avérer subtile, suffisamment pour que la presse, commentant ainsi le projet de loi et non les amendements, ne clame que les universités allaient désormais pouvoir enseigner en anglais et enfin « rattraper (leur) retard ».
Annonce dont l’effet s’avéra désastreux auprès des milieux universitaires francophones à l’étranger.

Suffisamment subtile ou ambiguë également pour le juge lui-même et motiver des rejets au regard du « caractère international de l’enseignement », notion ne prenant appui ni sur la nationalité des enseignants, ni sur celle des élèves et semblant jouer en l’occurrence sur la confusion entre caractère international et renommée internationale.
(TA Paris. ALF c/Ecole normale supérieure, Polytechnique et faculté d’Orsay. 2017).

Une loi en somme méconnue pour les uns, détournée pour les autres, en un mot non appliquée.

Résultat selon Pierre Frath, en 2017, 951 masters entièrement en anglais et 315 partiellement dans cette langue.
C’est beaucoup, mais si les chiffres depuis n’ont pu qu’augmenter, l’enseignement en anglais reste minoritaire.

C’est exactement l’inverse en Allemagne, aux Pays-Bas ou encore au Danemark où l’enseignement en anglais est la règle et l’enseignement en langue locale, quand il n’a pas disparu, l’exception.

Pour davantage de détails, se reporter aux développements de Pierre Frath dans son ouvrage « Anthropologie de l’anglicisation » auquel cet article fait référence.

Voir aussi : Enseignement supérieur, Loi Toubon.

Lois du 30 juillet 1974 (Loi 22) et du 23 août 1977 (Loi 101)

Les lois du 30 juillet 1974 dite loi 22 et du 23 août 1977 dite loi 101  sont les plus connues d’une série de textes initiée en 1969 « pour promouvoir la langue française au Québec » et visant à faire reconnaître puis instaurer la primauté du français.
Elles sont aussi les plus représentatives d’une époque de renouveau identitaire symbolisée par les ères Bourassa et Lévesque, premiers ministres respectivement libéral et péquiste (parti québécois) de 1970 à 1994.

En instaurant la priorité donnée aux inscriptions dans les écoles françaises et en imposant l’usage du français dans l’affichage public, la publicité commerciale et dans l’entreprise, la loi du 30 juillet 1974 fait du français la langue officielle du Québec, désormais seule province unilingue francophone du Canada.
Son retentissement fut considérable et pour qui s’en souvient, à travers ses dispositions relatives à la francisation des entreprises dont plusieurs, bien souvent dirigées par des anglophones, ne fonctionnaient qu’en anglais, elles souleva la colère de l’élite anglophone dont une partie quitta Montréal pour la province voisine de l’Ontario.

La loi du 23 août 1977 ou loi 101, communément désignée sous le nom de Charte de la langue française, renforce l’ensemble de ces dispositions et constitue aujourd’hui encore le socle de la politique linguistique du Québec.

Il apparaît cependant, et l’ensemble des observateurs s’accorde sur ce point, que cette loi, pensée peut-être, comme le souligne Jean-Benoît Nadeau « pour être appliquée dans le contexte d’un Québec indépendant où le français serait la langue de la majorité nationale et où l’anglais serait celle d’une minorité québécoise» doive être, aujourd’hui, réécrite.

Évalué à l’aune de ce que sont aujourd’hui le Québec et la ville de Montréal, force est de constater cependant que le texte a joué un rôle majeur, sinon déterminant, dans l’évolution du fait francophone au cours de ces quatre dernières décennies.

L’anglais n’est pas à la veille de disparaître des rues d’Amsterdam, de Paris ou de Montréal comme langue d’échanges avec des tiers mais l’une des conséquences heureuses de la loi 101 est que les Québécois peuvent aujourd’hui s’approprier l’anglais sans avoir à craindre de perdre leur âme. 

(Mario Polèse)

Voir aussi : Canada, Charte des droits et libertés, Constitution du 4 octobre 1958, Montréal, Office québécois de la langue française, Politique linguistique, Québec.

Louisiane

Nulle situation n’est plus difficile à appréhender que celle du français en Louisiane :

  • Recensements imprécis ne permettant pas d’évaluer avec certitude un nombre de francophones pourtant estimé entre 190 000 et 250 000, soit entre 4 % et 5 % de la population.
  • Cercles différents regroupant sous une même dénomination Créoles blancs, Créoles noirs, Houmas (Amérindiens francophones) et enfin véritablement Cadiens.
  • Histoire chaotique sur fond d’assimilation et de stigmatisation conduisant à la dévalorisation et au mépris de soi et dont les effets sont toujours ressentis à travers « la honte », aujourd’hui encore à peine surmontée, de parler français en public.

On observe pourtant l’émergence d’un processus de revendication identitaire, essentiellement portée par une jeune génération enfin prête à assumer sa singularité.

Mouvement de reconstruction entamé dès la fin des années 1960 avec la création du CODOFIL, la reconnaissance d’un État bilingue  ou celle d’un territoire, l’Acadiane.

Mouvement poursuivi aujourd’hui  encore à travers l’explosion des classes d’immersion en français ou la récente adhésion, en octobre 2018, de la Louisiane à l’OIF, adhésion portée par un État soudain très attentif au potentiel économique de l’usage d’un français semble-t-il remis à l’ordre du jour.

Voir aussi : Acadiane, Cadiens, CODOFIL, Domengeaux (James), Maine, Politique linguistique, Stephen King, Université Sainte-Anne.

Lycée français de Koweït

Situé au nord de la péninsule arabique, entre Irak et Arabie Saoudite, le très opulent Koweït s’étend sur un territoire restreint, équivalent à environ la moitié de la Belgique.
Un Koweït, ancien protectorat britannique, où le poids conjugué des influences américaine et britannique reste considérable à travers un anglais langue seconde véhiculaire, en passe parfois de se substituer à la langue locale.

Au cœur de Koweït City, « LFK » (la marque est déposée), autrement dit le Lycée français de Koweït, est l’un des 520 établissements du réseau AEFE et sans doute l’un des plus remarquables.

Etablissement privé propriété de l’État koweïtien, mis à disposition sous couvert d’une licence d’exploitation commerciale du docteur Al Rashed et de son épouse, madame Al Khaled, lesquels associent progressivement leurs filles Hessa et Yazi, anciennes élèves et parfaitement francophones, à la gestion de l’établissement.

Un accord de partenariat signé avec l’AEFE garantit sa reconnaissance officielle par le ministère de l’éducation nationale.

La langue d’enseignement y est le français avec, de la maternelle à la terminale, 1400 élèves dont 12 % de nationaux, 15 % de français et une trentaine d’autres nationalités, une équipe éducative à dominante libanaise et syrienne et un enseignement, porté par un degré d’exigence sans équivalent, pouvant être aisément qualifié d’excellence.

Il m’a été donné d’assister  à deux cours de 4éme, tous deux assurés par des enseignantes libanaises, l’un de français où les élèves  discouraient de façon ahurissante sur le concept d’inexorable dans le théâtre de Racine et l’autre de sciences et vie dans lequel la maîtrise du programme et des termes techniques m’ont paru sans équivalent pour des élèves de cet âge.

Car ne nous y trompons pas, cet établissement, sorte de creuset de la meilleure société d’une ville très anglicisée, qui rassemble le gratin de Koweït City, truste les récompenses et semble écraser la concurrence, forme ici en français la future ou plutôt l’une des futures élites mondiales, de celle qui occupera les postes-clef dans le monde de demain et constituera l’ossature de cet invisible mais tout à fait réel réseau d’influence tel qu’il semble aujourd’hui et de plus en plus caractériser la francophonie.

Voir aussi : AEFE, Enseignement du français, Influence.

M comme Maghreb

Maghreb (Article rédigé par Yves Montenay)

«Maghreb» est un mot arabe qui signifie «le couchant», souvent traduit par «l’Occident» sous-entendu «du monde arabe» et dont l’autre partie s’appelle «le Machrek» c’est-à-dire «le levant» souvent traduit par «l’Orient». Les Français disaient «Afrique du Nord». Il comprend au moins le Maroc, la Tunisie et l’Algérie, mais certains y adjoignent la Mauritanie et la Libye. 

À part dans ce dernier pays et bien qu’aucun recensement ne permette de chiffrer cette situation, la langue française est assez répandue, comme langue familiale dans la bourgeoisie et comme langue de travail pour une grande partie de la population.
Le français est pourtant considérée comme une langue étrangère (depuis peu en Mauritanie), la langue officielle étant l’arabe standard qui est écrit mais en général non parlé, les langues d’usage courant étant, par ordre d’importance, « l’arabe dialectal » (darija), les langues berbères et le français.

Le terme «Afrique du Nord» est revendiqué par une part de la couche «moderniste» de la population qui rejette l’héritage arabe et parfois l’islam. Cette part est globalement très minoritaire, sauf dans la diaspora.

Cette dernière a une frange très qualifiée, «les meilleurs cerveaux» fuyant l’échec économique et les pesanteurs politiques et religieuses.
Cette diaspora se trouve principalement dans les pays francophones du Nord (France, Belgique, Québec) mais également dans le reste du Canada, aux États-Unis et en Allemagne sans parler de ceux qui travaillent dans les pays pétroliers. 

La diaspora française réunit entre 3,5 et 6 millions de personnes suivant la méthode d’évaluation retenue (Combien de générations ? Avec ou sans les enfants de couples mixtes ? …).
Elle semble être très majoritairement francophone de langue familiale.

( Voir les détails sur https://www.yvesmontenay.fr/2015/12/30/darija-francais-arabe-tamazigh/ et https://www.yvesmontenay.fr/2019/12/05/anglicisation-au-maghreb-une-erreur-strategique/

Voir aussi : Algérie, Colonisation, Guerre des langues.

Maine

Aborder le Maine à travers la notion de francophonie, voire plus modestement de francophilie, peut sembler hasardeux.

Peu d’études sont consacrées au sujet et on se heurte à un manque de visibilité pour des communautés dispersées, un fait francophone non reconnu et encore moins institutionnalisé.
On est loin ici de la Louisiane, terrain attitré, clairement identifié de la francophonie américaine.
Ici, pas d’Acadiane, de Cajuns, de bayous, pas d’instrumentalisation non plus pour un État du Maine qui, contrairement à son homologue du Sud, ne compte pas sur le français pour renflouer ses caisses.

Et pourtant, près d’un tiers des habitants est d’ascendance française et, selon le Centre d’héritage franco-américain de Lewiston, 7 % des familles parlent français à la maison, ce qui ne semble pas être le cas en Louisiane.
Qu’on soit dans le sud, entre Biddeford et Lewiston, ou au nord, entre Québec et Nouveau-Brunswick et qu’il s’agisse de familles d’ascendance française ou (là encore) des nouveaux immigrants africains, tout le confirme, après des décennies de stigmatisation, le français est à nouveau à l’honneur.

Il semble que l’on n’ait plus «honte» de parler français, qu’on le transmette désormais à ses enfants, témoin, miracle de survivance, cet aveu en forme de promesse :

Je rêve en français

Voir aussi : Acadiane, Louisiane, Politique linguistique, Stephen King, Université Saint-Anne.

Maurice (Ile)

Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’en matière linguistique, les autorités mauriciennes font preuve de pragmatisme.

Pragmatisme traduit par une double adhésion au Commonwealth et à l’OIF mais également par une politique linguistique aux contours ambigus où l’anglais apparaît comme la langue de l’État mais où le français est autorisé : «La langue officielle de l’Assemblée est l’anglais, mais tout membre peut s’adresser à la présidence en français» (Constitution de 1968 – article 49).
Pragmatisme tenant compte des réalités d’un pays multi-ethnique et plurilingue où s’entrecroisent anglais, créole, français et, à un degré moindre, bhodjpouri, mais dans lequel le créole, parlé et compris par plus de 90 % des mauriciens, tient une place prépondérante.

Et c’est précisément en raison de ses similitudes avec le créole mauricien que le français reste la langue la mieux comprise et, deuxième langue dans les faits après le créole, apparait comme nettement majoritaire dans la presse et la vie économique.

À tel point, nous rapporte Yves Montenay, que c’est en français que la très britannique banque Barclays choisit de faire l’annonce de ses produits d’épargne.

Minorités francophones du Canada

Contexte canadien jugé peu accessible, manque de légitimité, j’ai longtemps estimé qu’il ne m’appartenait pas de m’exprimer sur les minorités francophones du Canada.

Toutes pourtant, de la Nouvelle-Ecosse à la Colombie-Britannique, confrontées au même principe de réalité, font face à des défis et à des enjeux très objectivement mesurables :

  • Celui de l’immigration, la quasi-totalité des immigrants venant s’installer au Canada hors Québec étant non-francophone.
  • Celui des transferts linguistiques, autrement dit, par le jeu  des mariages exogames, de la non-transmission de la langue d’une génération à l’autre, non-transmission estimée selon les cas à 40%.
  • Celui enfin du non-respect des lois et engagements constitutionnels proclamant un principe d’égalité  souvent mis à mal par le biais des résistances, des forces contraires quand il ne s’agit pas de ce qu’il faut bien considérer comme le refus ou la négation de l’autre.

Pour toutes il est question d’insécurité linguistique, discrimination, auto dévalorisation, voire «haine» (Christian Bergeron), de «silence» et d’ «isolement» (La nouvelle plume), chacun exprimant avec ses mots, son ressenti, son vécu ou son histoire les différences facettes d’une seule et même réalité.

Une chose cependant est frappante dans cette quête de reconnaissance, cette revendication d’un droit à la différence et cette non moins légitime affirmation de soi :

Les associations franco-canadiennes sont anciennes, début XX éme pour la plupart et pour certaines, «Association communautaire fransaskoise , «Association canadienne-française de l’Alberta» (ACFA) ou «Association canadienne-française de l’Ontario» (ACFO), revendiquent un  lien d’appartenance à peine dissimulé. 

Les drapeaux sont plus récents mais tous, ou presque, porteurs des mêmes symboles, «bleu  blanc rouge» ou fleur de lys.

Voir aussi : Canada, Charte des droits et libertés du Canada, Ontario, Saskatchewan. 

Mission laïque française

Le réseau scolaire français à l’étranger comptait, au 31 décembre 2020 et selon  le ministère de l’Education nationale, 540 établissements implantés dans 140 pays accueillant, de la maternelle à la terminale, 370 000 élèves.

Il repose essentiellement sur deux structures :

  • L’Agence pour l’enseignement du français à l’étranger (AEFE), établissement public placé sous la tutelle du ministère des Affaires étrangères et qui assure le pilotage du dispositif.
  •  La Mission laïque française (MLF), association reconnue d’utilité publique liée par convention avec les ministères de l’Education nationale et des Affaires étrangères.

Tout comme l’AEFE, la Mission laïque assure une mission de service public au service de la scolarisation des jeunes Français et des jeunes nationaux mais également une mission d’influence au service de la langue et de la culture françaises.
Historiquement implantée sur le pourtour méditerranéen où se concentrent 56 % de ses élèves, elle compte aujourd’hui 112 établissements scolarisant plus de 60 000 élèves dans 41 pays.

Ses trois principaux établissements, le Lycée Louis-Massignon de Casablanca (4400 élèves), le Grand lycée franco-libanais de Beyrouth ( 3500 élèves) et le Lycée français international de Dubaï (2300 élèves) totalisent plus de 15% des effectifs.

Les plus anciens sont l’École française de Thessalonique (1906), le Grand lycée franco-libanais  précité (1909) et le Lycée Abdel-Kader de Beyrouth (1910), le Liban étant le pays le plus représenté avec 10 des 112 établissements que compte la Mission.

Tout comme l’AEFE enfin, la Mission laïque accueille une forte proportion (entre 65 et 80 %) d’élèves étrangers pour un niveau d’excellence et un taux de réussite comparables.

Voir aussi : AEFE, Alliance Française, Colonisation, Enseignement du français, Institut français, Influence.

Modèle gravitationnel

Prenant appui sur les propositions du néerlandais Abraam de Swaan, le modèle gravitationnel est une représentation abstraite des rapports entre langues imaginée en 1999 par  Louis-Jean Calvet sous la forme d’une organisation pyramidale  découlant du principe selon lequel les langues sont reliées entre elles par des systèmes de bilinguisme hiérarchisés sous-tendus par des rapports de force.

Cette organisation s’articule autour d’une langue «hyper-centrale», l’anglais dont les locuteurs ont une forte tendance au monolinguisme.
Autour d’elle gravitent une dizaine de langues dites «super-centrales», arabe, chinois, espagnol, français, hindi notamment dont les locuteurs, lorsqu’ils acquièrent une seconde langue, apprennent soit l’anglais soit une langue de même niveau.
Elles-mêmes sont à leur tour pivot de cent à deux cents autres langues, dites «centrales» autour desquelles gravitent cinq à six mille langues «périphériques».

Louis-Jean Calvet cherche  à démontrer, à travers ce modèle dont le bilinguisme est le ciment, que les langues les plus menacées sont les langues «périphériques»,  tout à la fois dominées par les grands groupes linguistiques eux-mêmes dominés par l’anglais, mais également langues dont la transmission est rendue aléatoire par le fait qu’elles ne sont jamais ou quasiment jamais langues secondes.

Par le jeu d’un même parallélisme des formes, Louis-Jean Calvet transpose ce principe à ce qu’il nomme «la galaxie» ou « la gravitation des écritures ».

Il définit ainsi un «système hyper-central», l’alphabet latin, des «systèmes centraux», les alphabets arabe, cyrillique, dévanagari et chinois et des «systèmes périphériques», les utilisateurs des systèmes périphériques ayant une tendance au bigraphisme voire au trigraphisme, ceux des systèmes centraux, une tendance au bigraphisme et ceux de l’alphabet latin étant généralement monographes.

La question qu’il pose est, là aussi, celle de la permanence des systèmes dominés.

Voir aussi : Calvet (Louis-Jean), Guerre des langues, Langue internationale, Traduction.

Molière (langue de …)

Et si la langue de Molière n’était plus la langue de Molière ?

Et si les ponts étaient d’ores et déjà rompus entre les langues d’hier et celle d’aujourd’hui ?

Que reste-t-il après tout de ce français classique, pure invention empreinte d’on ne sait quelle nostalgie, dont l’orthographe, la grammaire et les tournures variaient d’une édition à l’autre ?

Que reste-t-il d’une graphie abandonnée, de ses tildes au-dessus des voyelles, ces « moy » et ces « roys », d’une grammaire où le nom s’emploie sans article, de ces mots disparus et de ceux, toujours vivants mais qui, de « penser » à « connaître », « transport » ou « alarme », s’entendent aujourd’hui dans un tout autre sens, ou d’une prononciation aussi peu compréhensible que désuète, à une époque où le simple accent non parisien prête encore à sourire ?

Et pendant combien de temps, comme nous le faisons pour Rabelais ou François Villon, lire et dire Molière sans traduction sera-t-il encore possible ?

Car notre langue n’est plus celle de Molière et encore moins de Montaigne, ses gentils-femmes, ses loix et ses maistres.

N’est ce pas là sa richesse et à tout prendre, ne serait-ce pas « en abordant sa propre langue comme une langue étrangère qu’on saisit son fonctionnement et qu’on entre véritablement dans ce qu’elle a à nous dire » ?

Cette réflexion s’appuie sur le manifeste « Les linguistes atterrés » porté par Antoine Gallimard et son discours séduisant pour ne pas dire rassurant sur notre langue, ses usages, « son immense vitalité et sa fascinante et perpétuelle faculté à s’adapter au changement ».

Moncton

Située au sud-est de la province, à proximité de la baie de Fundy, Moncton, 144 000 habitants dont 33% de francophones, est la plus grande agglomération du Nouveau-Brunswick et par voie de conséquence d’Acadie, communauté au sein de laquelle elle joue un rôle majeur.

Son université, l’une des deux universités francophones d’Acadie avec Sainte-Anne en Nouvelle-Écosse est, avec ses 5 000 étudiants, la plus grande université exclusivement francophone du Canada hors Québec.
Moncton accueille chaque année le festival international du cinéma francophone en Acadie et fut l’hôte en 1994 du premier «congrès mondial acadien» ainsi qu’en 1999 du VIIIe sommet de la Francophonie.

L’ironie de l’histoire veut qu’elle doive son nom (sans « k » toutefois, bien maigre consolation) à Robert Monckton, officier de l’armée britannique et administrateur colonial en Amérique du Nord, personnage controversé pour le rôle qu’il joua dans la déportation des Acadiens en 1755. 

Voir aussi : Acadie, Grand Dérangement, Jeux de la francophonie, Nouveau-Brunswick, Université Saint-Anne.

Montenay (Yves)

Yves Montenay est un vieux routier de la francophonie qu’il pistait déjà au collège lors des années 1950 dans la toponymie des Antilles puis dans les livres d’histoire. Dès 1963 il assiste à la «révolution tranquille» au Québec et à ses débuts en Acadie.

Depuis, ses voyages se sont multipliés, tant pour explorer la situation du français et des langues locales qu’à l’occasion de colloques lui permettant de rencontrer les différents acteurs du monde francophone.
Ses communications dans ce domaine se trouvent sur son site Yvesmontenay.fr et son dernier essai, «La langue française : une arme d’équilibre de la mondialisation» est l’un des ouvrages de référence en la matière.

Diplômé de l’École centrale de Paris et titulaire d’un doctorat de démographie politique, ancien chef d’entreprise, Yves Montenay est également un spécialiste de l’économie du développement et du monde musulman et sa description de la situation du français s’intègre dans une vue d’ensemble historique, économique et sociale.

https://www.yvesmontenay.fr/tag/francophonie

Montréal

Montréal est et a toujours été cosmopolite.
Capitale économique du Québec, la langue officielle y est par nature le français.
Forte d’une agglomération de 4, 2 millions d’habitants, elle se situe au 4e rang des plus grandes villes francophones derrière Kinshasa, Paris et Abidjan, maintenant talonnée par Yaoundé et Casablanca.

Les francophones y représentaient au dernier recensement (2016) 78,1 % de la population contre 77,6 en 2011, les banlieues étant plus francophones que le centre et l’ouest, relativement anglophone.

La question essentielle, ainsi que le doute toujours en suspens, tient cependant aux équilibres linguistiques mais  il semble que l’on n’ait jamais autant parlé français à Montréal comme le démontrent les recensements précités, le taux particulièrement élevé d’inscriptions en écoles françaises ou encore la prépondérance des indications officielles et des enseignes en français.

Seuls encore une fois les Français, régulièrement pointés du doigt comme utilisant l’anglais par snobisme, semblent de nature à susciter de nouvelles interrogations.

Voir aussi : Acadie, Canada, Lois du 30 juillet 1974 et du 23 août 1977, Québec, 

Mushikiwabo (Louise)

Louise Mushikiwabo est née au Rwanda en 1961.

Après des études aux États-Unis elle rentre en Afrique, en Tunisie, puis au Rwanda où elle devient ministre de l’Information puis, de 2009 à 2018, ministre des Affaires étrangères du très décrié Paul Kagame.

À l’occasion du Sommet d’Erevan et malgré les nombreuses réserves suscitées par cette candidature, elle se porte candidate à la fonction de secrétaire générale de l’OIF.

Élue avec le soutien de la France, elle succède, le 1er janvier 2019, à la Canadienne Michaëlle Jean.

Voir aussi : Jean (Mickaëlle), OIF, Rwanda.

N comme Normalisation

Normalisation

Avec plus de 23 000 normes internationales référencées à ce jour, la normalisation reste un excellent indicateur de positionnement des langues.

Et à ce titre le français n’est pas en reste : langue officielle de l’ISO (Organisation internationale de normalisation) avec l’anglais et le russe et du CENELEC (Comité européen de normalisation en électronique et en électrotechnique) avec l’anglais et l’allemand, sa position n’est pas remise en cause.

Ces dernières années ont cependant accompagné la montée en puissance de deux nouveaux acteurs, l’espagnol, supplantant parfois le russe dans les documents officiels, et le mandarin qui poursuit une progression entamée depuis les années 2000.

On notera l’aboutissement d’un projet porté par la DGLFLF avec la publication, en avril 2019, d’une norme relative à un nouveau modèle de clavier dit «azerty amélioré» intégrant dorénavant certaines spécificités du français telles que les ligatures œ et æ ou encore les guillemets dits «français» à double chevron.

Voir aussi : Chine, Protocole de Londres sur la non-traduction des brevets européens.

Nouchi

Le nouchi, du malinké «nou», le nez et «chi», poil, est apparu au début des années 1970 dans les banlieues déshéritées d’Abidjan.

Langue de la rue, des marginaux et des déscolarisés, il évolue aujourd’hui vers une certaine reconnaissance culturelle, voire institutionnelle.
Quel que soit le nom qu’on voudra lui donner, argot ou langue à part entière, le nouchi est un parfait exemple du caractère évolutif des langues et illustre les mécanismes d’hybridation ou d’interpénétration entre le français et les langues africaines, malinké, baoulé et dioula notamment.

Il n’est pas, à ce titre, sans faire penser au créole dont il présente les mêmes caractéristiques, base lexicale et système phonologique très proches du français, ainsi qu’une même aptitude, par certaines tournures ou expressions, à une inventivité et une créativité propres.

Voir aussi : Afrique, Côte d’Ivoire, Créole,  Langues africaines.

Nouveau-Brunswick

Le Nouveau-Brunswick est la plus étendue et, avec ses 777 000 habitants dont 240 000 francophones, la plus peuplée des provinces maritimes.

Elle offre la particularité d’être la seule province officiellement bilingue du Canada et représente le cœur de l’Acadie dont elle concentre l’essentiel de la population sur un territoire relativement homogène englobant, de Moncton au Madawaska, les bordures Est et Nord de la province.

Son histoire encore récente  retiendra le nom de Louis Robichaud, premier ministre de 1960 à 1970 et qui, durant ces dix années, joua un rôle déterminant dans la reconnaissance des droits des francophones, tant à travers l’adoption de la Loi sur les langues officielles de 1969 qu’à travers sa contribution à la fondation de l’Université de Moncton.

Un Nouveau-Brunswick francophone toujours présent sur la scène internationale mais qui, selon Ilyès Zouari, président du CERMF, avec un taux désormais inférieur à 1,4 enfant par femme, devra savoir répondre au défi de la natalité ainsi qu’à celui de l’immigration, l’immigration francophone  pesant aujourd’hui très faiblement dans la part totale des immigrants.

Voir aussi : Acadie, Canada, Minorités francophones du Canada, Moncton, Ontario, Politique linguistique, Québec, Université Saint-Anne.

O comme Observatoire européen du plurilinguisme

Observatoire européen du plurilinguisme ou OEP

Structure associative créée en 2005 par Christian Tremblay, l’OEP s’appuie sur les secteurs stratégiques, décideurs, chercheurs, enseignants et chefs d’entreprise afin de préserver, autour d’une «Charte européenne du plurilinguisme», la diversité linguistique et culturelle.

Il propose notamment des analyses d’une grande pertinence sur les progrès de la traduction assistée par ordinateur ainsi que sur les méfaits de la prééminence de l’anglais au sein de l’Union européenne.

L’OEP organise une manifestation internationale triennale, les Assises européennes du plurilinguisme, publie  une lettre d’information très largement diffusée et anime un site présentant, en une dizaine de langues, l’actualité de la recherche et une revue de presse internationale consacrée au plurilinguisme sous ses différents aspects, notamment culturels, sociaux et économiques.

Observatoire de la langue française

Directement rattaché à l’OIF, l’Observatoire de la langue française a pour mission de recueillir et analyser les données relatives à la place et aux usages du français dans le monde.

Il publie  tous les quatre ans un rapport, « La langue française dans le monde », qui fournit à travers chiffres, analyses et projections, un état de la situation du français dans les domaines de l’enseignement, l’économie, la culture, les médias et Internet.

Cette publication, au caractère très institutionnel et largement relayée par les médias, sert de référence commune aux  pays membres de l’OIF ainsi qu’à un grand nombre de travaux et études.

Son directeur est Alexandre Wolff.

Voir aussi : OIF

Observatoire démographique et statistique de l’espace francophone ou ODSEF

Réseau scientifique international, l’ODSEF est né en 2009 d’un engagement pris par le premier ministre du Québec à l’occasion du XIIe Sommet de la Francophonie.

De droit québécois, il bénéficie des financements  du ministère québécois des relations internationales, de l’agence universitaire francophone et de l’OIF. L’Université Laval donne accès à ses ressources documentaires, ses locaux et équipements et assure la direction scientifique du projet.
Ses travaux portent essentiellement sur l’évolution démographique de l’espace francophone dans sa dimension politico-administrative (pays ayant le français comme langue officielle).

Les résultats de ses recherches sont mis à la disposition de l’OIF et alimentent le rapport quadriennal de l’Observatoire de la langue française.

Son directeur est Richard Marcoux

Voir aussi : Agence universitaire francophone, Espace linguistique, Québec, Université Laval

Office québécois de la langue française ou OQLF

La création, le 24 mars 1961 sous le gouvernement libéral de Jean Lesage, de l’Office québécois de la langue française, répond à une vieille revendication des milieux nationalistes.

Organisme d’État rattaché au ministère des Affaires culturelles, l’OQLF cherche à ses débuts à établir une norme pour le français parlé et écrit :

Cap sur le français international, promotion des canadianismes de bon aloi et lutte contre les anglicismes, (…) normalisation de la langue au Québec et intervention de l’État pour mettre en œuvre une politique globale de la langue qui tiendra compte notamment de l’importance de la motivation socio-économique pour faire du parler français la langue prioritaire au Québec.

Les lois du 28 novembre 1969 et du 23 août 1977 dite Charte de la langue française vont par la suite élargir ses missions.
L’OQLF se verra ainsi attribuer la responsabilité de la conduite de la politique québécoise en matière d’officialisation linguistique,  terminologie et francisation de l’administration et des entreprises ainsi que, depuis les accords Bourassa-Chirac du 5 décembre 1974, le pilotage de la coopération avec ses homologues français.

Fidèle à ses compétences d’origine, il publie tous les cinq ans un rapport sur l’évolution de la situation linguistique et contribue au Grand dictionnaire terminologique (GDT), équivalent québécois de la base terminologique FranceTerme alimentée par la Commission d’enrichissement de la langue française avec laquelle il collabore étroitement.

Voir aussi : Accords Bourassa-Chirac, Canada, Commission d’enrichissement de la langue française, DGLFLF, FranceTerme, Lois du 30 juillet 1974 et du 23 août 1977, Montréal, Québec.

Organisation internationale de la Francophonie ou OIF    

Rouage exécutif de la francophonie, l’OIF voit le jour le 20 mars 1970 avec la création de l’Agence de coopération culturelle et technique (ACCT).

Elle met en œuvre la diversité linguistique et la coopération francophone à destination de publics, femmes, jeunes, continent africain et à travers des missions, éducation, instauration de la démocratie, renforcement de l’espace économique francophone, qu’elle définit comme prioritaires.

Si son appellation actuelle n’est consacrée qu’en 2006, son rôle et son assise s’élargissent progressivement, les présidents Mitterrand et Chirac lui donnant une dimension plus politique en suggérant dès 1986 l’organisation de sommets réunissant les chefs d’État puis, en 1997, la création d’un poste de secrétaire général.

S’appuyant sur un budget de 71 millions d’euros dont la France et le Canada sont les principaux contributeurs, elle compte sept directions (Gouvernance démocratique, Education et jeunesse, Economie et numérique notamment) quatre opérateurs (Agence universitaire de la francophonie, Université Senghor d’Alexandrie, TV5 Monde et Association internationale des maires francophones) et quatre représentations permanentes (auprès des Nations Unies à New York et à Genève, de l’Union européenne à Bruxelles et de l’Union africaine à Addis-Abeba).

Elle accueille aujourd’hui 88 États ou gouvernements, tous soumis aux mêmes obligations, tant sur le plan linguistique que sur celui des valeurs démocratiques, mais de nature (États ou territoires) et de statut (membres de plein droit, associés, observateurs) différents, les pays sollicitant leur adhésion étant d’abord admis comme observateurs avant d’accéder au statut de membre associé s’ils font la preuve de leur engagement.

Une règle parfois détournée, ce qui alimente les critiques dont l’OIF, qui gagnerait à se recentrer sur une dimension technique et purement linguistique, terme de ses premiers engagements, fait désormais l’objet.

Voir aussi : ACCT, Association internationale des maires francophones, Francophonie, Francophonie économique,  Jeux de la Francophonie, Haïti, Union latine, Plurilinguisme, Sommet de la Francophonie, Université Senghor.

OIF (Suite)

L’accroissement constant du nombre d’États membre dont plus de la moitié n’a qu’un rapport lointain sinon inexistant avec la langue française est en effet et de plus en plus,  sujet de préoccupation et de critiques.

Déjà en 1996, les adhésions de la Bulgarie et de l’Angola faisaient s’interroger les linguistes Daniel Baggioni et Roland Breton, «seuls les critères politico-diplomatiques (pouvant) expliquer ces curieuses extensions de la francophonie».
Chaque nouveau sommet apporte désormais sa fournée de nouvelles adhésions, plus hétéroclites les unes que les autres, Émirats arabes unis, Estonie, Monténégro, Uruguay ou Mexique dont, pour chacun d’eux, la population francophone ne dépasse pas les 1 %.

Et que dire de la récente adhésion de l’Irlande en 2018. Comme si bientôt l’Angleterre allait à son tour défendre nos intérêts !

Tout au plus, pour des pays comme le Ghana ou la Gambie, enclaves anglophones en territoires francophones, pourrait-on retenir l’argument de la francophilie tel que développé par Jacques Attali.

Mais rares sont en vérité les pays, États ou provinces comme l’Ontario en 2016 et la Louisiane en 2018 dont l’adhésion se justifie et représente de part et d’autre une réelle avancée.

L’exemple le plus flagrant de cette «ouverture sans fin» (La Croix) étant illustré par l’adhésion du Qatar en 2012,  adhésion motivée par des intérêts géopolitiques : recherche d’influence et de points d’appui dans la région du Golfe pour les uns, auprès du Conseil de sécurité de l’ONU et des pays africains pour les autres.
Un Qatar très rapidement débiteur  et qui ne semble toujours pas s’être acquitté de ses cotisations et de ses engagements en matière d’enseignement du français.

Est-ce un hasard dès lors si en 2013, les pays membres de l’OIF n’effectuaient, dans le cadre des Assemblées générales de l’ONU, que 19% de leurs interventions en français (contre 65% en deux langues, 15% en anglais et 1% en espagnol) ?

Confusion entretenue par  un «désir de ressemblance à une réalité institutionnelle déjà existante» (Damien Soupart) face à laquelle les engagements à promouvoir la francophonie et à contribuer à l’accroissement de l’enseignement du français n’offrent peut-être qu’une trop faible contrepartie.

Voir aussi : Attali (rapport), Influence, Louisiane, Mushikiwabo (Louise), Ontario, Rwanda.

Ontario

C’est peu dire que l’Ontario occupe une position centrale auprès du gouvernement fédéral, tant par sa démographie (la première avec 14 733 000 habitants sur les 38 000 000 que compte le Canada), sa superficie (la deuxième après le Québec), que son influence politique.

Selon Statistique Canada, la principale langue maternelle des Ontariens est l’anglais (8,9 millions) suivi du mandarin, du pendjabi, de l’espagnol (3,5 millions), puis du français.
Malgré un pourcentage très faible (4,7%) de la population totale, ses quelque 622 415 francophones n’en constituent pas moins, après la minorité anglophone du Québec, la minorité provinciale la plus importante du Canada.
C’est ici, essentiellement dans certaines localités de l’est comme Prescott et Russell où ils sont majoritaires, que se concentrent les trois quarts des francophones du Canada hors Québec et Acadie.

A l’image de la situation observée à l’échelle du pays et en raison d’un déficit accru de poids ou d’influence tant sur les plans démographique, politique que social, le français fait  ici l’objet d’une minoration ressentie de façon encore plus accusée.

Une enquête récente effectuée entre octobre 2019 et janvier 2020 par Christian Bergeron, professeur à l’université d’Ottawa, auprès de 131 étudiants de la région d’Ottawa, révélait que plus de 43 % (des personnes interrogées) ont affirmé avoir été victimes ou témoins directs d’une discrimination linguistique.
Les principaux lieux évoqués sont les lieux publics (25 %), le milieu de travail (19 %), celui de l’éducation (17 %) ainsi que les organisations publiques (16 %).

L’une des participantes ajoutant :

Les Franco-Ontariens se doivent de savoir apprendre, parler, lire et écrire en anglais alors que ce n’est pas nécessaire pour les anglophones en Ontario. La discrimination envers les francophones en Ontario existe toujours malgré tout ce qui a été fait ( pétitions,  projets de loi,  manifestations, etc.) ; elle n’est que tassée en-dessous du tapis.

Au-delà de ces discriminations et vexations parfois vécues au quotidien, trois exemples semblent malgré tout révélateurs du degré d’engagement des Franco-Ontariens pour la reconnaissance de leurs droits :

  • L’adhésion, tout sauf anodine, de l’Ontario à l’OIF en novembre 2016.
  • L’explosion des classes d’immersion de langue française, la quantité d’inscriptions dépassant dans certains quartiers de Toronto celle des élèves inscrits dans les programmes d’anglais courant.
  • Mais sans doute davantage encore le récent (janvier 2020) accord de création de l’université francophone de Toronto, première université de langue française de l’Ontario, accord ressenti par les Franco-Ontariens comme une victoire peut-être sans précédent.

Voir aussi : Acadie, Canada, classes d’immersion, Charte des droits et libertés, Minorités francophones du Canada,  Nouveau-Brunswick, Politique linguistique, Québec, Université Laval, Université Sainte-Anne.

OPALE (Organismes francophones de politique et d’aménagement linguistiques)

Réseau constitué en 2009 par les organismes de la langue française de la Fédération Wallonie-Bruxelles, de France, du Québec et de Suisse romande.

Enceinte de concertation sur les initiatives de chaque membre en matière de politique linguistique, le réseau OPALE leur permet de conduire des projets communs dans les domaines attitrés de la francophonie, tels que l’évolution législative, l’enseignement ou l’enrichissement du français.

P comme Pactes linguistiques

Pactes linguistiques

Mis en œuvre à l’occasion du Sommet de Québec de 2008, les pactes linguistiques sont un instrument contractuel conclu entre l’OIF et les Etats membres dont le français n’est pas la langue officielle et qui visent à renforcer, sur leurs territoires,  la promotion du français.

Ils définissent des plans d’action (accès de la population aux médias francophones, renforcement du français dans le système éducatif, etc.) dans le cadre desquels interviennent les opérateurs de l’OIF, Agence universitaire de la francophonie et TV5 Monde notamment, en proposant des mesures d’accompagnement aux engagements pris par les États.

Treize ans après leur création, on en dénombre cinq en tout et pour tout avec le Burundi, les Seychelles, Sainte-Lucie mais surtout le Liban et l’Arménie dans laquelle, pour cette dernière, le français semble bénéficier d’une dynamique particulièrement favorable.

Faute d’un réel accompagnement financier ne serait-ce que dans les pays les plus pauvres, un tel dispositif n’a cependant, dans les faits, que peu de chances de perdurer.

Voir aussi : OIF

Plurilinguisme

Pierre angulaire de l’approche linguistique contemporaine, considéré comme essentiel avec plus de 7 000 langues répertoriées(7 097 selon le site Ethnologue) le plurilinguisme est tout en même temps synonyme de diversité, respect de l’autre et reconnaissance des droits.

Mis en avant en 2005 par le rapport Grin, il est depuis régulièrement cité par l’ensemble des acteurs, qu’ils soient nationaux ou internationaux.
Seule l’Union européenne semble faire exception en accentuant la prédominance de l’anglais en dépit de textes (Charte des droits fondamentaux, Traité sur l’Union européenne) pourtant énoncés comme des déclarations de principe.

L’espace francophone étant, quant à lui, caractérisé par la présence d’un grand nombre de langues et de nombreux cas d’hybridation du français, la prise en compte du plurilinguisme y est considérée comme un enjeu majeur et tout à fait effectif, cette fois-ci.
L’un des exemples les plus probants résidant sans doute dans sa politique de soutien aux langues africaines dont le programme ELAN constitue l’une des meilleures illustrations.

Voir aussi : Bilinguisme institutionnel, Elan, Grin (rapport), Intercompréhension entre les langues, Langues africaines, Observatoire européen du plurilinguisme, OIF, Union européenne

Politique linguistique

La politique linguistique se comprend comme « l’ensemble des choix conscients opérés par les décideurs politiques dans le domaine des rapports entre langue et vie sociale et plus particulièrement entre langue et vie nationale » . (Louis-Jean Calvet)
Elle se distingue de la planification linguistique qui correspond à la mise en œuvre de ces choix.

Elle est donc, tout comme les politiques sociale, économique ou encore démographique, affaire de l’État.
Pour qui veut, cependant, réfuter toute idée d’interventionnisme et ne considérer la langue que comme le produit du temps et le fait de l’action des hommes, le principe peut heurter et être considéré comme transgressif.

Vecteur par lequel un État, une région, une province se définissent, la politique linguistique doit néanmoins et quoi qu’on en dise, être considérée comme un élément majeur des mécanismes institutionnels et sociaux propres à un territoire.

Rares sont en effet les pays, comme le Danemark, partisans d’un réel non-interventionnisme.

Dans l’immense majorité des cas, la politique linguistique est le fruit d’une action effective, d’une démarche volontaire de la part de l’État.

Elle peut être implicite, les États-Unis en étant sans doute l’exemple le plus frappant qui, malgré l’absence de définition constitutionnelle ou légale de langue officielle, témoignent envers l’anglais d’un soutien sans faille, que ce soit sur leur territoire (Constitution de 1913 de l’État de Louisiane par exemple) ou à l’extérieur comme le démontre Claude Hagège à travers ce qu’il définit comme « la conquête par la multiplication des organes de diffusion de l’anglais ».

Elle se traduit  le plus souvent de façon formelle, que ce soit au niveau de la graphie («la révolution linguistique » de Mustapha Kemal qui substitue un alphabet latin, dit « turc » à l’alphabet arabe), du lexique (commissions de terminologie visant à la création de mots nouveaux) ou encore des fonctions, en promouvant une langue au rang de langue officielle, nationale ou d’enseignement.

Deux cas à ce titre, l’hébreu pour Israël et le français pour le Québec, forcent l’évidence accréditant et renforçant l’idée d’une langue transcendante, œuvre collective qui façonne, affirme, différencie, en un mot donne vie.

Voir aussi : Calvet (Louis-Jean), Commission d’enrichissement de la langue française, Constitution du 4 octobre 1958, Guerre des langues, Hagège (Claude), Loi Toubon, Lois du 30 juillet 1974 et du 23 août 1977, Louisiane, Maine.

Protocole de Londres sur la non-traduction des brevets européens

Le protocole de Londres, ratifié en octobre 2008, est un exemple caractéristique de la guerre des langues et des enjeux économiques et juridiques qui en découlent.

Cet « accord », présenté comme devant simplifier le régime linguistique des brevets en Europe, invitait purement et simplement les pays européens à renoncer à leurs exigences en matière de traduction et «encouragerait » les entreprises à déposer leurs brevets directement en anglais.
Synonyme de reconnaissance du tout-anglais, il en résultait  un avantage concurrentiel indéniable pour les entreprises anglo-saxonnes ainsi qu’une prédominance de facto du droit anglo-saxon.

Au terme d’une bataille particulièrement âpre, le Royaume-Uni dut renoncer à ses premières exigences et ce sont finalement l’allemand et le français qui furent déclarées, aux côtés de l’anglais, langues obligatoires de traduction des brevets.

Voir aussi : Enjeux, Guerre des langues, Grin (rapport), Normalisation

Q comme Québec

Québec

Première province du Canada par sa superficie avec 1,668 million km², seconde en termes démographique après l’Ontario avec ses 8,485 millions habitants, seule province ayant pour langue officielle unique le français, le Québec se construit autour de l’idée d’une langue, trame de fond de ses revendications identitaires et peut apparaître à ce titre comme une «société distincte».

Si la fièvre nationaliste, celle des gouvernements Bourassa et Lévesque, des lois 22 (1974) et 101 (1977) et des référendums d’autodétermination (1980 et 1995) est aujourd’hui retombée, «la belle province» n’en continue pas moins de s’affirmer comme la voix de la francophonie en Amérique du Nord, voire d’une certaine francophonie mondiale.
Un Québec qui n’a jamais été aussi conquérant et nous réconcilie avec l’idée d’un espace économique francophone porteur de ses propres dynamismes.
Un Québec où, contrairement à certaines idées reçues, le français, parlé par 86% de la population, n’a jamais été aussi fort qu’aujourd’hui.

A tel point que l’on pourrait légitimement s’interroger sur un fossé  grandissant entre un Québec de plus en plus francophone et une France en voie d’anglicisation et se demander, à la suite d’Ilyès Zouari, si l’un et l’autre seront toujours, d’ici quelques générations, en mesure de se comprendre.

Voir aussi : Accords Bourassa-Chirac, Canada, Francophonie économique, Gérin Lajoie (doctrine), Lois du 30 juillet 1974 et du 23 août 1977, Montréal, Nouveau-Brunswick, Observatoire démographique et statistique de l’espace francophone, Office québécois de la langue française, Ontario, Politique linguistique, Université Laval.

Québec (Suite)

Un Québec dont le statut, l’influence et le prestige ne masquent que trop imparfaitement des relations pour le moins ambiguës avec les minorités francophones des autres provinces.

Sentiment anti-Québécois empreint d’amertume d’un côté, abandon, ignorance voire mépris de l’autre, la fracture est réelle entre un Québec autoproclamé garant du français en Amérique du Nord et le reste des francophones, fracture dans laquelle la montée en force du nationalisme québécois semble avoir joué un rôle déterminant.

Car l’équilibre est plus instable qu’il n’y paraît et les intérêts souvent divergents entre un Québec juridiquement unilingue et, Nouveau-Brunswick mis à part, une communauté franco-canadienne en situation minoritaire voire ultra- minoritaire.

Ainsi l’annonce, en mai 2021, du projet de loi 96 pour le réaménagement des lois linguistiques visant à faciliter l’accès des franco-canadiens aux universités québécoises, si elle répond au vœu de tous les francophones, est-elle perçue hors Québec comme un instrument à double tranchant de nature à fragiliser les universités francophones et à remettre en cause le financement de l’enseignement supérieur en français.

Inversement, les succès, nombreux et générateurs de droits, remportés devant la Cour suprême par les Franco-Ontariens, les Franco-Albertains ou les francophones de Colombie-Britannique sont-ils ressentis à Montréal, Québec et Trois-Rivières comme autant de cadeaux empoisonnés et de leviers offerts à la minorité anglophone.

Situation à laquelle s’ajoutent les effets pervers d’une hégémonie linguistique porteuse comme toujours de ressentiments et de frustrations, au bénéfice cette fois-ci d’un Québec en position dominante, sorte de mastodonte surdimensionné qui considère peut-être cet espace, immense il est vrai, comme son pré carré.
Un Québec qui développe ses normes, fustige, gentiment bien sûr, l’accent des autres comme nous, hexagonaux, aimons à le faire des Québécois qui à leur tour «internalisent cette honte et la transmettent aux gens d’ici».

Une francophonie face à elle-même en somme, ses interrogations, tentations, ambivalences et sa propre complexité.

Le Devoir publiait récemment  un article très sobrement intitulé «La honte» à travers lequel Emilie Nicolas, pour ne pas la citer, s’interrogeait en ces termes :

Dénonce-t-on les effets néfastes de l’impérialisme britannique parce qu’on est anti-impérialiste ou parce qu’on lui aurait préféré un impérialisme différent, où l’on aurait été plus dominant ? Est-on contre le mépris des Franco-Québécois ou contre le mépris tout court ? Se pencher sur ces questions, c’est s’interroger sur ce que l’on veut que notre francophonie signifie à la face du monde, sur la manière dont les francophones se traitent entre eux et sur le rapport traversé de contradictions, d’émotions et souvent d’insécurité de chacun envers sa langue et son identité.

 R comme Radio France internationale ou RFI

Radio France internationale ou RFI

Radio France internationale est une station de radio publique française à vocation internationale créée en 1975 et rattachée en 2008 au groupe France médias monde.

Très présente en Afrique francophone mais également non francophone grâce à son service en anglais, en portugais et en langues africaines telles le kiswahili ou le mandingue, elle diffuse ses programmes en français et dans 14 autres langues.

Référence en matière d’information, elle propose également des séries de sensibilisation et de perfectionnement au français destinées tant au grand public qu’aux professionnels de l’éducation.

Voir aussi : France Médias Monde, France 24, TV5 Monde.

République démocratique du Congo ou RDC

Véritable géant  avec un territoire vaste comme quatre fois la France, ses énormes richesses, un taux de croissance estimé à 4,6% en 2019, la République démocratique du Congo est aussi, avec 87 millions d’habitants, le premier pays francophone du monde.

Parlé par plus de la moitié de la population et porté par des médias francophones à 97 %, le français, seule langue officielle, est ici parfaitement vivant, parlé et légitime aux côtés des langues nationales que sont notamment le kikongo ou le lingala.

Une RDC  très présente sur la scène francophone internationale avec une Fête du livre devenue le rendez-vous incontournable de la littérature francophone d’Afrique centrale et des Jeux de la Francophonie programmés à l’horizon 2022. 

Peut-être est-il simplement regrettable que la France ne manifeste pas davantage d’intérêt pour un pays qui pourrait compter 125 millions d’habitants en 2030, avec une capitale, Kinshasa, appelée à franchir la barre des 20 millions et devenir ainsi l’une des plus grandes métropoles du monde.

Voir aussi :  Afrique, Côte d’Ivoire, Kinshasa, Langues africaines.

Réseau des villes francophones et francophiles d’Amérique ou RVFFA

Fondé par les villes de Québec, Moncton et Lafayette, le RVFFA défend l’idée, relativement nouvelle, d’un tourisme linguistique, en l’occurrence francophone.

L’objectif est de développer le sentiment communautaire mais également l’économie et l’industrie des villes francophones et francophiles d’Amérique du Nord.

Il compte aujourd’hui, entre le Canada, les États-Unis mais également les Caraïbes, plus de 150 villes membres.
Piloté par le Centre de la francophonie des Amériques, il met notamment sur pied à l’attention des touristes nord-américains ou européens des circuits touristiques reliant les villes membres et offrant, pour chacune d’entre elles, des services en français.

Voir aussi : Centre de la francophonie des Amériques.

Rwanda

Ancienne colonie belge, le Rwanda est, à l’échelle de l’Afrique, un pays minuscule (26 338 km² soit 86 % de la Belgique) caractérisé cependant, avec ses 12,5 millions d’habitants par une très forte densité de population.

Situé sur les hauts plateaux d’Afrique centrale, il est bordé à l’ouest par la République démocratique du Congo et à l’est par les pays anglophones.
Quatre langues officielles : le français, ex langue d’enseignement, l’anglais, le swahili et le kinyarwanda, langue nationale parlée par la totalité de la population.

Il semble cependant que l’élection à la tête de l’OIF en janvier 2019 de Louise Mushikiwabo, bras droit du très décrié Paul Kagame, ait placé le Rwanda au cœur des enjeux de la francophonie.
Un Paul Kagame viscéralement anti-français, qui n’a cessé de reprocher à Paris son rôle dans le génocide et qui, sitôt au pouvoir en avril 2000, impose l’anglais comme langue officielle, rejoint  le Commonwealth et oriente sa coopération vers l’Ouganda, le Kenya, la Grande-Bretagne et les États-Unis.

L’élection de Louise Mushikiwabo, soutenue par Paris, devra-t-elle être, dès lors, considérée  comme la confirmation de la reconnaissance internationale du Rwanda et une nouvelle victoire de l’homme fort de Kigali et l’OIF, à l’heure où Paris, très impliqué dans  la lutte contre les jihadistes érigeait la réconciliation avec Paul Kagame comme une priorité, comme une nouvelle fois instrumentalisée ?

Interrogée le soir de son élection, la nouvelle secrétaire générale se voulait consensuelle en justifiant un choix que seul l’avenir pourra cependant valider :

(Certes) nous avons ajouté l’anglais aux langues qui sont parlées dans notre pays. Mais il n’y a pas de contradiction. Nous n’avons pas divorcé du français. La francophonie s’inscrit dans un monde de plusieurs langues, ce qui est le cas du Rwanda. Cela n’empêche en rien notre engagement pour la francophonie.

Voir aussi : BDLP, OIF, Mushikiwabo (Louise).

S comme Saskatchewan

Saskatchewan

Aux confins de l’ouest canadien, entre Manitoba et Alberta.

1, 774 million habitants, l’une des densités les plus faibles du Canada et une communauté francophone, fransaskoise comme on dit là-bas, ultra minoritaire avec ses 14 000 locuteurs, 50 000 si l’on admet ceux pouvant soutenir une conversation en français, soit pas même 2 % de la population.

J’ignore tout de la vie en milieu minoritaire mais les quelques échos qui me sont parvenus parlent tous d’ « isolement », de volonté de « briser la matrice du silence », « d’exprimer en français son passé, son vécu, ses rêves et son avenir » (La nouvelle plume), mais également de solidarité et, tel que je l’ai traduit, d’un farouche désir de survie.

Voir aussi : Afrique, Canada, Ontario, Minorités francophones du Canada .

Schizophrénie

J’aurais pu employer d’autres termes, jugés moins frontaux ou rugueux et ne parler que d’ambivalence, rejet, déni, complexe d’infériorité, mimétisme, snobisme parfois ou bien, sur un terrain plus neutre voire plus indulgent, d’insécurité linguistique.

Mille choses sans doute mais le fait est là, notre rapport à la langue, à notre langue, relève bien souvent d’une forme certaine de schizophrénie.
Les qualificatifs ne manquent pas, «rapport contradictoire et paradoxal» (Pilhion et Poletti), «snobisme » et « ridicule» (Y. Montenay), «fatigue psychique» (J.P Delavoye) ou encore «schizophrénie» (F. Turpin), traduisant tous une convergence qui finit par devenir troublante.

Mondialisation économique, mouvement d’uniformisation culturelle au bénéfice d’un modèle anglo-saxon ultra-dominant, mécanismes intuitifs d’adhésion à la langue «de domination» largement décrits, de Louis-Jean Calvet à Claude Hagège en passant par Pierre Frath et auxquels pourraient être associés les travaux de Murielle Salmona sur la «colonisation de l’esprit», l’emprise et la mésestimation de soi, jusqu’à un passé colonial, pourquoi pas, source de remords ou de repentir, autant de raisons, complexes et multiples, façonnant ou altérant nos représentations sociales et, partant de là, linguistiques.

Je pourrais citer le cas d’une connaissance qui répond à la particularité, chaque fois que nous nous rencontrons dans le cercle restreint de réunions pour ainsi dire familiales, de saisir la moindre occasion de parler anglais.
L’important semble être de montrer à quel point il maîtrise cette langue, ce que nous savons déjà, car cela ne se limite pas à quelques mots, mais à des phrases, véritables monologues ou conversations auto-alimentées la plupart du temps.

Ou encore, dans une dimension plus collective, cette habitude accompagnant les sorties en salles et consistant à traduire, systématiquement ou presque, les titres espagnols, allemands, coréens, non en français mais en anglais.

Car le fait est là, de façon irresponsable tout autant qu’irrationnelle, à l’heure où les questions identitaires semblent plus que jamais au cœur de toutes les interrogations, entre auto-dénigrement, rejet de leur propre langue et fascination pour la langue de l’autre, les Français se construisent un modèle qui n’est pas le leur dans un rapport à leur langue pour le moins ambigu.

L’ambition réaffirmée d’Emmanuel Macron de renouer avec une ambition francophone suffira-t-elle à inverser les tendances ?

Rien n’est moins sûr.

Je vous en prie, monsieur le président, faites en sorte que les Français soient au moins aussi francophones que nous.

(Abdou Diouf à François Mitterrand lors du discours de clôture du 1er sommet de la Francophonie le 19 février 1986)

Voir aussi : Anthropologie linguistique, Amirshahi Pouria (rapport), Frath (Pierre), Graddol (rapports), Hagège (Claude).

Stephen King

Évoquer Stephen King dans un lexique consacré à la francophonie ne pourra manquer d’être assimilé à une preuve de confusion.
Mais la frontière entre le mélange des genres, la faute de goût et ce que l’on pense véritablement devoir être écrit peut s’avérer infiniment plus mince qu’il n’y paraît.

Sans doute n’ai je jamais tout à fait cessé de lire celui que, par conformisme ou facilité, on nomme « le maître de l’épouvante », mais plus je me documente sur l’Acadie ou le Maine, plus il m’est difficile de ne pas faire de parallèle avec certains aspects de son œuvre, que ce soit dans le ton, le choix des mots ou de certains personnages.

Comment ne pas relever, comme une similitude frappante, le nom d’un grand nombre d’entre eux, de Roux à De Lesseps en passant par Tozier, Beauchamp ou Delancey, tous venus nous rappeler leur ascendance, celle des primo-arrivants ou des immigrants québécois?
Comment ne pas relever la fréquence des expressions non traduites, de « raison d’être » à « cri du cœur », non pas caricaturales mais de celles qui emportent notre vision du monde et jusqu’à « Cette expression qui n’a de nom qu’en français », titre d’une  nouvelle dans laquelle le personnage ne peut se défaire d’une étrange et troublante impression de « déjà-vu » ?

Mais peut-être est-ce plus encore l’absolue concordance entre les paroles d’un Bill Turcotte « On était des gueux qui baragouinaient en français » et les témoignages, tous convergents, exprimant les brimades et la honte de parler français en public, qui m’ont conduit à m’interroger sur une telle réminiscence, trop présente pour n’être que le fruit du hasard et dont je suis presque étonné que personne jusqu’alors ne l’ait évoquée.

Voir aussi : Acadie, Louisiane, Maine, politique  linguistique,  Université Sainte-Anne.

T comme Tasca

Tasca (Catherine)

Ministre déléguée à la Francophonie puis secrétaire d’État chargée de la Francophonie et des relations culturelles extérieures de mai 1991 à juillet 1993, elle est celle qui, dès 1992 et malgré des marques d’hostilité d’une grande violence de la part de la presse, des professionnels de la publicité et de la communauté scientifique, s’engage dans une démarche jugée rétrograde et vaine  et qui aboutira à la loi du 4 août 1994.

Les élections législatives et le revers de la majorité présidentielle ne lui permettent pas de mener le projet à son terme et c’est à son successeur Jacques Toubon, que reviendra le mérite de le reprendre à son compte et faire voter une loi qui porte désormais son nom.

Voir aussi : Loi du 4 août 1994 dite loi Toubon

Test de connaissance du français (TCF) et Test d’évaluation de français (TEF)

Le TCF et le TEF ont été élaborés en 1998 par la Chambre de commerce et d’industrie de Paris (CCIP) dans le cadre de ses missions de soutien au français des affaires et afin de développer l’emploi sur les marchés francophones.

Proposés notamment par la CCIP et le Centre national d’études pédagogiques (CIEP), ils situent le candidat, pour chaque compétence langagière, sur l’un des 6 niveau du Cadre européen commun de référence pour les langues (CECRL) et permettent, selon le niveau atteint, d’étudier en France, accéder à la nationalité française, émigrer au Canada ou accéder à la nationalité canadienne.

Voir aussi : Cadre Européen Commun de Référence pour les Langues (CECRL),Chambre de Commerce et d’Industrie de Paris (CCIP), Centre National d’Etudes Pédagogiques (CIEP). 

Totalitarismes (le français face aux …)

Quel enjeu la langue peut-elle représenter pour les régimes totalitaires ?

Une question rarement abordée, dans un domaine où les écrits de Klemperer et Orwell font généralement référence.

L’un philologue, théoricien du langage, politiquement neutre mais soumis à la propagande quotidienne du nazisme, l’autre écrivain, praticien de l’écriture, engagé volontaire dans les milices républicaines et qui découvre peu à peu la perversion du langage stalinien dont les idéaux sont pourtant proches des siens.

Deux démarches cependant concomitantes, confondues dans une même réflexion sur la langue, les mots et la captation de la pensée.
Tout y est dit sur les mécanismes de manipulation : inversion des sens, « destruction des mots », « mécanisation » et « invasion de l’esprit par des expressions stéréotypées ».

Du Bernays dans le texte. Ou presque.
En un mot, « Si la pensée corrompt le langage, le langage peut aussi corrompre la pensée » (Orwell).

Yves Montenay prolonge cette réflexion, toujours la même après tout (l’intervention du pouvoir sur la langue, instrument de domination) qui prend dès lors un sens plus géo-politique ou plus appliqué.

Ce qui l’intéresse ici c’est le monde francophone :
En quoi l’émergence des nouveaux totalitarismes que sont le communisme et le djihadisme dessert-elle les intérêts du français ?

Que ce soit à travers la révolution russe, la prise de pouvoir en Europe centrale et orientale ou en Asie par les communistes, puis la montée d’un islam radical, les cheminements sont identiques.

Le meurtre ou l’exil des francophones tout d’abord, noblesse et bourgeoisie dans la Russie de 1917, tout comme, trente ans plus tard, en Europe de l’Est. Le russe devient obligatoire sauf dans la Roumanie de Ceausescu qui s’oppose à sa généralisation et renforce l’enseignement du français.
Mêmes massacres et mouvements d’exil en Asie, qu’il s’agisse du Laos, du Cambodge des khmers rouges ou du Vietnam d’Ho Chi Minh.

Mais sur ce point et pour ce qui est du Vietnam, Yves Montenay introduit une autre finalité, celle de «l’éradication … de toute pensée impure, que ce soit en français ou en langue vietnamienne traditionnelle», les pensées impures, nous dit-il, étant «celles qui mèneraient à douter du communisme».
Dans un premier temps, les langues étrangères et notamment le français sont écartées, puis c’est à la langue du pays elle-même d’être simplifiée «officiellement pour la rendre accessible, (plus vraisemblablement selon lui) pour couper l’accès à la littérature traditionnelle, impure elle aussi».

L’analyse est originale, extrêmement séduisante et peu reprise semble-t-il.

La suite de l’histoire semble néanmoins lui donner raison avec, une idéologie chassant l’autre, des islamistes qui empruntent aujourd’hui les mêmes chemins.

L’Algérie tout d’abord et ces enseignantes de français assassinées car «doublement coupables», pour avoir travaillé et enseigné une langue déclarée «impie».
La montée du péril djihadiste en Afrique Noire et la prise de contrôle de l’Afghanistan par les talibans ensuite, avec l’interdiction de la scolarisation des filles ou la généralisation des écoles coraniques et de l’arabe, support à l’apprentissage du Coran, comme langue d’enseignement en lieu et place du français ou de la langue locale.

Voir sur ce point Yves Montenay : « La francophonie victime du communisme et du djihadisme »
https://www.yvesmontenay.fr/2021/08/19/francophonie-victime-du-communisme-et-islamisme/

Traduction 

S’appuyant sur le modèle gravitationnel défini par Louis-Jean Calvet, le sociologue néerlandais Johan Heilbron trace un parallèle entre les flux de traduction et le positionnement hiérarchique des langues.

Le principe est simple : « Plus on traduit d’une langue, plus elle est centrale ».
Inversement, « plus une langue est centrale … et moins on traduit vers elle ».

Environ 40% des livres traduits dans le monde le sont à partir de l’anglais (ou de l’anglo-américain ).
Viennent ensuite, entre 10 et 15%, l’allemand, le français et le russe, puis l’italien, l’espagnol, le danois, le suédois, le polonais et le tchèque, chacune pour environ 2 % et enfin loin derrière, le chinois, le japonais, l’arabe et le portugais.

En contrepartie ou parallèlement, seul 1 % des livres publiés aux Etats-Unis et en Grande- Bretagne sont des traductions contre 10 à 15% en Allemagne et en France, 15 à 20 % en Espagne et en Italie et 25 à 30 % en Suède et aux Pays-Bas. 

Adapté au monde littéraire et en tenant compte des nécessaires réajustements en découlant, sans lesquels les positionnements du danois ou de l’arabe par exemple seraient inexplicables, on retrouve ici les mêmes mécanismes et les mêmes niveaux de domination : 

  •  Même relative indifférence du public anglo-saxon pour la culture des autres (à travers cette tendance au monolinguisme décrite Calvet).
  • Même risque d’exclusion des cultures ou des langues périphériques (langues qui, n’étant jamais langues secondes, ne se transmettent plus – tendance à ne lire que les livres traduits à partir des langues centrales). 

On ne s’étonnera  pas dès lors que le taux de traduction soit désormais admis parmi les indicateurs retenus par  les baromètres proposant une évaluation du poids des langues et reposant désormais sur d’autres facteurs que le simple nombre de locuteurs.

Voir aussi : Calvet Louis-Jean, INSEAD, Modèle gravitationnel

TV5 Monde

Créée en 1984, TV5 Monde, de droit français, est une chaîne internationale de télévision francophone.

Débordant largement du cadre des pays membres de l’OIF, reçue dans plus de 257 millions de foyers avec une progression de 6 % par an, elle constitue l’un des trois grands réseaux mondiaux de télévision avec MTV et CNN.

Ne proposant que des programmes d’expression française sous-titrés en 12 langues, elle a pour missions de promouvoir la diversité culturelle et la créativité francophones, mais également, pour une large part, la découverte et l’enseignement du français.

Voir aussi : Association internationale des maires francophones, France Médias Monde, France 24, Radio France Internationale, Chaîne chinoise CGTN-Français, Chaîne russe R.T.

U comme Union européenne

Union européenne

Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’en matière de diversité linguistique, l’Union européenne est loin de tenir ses engagements, tant le déclin rapide et récent du multilinguisme au sein de l’institution est avéré.

Pour faire simple : 24 langues officielles, une diversité linguistique érigée en déclaration de principe et, malgré des outils de traduction performants, une communication émanant de députés ou de hauts fonctionnaires de plus en plus tournée vers l’anglais.
En substance, un unilinguisme (auquel les francophones semblent très volontiers se plier) non maîtrisé, inéquitable, source de gaspillages et de dysfonctionnements.

Et le retrait britannique semble ne rien remettre en cause.

Malgré les appels répétés et bien que l’anglais ne soit langue officielle ni de l’Irlande (le gaélique) ni de Malte (le maltais), le règlement 1/58 qui définit le régime linguistique de l’Union semble devoir se prêter aux mêmes interprétations et montages visant à conférer à l’anglais, au mépris du principe d’égalité des États membres et de leurs langues officielles, un statut spécial et  dérogatoire.

Voir aussi : Grin (rapport), Plurilinguisme.

Union latine

De l’Union latine, comme d’un rêve trop vite évanoui, il ne reste presque rien : quelques commentaires, une ébauche de site et une convention dite de Madrid, acte de naissance et profession de foi dont les accents ne sont pas sans rappeler ceux de l’OIF, parenté sur laquelle nous reviendrons :

 Mettre en valeur un patrimoine culturel commun et en favoriser le rayonnement, réaliser une plus grande connaissance réciproque des caractères et des besoins propres à chacun des peuples latins, mettre les valeurs morales et spirituelles de la latinité au service des relations internationales afin d’arriver à une coopération plus grande entre les nations et accroître la prospérité des peuples.

L’Union latine  doit son apparition à quelques individualités, diplomates en l’occurrence, les français Pierre Cabanes puis Philippe Rossillon et le brésilien Neves da Fontoura.

Le principe est posé d’une coopération reposant sur une latinité fondatrice, vecteur d’intégration et  socle linguistique commun, reflet d’une solidarité de langues et de cultures et préfiguration des espaces linguistiques tels qu’ils se dessinent aujourd’hui :

  •  26 pays signataires à la convention du 15 mai 1954, tous rassemblés autour d’une même appartenance linguistique et des mêmes idéaux démocratiques (de pure forme  pour l’Espagne de Franco ou la Roumanie de Ceausescu) et exprimant (déjà) « le souhait de s’opposer à toute forme de monopole et d’impérialisme culturel ou linguistique ».
  • Six langues : catalan, espagnol, français, italien, portugais et roumain.
  •  35 États membres et 4 observateurs, essentiellement hispanophones et donc sud-américains mais également européens, africains, asiatiques et des Caraïbes.
  • Des missions essentiellement culturelles visant à la promotion des cultures latines à travers le financement de films ou documentaires, des séminaires, des colloques, jusqu’à l’instauration d’une journée de la latinité, le 15 mai, en guise de date anniversaire.

La filiation avec la future OIF, on le voit, est évidente.

La Belle histoire pourtant n’allait pas durer, emportée par de trop fortes disparités économiques, une sur-représentation latino-américaine et des points de vue politiques divergents.
Certains membres glissent rapidement vers d’autres organisations plus centrées sur leurs propres langues, Organisation des États ibéro-américains (OEI), Communauté des pays de langue portugaise (CPLP) et bien sûr OIF.

Le divorce est consommé lors du Congrès de l’Unesco le 26 janvier 2012 et l’Union latine cesse d’exister le 31 juillet de la même année.

Voir aussi : Espace linguistique, Intercompréhension entre langues apparentées, OIF.

Université Laval

Première université francophone d’Amérique du Nord, l’université Laval, du nom de François de Montmorency-Laval, premier évêque de la Nouvelle-France, est aussi l’une des plus grandes universités du Canada.

Située sur un campus de près de 2 km² au cœur de l’agglomération québécoise, elle accueille au sein de ses 67 départements, écoles et instituts, 43 000 étudiants dont plus de 6 000  étrangers.

Investie d’une véritable responsabilité vis-à-vis de la question francophone, elle héberge l’Observatoire démographique et statistique de l’espace francophone, ainsi qu’à travers sa Chaire pour le développement de la recherche sur la culture d’expression française en Amérique du Nord , le site «Aménagement linguistique dans le monde» consulté chaque année par près de 5 millions d’internautes.

Voir aussi : BDLP, Québec, Langue internationale, Observatoire démographique et statistique de l’espace francophone ou ODSEF.

Université Sainte-Anne

L’université Sainte-Anne est une université canadienne située à Pointe-de-l’Église, petit village de la communauté de Clare  en Acadie, au sud-ouest de la Nouvelle-Écosse.

Seule université de langue française de la province, très enracinée dans la culture acadienne, elle accueille des étudiants de Nouvelle-Écosse, mais également du Canada, voire et de plus en plus, d’Europe et des États-Unis.

Mais peut-être présente-t-elle avant tout la particularité d’offrir, depuis 1972, un programme d’immersion sans équivalent à travers des sessions de cinq semaines durant lesquelles environ 300 étudiants dont la grande majorité ne parle pas le français ou ne le parle pas bien, s’engagent à ne s’exprimer qu’en français durant tout leur séjour.

Au final, une prise de conscience culturelle et linguistique en rupture avec les processus d’auto-dévalorisation subis par nombre de communautés francophones d’Amérique du Nord.

Avant les seules personnes avec qui je parlais français, c’était ma famille parce que j’avais honte de parler français avec d’autre monde…et puis asteur j’ai pas honte de parler français  … et Sainte-Anne m’a aidé.

(Garland K. Ancien élève des programmes d’immersion)

Voir aussi : Acadie, Canada, Louisiane, Nouveau-Brunswick, Maine, Moncton, Stephen King.

De façon plus générale, se reporter à l’essai de Laura Atran-Fresco, «Les Cadiens au présent. Revendications d’une francophonie en Amérique du Nord», pour son étude des processus de revendication identitaire au sein de la population francophone et, plus précisément, son analyse détaillée d’une expérience sans équivalent.

Université Senghor

Inaugurée en 1990, l’Université Senghor d’Alexandrie est une université internationale de langue française.

Elle est l’un des quatre opérateurs directs de l’OIF et dispose d’un budget de 3 millions d’Euros dont la moitié de contribution française.

Elle a pour mission la formation des cadres, essentiellement africains, appelés à occuper des postes à responsabilité au sein de leur pays ou dans les organisations internationales.
Forte d’un réseau d’intervenants francophones, canadiens, européens et africains, elle délivre des formations courtes et des masters spécialisés adaptés au contexte africain.

Voir aussi : Afrique, Association internationale des maires francophones, Influence, OIF

V comme Villers-Cotterêts

Villers-Cotterêts (l’ordonnance)

Le 25 août 1539, le roi est à Villers-Cotterêts, en villégiature.
Il raffole du lieu.

Guillaume Poyet, son chancelier, premier des grands officiers de la couronne, lui soumet une ordonnance.

L’enjeu en est considérable : créer des registres d’état civil tenus par les curés, paraphés par  notaire et inscrits au greffe des bailliages, limiter la justice ecclésiastique aux causes purement religieuses, instaurer de nouvelles règles pour une procédure pénale qui sera désormais écrite.
En un mot, « pourvoir au bien de notre justice, abréviation des procès et soulagement de nos sujets ».

L’«Ordonnance générale sur le fait de la justice», véritable Code d’instruction criminelle, pose les bases de la justice de l’Ancien régime et celui, ni plus ni moins, de notre état civil.

L’œuvre est forte, lourde de ses 192 articles, résolument centralisatrice et impose l’usage de l’écrit dans les actes administratifs et les décisions de justice.

Mais, pour passer d’un droit coutumier à l’instauration de registres écrits, encore faut-il choisir une langue comprise de tous.
Ce n’est plus le cas du latin, mal compris par les édiles, inconnu des justiciables et source de malentendus.

Ce sera donc le français, ou plutôt la langue d’oïl.

Et pour ce que telles choses sont souvent advenues sur l’intelligence des mots latins contenus esdits arrests, nous voulons d’oresnavant que tous arrests, ensemble toutes autres procédures, soient de nos cours souveraines et autres subalternes et inférieures, soient de registres, enquestes, contrats, commissions, sentences, testaments, et autres quelconques, actes et exploicts de justice, ou qui en dépendent, soient prononcés, enregistrés et délivrés aux parties en langage maternel françois et non autrement.

Villers-Cotterêts (la cité)

Cinq siècles plus tard, un jeune candidat en campagne visite la résidence royale.

Effarant vaisseau fantôme, transformé au fil des siècles en dépôt de mendicité, hôpital militaire puis hospice pour personnes âgées, le château est muré, saccagé de l’intérieur et sa gracieuse silhouette vacille sur ses fondations.

(Violaine de Montclos)

Du lieu de tous les plaisirs, il ne reste rien.

Le candidat promet alors, s’il est élu, de réhabiliter le château et le consacrer à notre langue.
Promesse surprenante, presque hors de propos, en décalage avec une élection qui semble se jouer sur d’autres terrains et la personnalité de celui auquel on prête d’autres modèles et d’autres orientations.

Six années ont passé, entrecoupées d’orages, souvent violents.

Nous sommes le 30 octobre 2023 et l’ancien candidat, sous le ciel lexical de la cour du jeu de paume, tient son pari, celui d’une cité consacrée à notre langue, son histoire et son devenir.

La presse est au rendez-vous.
Le discours est fleuve.
Le pari osé, pour un coût élevé et un retour sur investissement incertain.

Mais l’exemple, musée de la langue portugaise de São Paulo mis à part, sans équivalent.

Visa francophone

Le visa francophone est une vieille idée, récemment réintroduite par quelques personnalités parmi lesquelles  Pouria Amirshahi en 2012, Jacques Attali en 2014 ou l’ancien diplomate tunisien Farhat Othman en 2018 ainsi que, de façon plus générale, par le milieu associatif.

Le principe s’appuie sur un triple constat :

  • des difficultés répétées d’obtention de visas vécues comme un sentiment d’arbitraire et comme la négation même du principe de francophonie,
  • des accords bilatéraux   préexistants et introduisant certaines facilités de déplacement,
  • Un argument strictement économique visant à favoriser la libre circulation des élites, condition nécessaire au développement.

Pour répondre à la crainte, toujours présente, du risque migratoire, les analystes proposent de n’attribuer ce visa qu’aux seuls citoyens de pays francophones démocratiques ou de l’assortir à un niveau de connaissance du français.
Propositions non sans lien avec la suggestion de Jacques Attali  plaidant pour des guichets réservés aux francophones dans les aéroports internationaux.
Une autre difficulté étant de déterminer l’autorité habilitée à délivrer ce visa, démarche à laquelle l’OIF pourrait être associée.

L’idée, n’empêche, fait son chemin, à laquelle l’appel pour le « Vivre ensemble », considéré comme l’acte majeur du Sommet d’Erevan, pourrait donner une nouvelle impulsion.

Voir aussi : Amirshahi Pouria (Rapport), Attali (rapport), Espaces linguistiques, Espace économique francophone, francophonie, sommet de la Francophonie

W comme Wallace Lambert

Wallace Earl Lambert et le « locuteur masqué »

Il n’est pas tout à fait inutile, pour qui s’étonne, face à la forte attractivité de l’anglais, de certains réflexes de mimétisme ou d’identification, de revenir sur une expérience menée, voici maintenant plus de 60 ans, au sein du département de psychologie de l’Université McGill de Montréal.

Un jeune chercheur, Wallace Earl Lambert, cherche alors à confronter les attitudes des anglophones et des francophones vis à vis de l’anglais et du français et, plus précisément, à mesurer le poids de la langue dominante à travers les constructions qui en découlent.

Il décide, pour cela, de demander à des locuteurs bilingues d’enregistrer un texte dans chacune des deux langues et de soumettre ces enregistrements, présentés comme émanant de personnes différentes, à un jury chargé d’évaluer les locuteurs non d’après leur langue mais d’après leur voix.

Et les résultats seront sans appel.

Pour des couples d’enregistrements émanant, on l’aura compris, de la même personne, le locuteur anglophone sera, systématiquement ou presque, mieux noté et les rares fois où les francophones seront évalués favorablement, ils le seront avant tout, ce qui n’est pas anodin, par les juges anglophones.

L’analyse est d’autant plus intéressante que les critères d’évaluation, sociabilité, sympathie, intelligence, taille ou encore attrait physique n’ont absolument aucun lien avec la langue utilisée.

Les juges n’évaluaient donc pas des voix, mais des langues, en se fondant sur l’idée qu’ils se faisaient d’elles.

Telle est la conclusion de Louis-Jean Calvet qui rapporte cette enquête, conclusion qui sonne comme une évidence.

La méthode, dite du « locuteur masqué », sera fréquemment reprise et, qu’il s’agisse de langue (afrikaans, anglais ou xhosa pour l’Afrique du Sud) ou d’accent (anglais ou écossais, mandarin ou cantonnais), le locuteur s’exprimant dans la langue dominante ou la maîtrisant sera invariablement mieux noté.

L’expérience est lourde de sens puisqu’elle préfigure l’essentiel des analyses contemporaines portant sur l’insécurité et les représentations linguistiques avec leur cortège de stéréotypes et autres réflexes d’auto-dénigrement, largement décrits aujourd’hui.

Wuhan 

Wuhan (prononcer Wouran), neuf millions d’habitants, ancrée sur le continent, ville de l’intérieur des terres et accessoirement, avec Yantai, l’autre ville « francophone » de l’Empire du milieu.

Pour qui se souvient de Zhou Enlai, c’est presque de l’histoire ancienne, premier ministre de Mao et qui n’oublie pas qu’il a fait ses études en France, l’histoire commence en 1966 avec une coopération franco-chinoise avant l’heure.

Coopération  universitaire tout d’abord qui s’oriente ensuite vers les filières médicales puis devient, à partir des années 1990, économique avec l’installation de PSA qui fait  rapidement de Wuhan son site de production le plus important. 

Aujourd’hui, la boucle semble bouclée :
un jumelage avec Bordeaux, un consulat, deux écoles françaises, deux départements de français, un hôpital obéissant à la particularité  notable d’avoir une double signalétique, en mandarin et en français et un nombre incalculable d’entreprises françaises représentant, à en croire les Echos, 40 % des investissements français dans le pays.

Voir aussi : Chine, chaîne chinoise CGTN-Français, Yantai.

X

Y comme Yantai

Yantai

Il n’y a évidemment rien d’innocent dans les relations internationales, domaine dépourvu de tout altruisme et où chacun cultive ses propres intérêts.

Yantai, sept millions d’habitants, située sur les bords de la mer jaune face à la Corée, n’échappe sans doute pas à la règle.
Et pourtant, au-delà des opérations de communication, toutes bien rodées, il semble qu’on ait affaire, avec Wuhan toutefois, à la plus francophone des villes chinoises, de celles que J. Attali qualifie volontiers de francophiles.

Qu’on en juge :

une centaine de sociétés, grands magasins, restaurants, boutiques, un hôpital, deux départements de français, trois bibliothèques pour un fonds atteignant désormais les 1500 titres, en un mot, une présence française bien réelle soutenue tout à la fois par l’initiative privée,  les collectivités et un « Cercle francophone de Yantai » regroupant aujourd’hui plus de 4000 adhérents.

Voir aussi : Chine, chaîne chinoise CGTN-Français, collectivités, Wuhan.

Yaoundé

Capitale politique du Cameroun, Yaoundé est considérée comme la 6ème plus grande ville francophone du monde avec ses 4 100 000 habitants, le critère d’agglomération (ou unité urbaine) étant ici retenu.

Bien que le Cameroun soit officiellement bilingue, Yaoundé, tout comme Douala, la capitale économique, est située dans la partie dite francophone.
Le français y est donc largement majoritaire et, de ce fait, compris et parlé par plus de 75 % de la population.

Voir aussi : Afrique.

Z comme Zone économique exclusive (ZEE)

Zone économique exclusive (ZEE)

Définie par la convention des Nations unies sur le droit de la mer (CNUDM) signée à Montego Bay en Jamaïque en 1982, la ZEE est un espace maritime s’étendant jusqu’à 200 nautiques, soit 370 km et sur lequel un État exerce des droits souverains en matière d’exploration, exploitation et gestion des ressources naturelles.

Les enjeux sont considérables, une telle surface donnant notamment accès à tous les grands océans et à leurs  ressources, pêche, gisements de pétrole ou de gaz naturel et autres  métaux stratégiques.

Or c’est la France qui, avec ses 11 691 000 km², possède la plus grande Zone économique exclusive du monde devant les États-Unis (11 351 000 km²) et l’Australie (8 148 250 km²), position  contestée  par les États-Unis  qui n’ont à ce jour pas ratifié la convention de Montego Bay.

Qu’elle soit première ou seconde importe en fait assez peu, le plus surprenant étant peut-être, à l’heure où la mondialisation repose plus que jamais sur les flux maritimes, la relative indifférence  observée,  tout comme l’absence de lien établi avec la notion d’espace francophone.

Il reste (pourtant) deux continents qui vont exploser économiquement, l’Afrique et la mer, et les deux sont majoritairement francophones.

(Témoignage d’un ingénieur néerlandais cité dans Le Point, août 2018).

Voir aussi : Espace linguistiques, Francophilie,  francophonie, Francophonie économique.

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Y.P hoc fecit
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Droits d’auteur  Yvon Pantalacci 2020 – Reproduction interdite sans autorisation préalable. Vous pouvez ponctuellement reprendre une définition du lexique à condition de citer la source comme suit  : Lexique de La Francophonie en Partage  http://yvon-francophonie.com/lexique-glossaire-francophonie/

 

Sources et remerciements


Je tiens à remercier  :

  • Laura Ciriani, conseil en communication numérique, sans laquelle je n’aurais probablement ouvert ni ce lexique ni même ce site.
  • Yves Montenay, essayiste et vice-président d’ALF ainsi que Christian Tremblay, président de l’Observatoire européen du plurilinguisme pour leurs sites, leur soutien et leurs conversations très éclairées.

Je me suis par ailleurs appuyé sur les ouvrages  :

  • « Linguistique et colonialisme : petit traité de glottophagie » Louis-Jean Calvet. Payot. 1974
  • « La guerre des langues et les politiques linguistiques » Louis-Jean Calvet. Hachette littératures. 1987
  • « Pour une écologie des langues du monde » Louis-Jean Calvet. Plon. 1999
  • « Les langues : quel avenir ? Les effets linguistiques de la mondialisation » Louis-Jean Calvet. CNRS. 2017
  • « Le rêve de Champlain » David Hackett Fisher. Les éditions du Boréal. 2012
  • « Combat pour le français » Claude Hagège. Éditions Odile Jacob. 2008
  • « Contre la pensée unique » Claude Hagège. Éditions Odile Jacob. 2013
  • « La langue française : une arme d’équilibre de la mondialisation » Yves Montenay et Damien Soupart. Les Belles Lettres. 2015
  • « Les Cadiens au présent.  Revendications d’une francophonie en Amérique du Nord » Laura Atran-Fresco. Presses de l’Université Laval. 2016
  • « Et le monde parlera français » Roger Pilhon et Marie-Laure Poletti. 2017
  • « Guerre des langues, le français n’a pas dit son dernier mot » Frédéric Pennel. Éditions François Bourin. 2019
  • « Anthropologie de l’anglicisation » Pierre Frath. Sapienta hominis. 2019
  • « La domination de l’anglais, un défi pour l’Europe » Robert Phillipson. Libre et Solidaire. 2019
  • « Pour une linguistique de l’intime » Corinne Mencé-Caster. Classiques Garnier. 2021
  • « Les linguistes atterrés : le français va très bien, merci. » Revue publiée en mai 2023 sous la direction d’Antoine Gallimard.

ainsi que sur les rapports :

et les sites suivants :

Mes voyages, mes rencontres ainsi qu’une part de réflexion et de convictions ont fait le reste.

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